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Des build-up pour des ETI

Le petit déjeuner organisé par Industries et Finance Partenaires le 10 Janvier avait pour thème : « Le build-up est-il la solution ? » (1). Force est de constater que le tissus économique Français souffre d'une carence en ETI (Entreprises de taille intermédiaire) par rapport à ses voisins. En outre il est plus probable d'obtenir une entreprise de taille moyenne en agrégeant des plus petites qu'en attendant soit une croissance purement organique d'une de ces petites, soit un essaimage d'une entreprise moyenne à partir d'un grand groupe. Alors la solution est-elle évidente ?


Rémy Mahoudeaux
Rémy Mahoudeaux
Tout d'abord, avant d'être taxé de cuistrerie, je copie-colle la définition que donne le lexique en ligne Vernimmen.net, notre bible sémantique à tous, du Build-up :

« Suite d'acquisitions financées essentiellement par endettement, menées par une entreprise reprise en LBO destinée à constituer un groupe plus important, plus rentable grâce aux synergies mises en oeuvre et donc avec une meilleure valorisation pour ses actionnaires lors de sa cession ultérieure. »

Oliver Gottschalg, Professeur Associé à HEC a ouvert la séance en présentant le résultat d'une étude empirique qu'il a mené avec l'Observatoire du Private Equity en comparant pour les opérations build-up vs. non Buil-up. La distribution statistique des multiples de sortie. La taille des échantillons (504 opérations build-up débouclées sur un total de 1905 opérations soit 1401 non build-up) semble suffisante pour que l'analyse de cette distribution semble pertinente. Je vous laisse découvrir les résultats avec les % de distribution en ordonnée et les multiples de sortie en abscisse :

Des build-up pour des ETI

Le décalage des deux distributions, favorable aux opérations build-up, est mis en évidence, avec un écart qui est important sans être considérable. Par ailleurs, arguant du fait que plus d'une opération de M&A purement industrielle est un échec, le Professeur Gottschalg énonce ses 2 conclusions :

1) les stratégies d'acquisition de type build-up n'augmentent pas le risque des investissements ;
2) les acteurs du private equity sont plus aptes à conduire des stratégies de consolidation sectorielle.


Les retours sur expérience de deux entreprises, Climater et Européenne Food, ont permis de bénéficier de l'éclairage coté entreprise sur des opérations de build-up réussies.

Mes quelques réflexions et commentaires d'iconoclaste patenté :

L'acquisition d'entreprise n'est tout compte fait qu'un avatar sophistiqué de l'option « make or buy ». Mais une stratégie d'entreprise qui se focaliserait exclusivement sur le « buy » pour sa croissance serait dangereuse. Une entreprise se doit de progresser organiquement, la croissance externe étant en quelque sorte une cerise sur le gâteau : incrément de prise de risque pour « acheter » si tout se passe bien le temps économisé par l'intégration de la cible. Certes, il existe des secteurs où la granularité du tissus des entreprises se prête aux regroupements. Dans ces secteurs, que je connais peu, il est probable qu'une stratégie de build-up alliant des financiers du Private Equity aux « entrepreneurs légitimes » puisse être rationalisée et couronnée de succès. Dans d'autres secteurs, surtout dans les secteurs technologiques où investit le Venture Capital, j'en doute. Il est cependant prévu une analyse sectorielle plus fine qui permettra peut-être de lever ce doute.

Ce qui est une surprise pour moi : alors qu'une stratégie de build-up vient compliquer l'investissement initial par de multiples rejetons exposant l'entreprise en portefeuille aux écueils des intégrations ratées, il apparaît que cela n'allonge pas la durée de vie des fonds, au contraire même.

La seconde conclusion du Professeur Gottschalg me gène un peu. Tout d'abord le mot « conduire » me semble déplacé. J'aurai préféré l'usage d'accompagner. Mais surtout parce qu'il existe (du moins je le crois) un facteur limitant chez les fonds de private equity qui investiraient dans des entreprises implémentant une stratégie de build-up : l'homme ou la femme en charge d'une participation qui procède à entre 2 et 4 acquisitions par an ne peut pas imaginer en suivre 10 ou 20 de ce type. Ce serait bien trop chronophage, compte tenu des enjeux et des risques que représente chaque acquisition. Or, cette personne détient la clef des financements et s'implique suffisamment dans le travail préliminaire à chaque opération pour être bien plus perspicace qu'un couple ( banquier d'affaire ; banquier qui prête ) : elle est parfaitement complémentaire de la direction opérationnelle. Ce sont les caractéristiques d'un investisseur hands-on (2) qui, à mon sens, font la différence. Mais un investisseur hands-on dans le private equity n'est pas obligatoirement ou exclusivement focalisé sur une stratégie agressive d'acquisition. De plus un simple administrateur, indépendant ou non, qui procèderait de même serait tout aussi bénéfique dans le processus d'acquisition.

Les stratégies de build-up seraient la solution à l'insuffisance quantitative des ETI en France ? Même si je ne doute pas qu'elles puissent être une solution parmi d'autres, voire une partie de la solution s'appliquant à certaines entreprises, je ne suis pas d'accord avec l'utilisation d'un article défini. Les aspect sociaux, fiscaux et règlementaires où nos régaliens régulateurs et nos partenaires sociaux institutionnalisés se montrent un brin tatillons sont aussi à mettre en cause comme des freins au franchissement des seuils de croissance dans bon nombre d'entreprises. Faire sauter ces verrous me semble au moins aussi utile et plus urgent.

Cette présentation était très intéressante, merci à Industries et Finances d'avoir commandité cette étude et d'en avoir partagé les résultats ainsi que des retours sur expérience dans un cadre convivial.

(1) intervenaient : Oliver Gottschalg – HEC ; Pierre Mestchersky – Industries et Finances ; Stéphane Gilet – Climater ; Dominique Degand – Européenne food.
(2) si quelqu'un dispose d'une traduction plus satisfaisante que « capable de mettre les mains dans le cambouis », je le remercie de m'en faire part.

Rémy Mahoudeaux
Managing Director, RemSyx

boss@remsyx.com
www.remsyx.com

Vendredi 13 Janvier 2012




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