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Scinder les banques

Une banque se fait couper en morceaux, débiter en tranches comme dans un abattoir, suivant une logique nationale : Nul régalien ne voudrait assumer des décisions qui ne seraient pas in fine profitables à son pays. Mais est-ce suffisant ? Ne convient-il pas plutôt de se poser a priori les questions qui fâchent mais anticipent sur un futur dont le brouillon n'est déjà que trop écrit ? Puisque les banquiers retournent toujours mettre la main dans le pot de confiture, ne conviendrait-il pas d'imposer à l'offre de services financiers de se clarifier une fois pour toutes ?


Rémy Mahoudeaux
Rémy Mahoudeaux
Les régaliens ont la trouille de la crise systémique brandie par des banquiers en mal de liquidités. Les inconnues de cette crise en forme d'épouvantail ont effectivement de quoi perturber la quiétude des décideurs publics qui n'ont pas compris assez tôt que le marché, en imposant sa pensée unique, a pris le contrôle de la société civile. Mais surtout, le fruit de l'impôt futur doit il combler les pertes au casino des junkies de la spéculation ? Je pense qu'il y a des prérequis qui auraient pu ou du être exigés en 2008, et dont l'oubli fâcheux nous a conduit à louper un train. Ne pas louper le suivant me semble opportun !

Les 4 tâches fondamentales d'une banque de détail sont :
- tenir les comptes d'instruments financiers de ses clients : cash, devises, titres ;
- assurer pour chacune de ces classes d'actifs la logistique des flux (ordres, opérations sur titres, paiements, changes, encaissements, etc ...) ;
- prêter à ses clients et (corolaire) se re-financer ;
- distribuer des produits de placements à sa clientèle ;
Cette liste est sans doute trop maigre pour être fun. Certaines enseignes y ajoutent la distribution d'assurances ou de forfaits téléphoniques, sans que ce soit le cœur du métier. Mais il n'est pas nécessaire pour remplir ces tâches essentielles de consacrer une partie de ses fonds propres à des opérations à risques comme le trading sur compte propre. Bien sûr, si la puissance publique doit sauver une banque, c'est exclusivement la banque de détail.

En effet :
Une banque d'investissement est un prestataire de conseil à haute valeur ajoutée peu capital intensive qui, comme un grand cabinet d'audit ou de conseil, peut se satisfaire d'une structure de type partnership qui n'a pas besoin de plus qu'une bonne police en responsabilité civile professionnelle.
Une société de gestion d'actif (asset management – banque privée - capital risque – gestionnaire de hedge fund ) est une entreprise qui preste de la gestion d'investissement pour compte de tiers en mutualisant moyens, passifs et actifs, ce quelque soit la forme des véhicules d'investissements. Serait-il nécessaire de torturer longtemps les faits pour parvenir à l'aveu que les actionnaires d'une banque qui spiele sur ses fonds propres ont investi (malgré eux ? (1))dans un hedge fund qui ne dit pas son nom et dont le véhicule d'investissement et le gestionnaire sont confondus ? La défaillance de la société de gestion n'est pas un problème majeur, la déconfiture de ses véhicules d'investissements le serait beaucoup plus.

La solution semble évidente, et d'autres que moi le disent : interdire le mélange des genres est une option. Poser la question au contribuable lambda serait édifiant : s'il peut peut-être accepter des efforts pour sauver une banque de détail, il refusera pour un hedge fund. Il conviendrait donc d'isoler la banque de détail. Sauf que pour ne pas contrarier le dieu marché en prétendant lui dicter une loi, il serait plus astucieux de décider qu'à partir de dans 3 mois, ne seront secourues avec des deniers publics que les « pure players », les banques de détail qui se seront affranchies de tous liens capitalistiques, de financements ou de garanties avec les « autres » intervenants financiers, et que les garanties régalienne offertes aux déposants ne le seraient que pour ces banque de détail stricto sensu. Ainsi les banques qui ne feraient pas cet effort de recentrage et de clarification ne seraient plus éligibles aux aides publiques, et en cas de problème ne pourraient que prendre leurs mouchoirs et pleurer. En outre elles perdraient des parts de marché. Ceci aurait enfin comme avantage induit de diminuer les conflits d'intérêts potentiels dans des banques devenues trop complexes.

Autre problème à mes yeux. Pourquoi, si la puissance régalienne souhaite de fait nationaliser un établissement en perdition, devrait-elle faire un chèque conséquent sans forcément annuler les droits des actionnaires pré-existants, même si le sauvetage s'opère parfois sous forme de simples garanties ? En vertu de quel principe les investisseurs précédents ont-ils, comme dans la cour de récréation, le droit de lever le pouce en disant que ça ne comptait pas et qu'ils veulent récupérer leurs billes ? Si une banque n'est plus capable d'opérer, a-t-elle encore une valeur, quand bien même sa cotation serait encore positive et même si son price to book ratio (2) est positif mais inférieur à un. Et si elle n'en a pas, pourquoi faire des cadeaux à ceux qui, objectivement, ont pris leurs risques et ont perdu. L'asymétrie entre le traitement d'une entreprise industrielle ou commerciale en difficulté et un établissement de crédit choque mon sens de l'équité. Je ne pense pas que les temps soient propices à ces dispendieuses et inéquitables mesures.


(1) cette interrogation mériterait à elle seule un billet au moins
(2) ratio calculé en divisant la capitalisation boursière par les fonds propres part du groupe.

Rémy Mahoudeaux
Managing Director, RemSyx

boss@remsyx.com
www.remsyx.com

Mercredi 12 Octobre 2011




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