Corporate Finance, DeFi, Blockchain, Web3 News
Corporate Finance, DeFi, Blockchain News

Les IFRS ne sont pas la cause de la crise

N'en déplaise à nos dirigeants banquiers, les IFRS et leurs règles de "juste valeur" ne sont pas la cause de la crise, mais leur symptôme.


Stéphane Trébucq
Stéphane Trébucq
Dans cette inversion de causalité, nous retrouvons un débat lancé bien avant la crise des subprimes, sur l'effet de cyclicité introduit par les normes comptables internationales à partir du moment où les estimations des valeurs figurant dans les états financiers sont calées sur les prix de marché.

N'y a-t-il pas là un opportunisme certain à critiquer l'effondrement des valeurs boursières alors même que certaines banques ont été à l'origine d'un tel état de fait et que les opérateurs bancaires bien informés auraient dû alerté la communauté financière sur la situation ?
Les banquiers qui prennent position aujourd'hui contre la juste valeur sont ici dans un déni de réalité, comme un conducteur qui refuserait de voir son automobile détruite après un accident au prétexte que son mécanicien pourrait la réparer ultérieurement.

Ce que les actionnaires attendent, c'est la réalité, et non pas un nuage de fumée. Ce qui est important, effectivement, c'est que les mêmes règles s'appliquent partout. Quoique. Faut-il en déduire que les analystes financiers sont incapables de retraiter correctement les comptes et de tenir compte des différences entre les règles américaines (US Gaap) et internationales (IFRS) ?
Il est assurément dommageable que l'on veuille casser le thermomètre pour nous faire croire que la température a baissé. Bien au contraire, il aurait fallu tenir le cap, maintenir la juste valeur, afin que les acteurs bancaires anticipent la crise, et ne se comportent pas en acteurs déraisonnables, à l'image de certains banquiers passés ayant conduit dans le mur leur institution en tablant par avance sur l'aide de la puissance publique.

Si l'on souhaite que les acteurs ne se comportent pas de manière irresponsable, les règles ne doivent pas être changées au gré des circonstances. Quelles seraient les conséquences à long terme pour la société si après avoir commis de graves agressions, nous annoncions systématiquement aux déliquants qu'ils bénéficieront systématiquement de la clémence du tribunal ? Nous verrions bien évidemment une explosion des agressions. Il risque en être de même avec la modification des IFRS.

Malheureusement, les normes comptables ne sont pas définies selon un processus rationnel et fondé scientifiquement. Comme la convocation de Sir Tweedie de l'IASB devant le conseil Ecofin vient de le démontrer (8 juin 2009), l'autorité politique interfère. Le recul de l'IASB sur la "'juste valeur" devra donc être compris comme un échec, alors que cet organisme supposé indépendant s'était doté d'une méthodologie, avec notamment une consultation des parties prenantes et la production de normes s'appuyant sur un cadre conceptuel.
Il ne sera plus possible à l'avenir de considérer les travaux de l'IASB comme fondés, ou du moins pas autant qu'avant. Si au premier coup de vent ou à la première tempête les règles fondamentales sont remises en question, cela signifie que nous ne disposons pas d'un cadre fiable, et surtout stable.

Stéphane Trébucq
Maître de conférences à l'Université Montesquieu Bordeaux 4
IAE de Bordeaux
stephane.trebucq@u-bordeaux4.fr

Lundi 15 Juin 2009




OFFRES D'EMPLOI


OFFRES DE STAGES


NOMINATIONS


DERNIERES ACTUALITES


POPULAIRES