Pour rappel, un ETF (Exchange Trade Fund) est un type de fonds d'investissement qui se négocie sur les marchés boursiers et qui suit un indice, un secteur, une matière première ou d'autres actifs (ici le Bitcoin). Cela permettra notamment aux investisseurs de s’exposer à cette classe d’actifs directement sur un compte titre et sans jamais avoir à interagir avec la blockchain.

Concrètement, c'est une méthode d'investissement souvent considérée comme plus transparente, plus sécurisée et plus simple. Les conséquences seront nombreuses, à commencer par un afflux massif de capitaux, les géants de la gestion d'actifs ayant la nécessité de détenir du bitcoin en propre afin de commercialiser leur ETF au comptant.

En plus d'une fraîche liquidité, c'est une véritable reconnaissance envers bitcoin. Ce n'est plus une "monnaie virtuelle qui ne repose sur rien" mais un actif financier à part entière, digne des Blackrock, Vaneck et autres Fidelity.

Par l'institutionnalisation de la demande, nous avons une institutionnalisation de l'offre, et donc un accès facilité à la crypto, voie royale vers une démocratisation de masse. Le fossé entre la finance traditionnelle et la crypto est désormais comblé, les deux co-existent et l'un propose désormais l'autre à sa clientèle.

Et tout le problème est justement là ! Si nous pourrions louer cette histoire d'un point de vue financier et/ou spéculatif, il en est tout autre chose d'un point de vue philosophique. En effet, alors que les prévisions désormais établies pour le BTC sont unanimes et toutes optimistes, allant de 100.000$ à 1M$, nous sommes en droit de poser la question suivante :

Car la définition d'un ETF est finalement totalement antinomique avec la reine des cryptos. Tandis que le BTC permet d'en avoir la pleine possession et un contrôle total en s'affranchissant de tout tiers de confiance, l'ETF propose pour sa part l'inverse : s'exposer à un actif sans avoir à le détenir soi-même.

Si l'investissement est démocratisé et rendu accessible, il n'en est rien du cas d'usage. Je pense pas que Satoshi Nakamoto aurait un jour imaginé sa création aux mains des géants de la finance traditionnelle, dans la mesure où son livre blanc est une réponse directe aux dérives du secteur, et plus spécifiquement à la crise des subprimes de 2008.

Je ne suis pas certain que les habitants du Salvador, ceux du Vénézuela, de l'Argentine, du Niger ou toute autre pays naviguant entre inflation galopante et régime autoritaire aient attendu la validation d'un ETF par le gendarme financier américain pour utiliser bitcoin et partagent une joie commune liée à cette nouvelle.

Tant mieux pour ceux qui n'ont pas accès aux services financiers si l'arrivée des ETF leur permet de voir la valeur de leur portefeuille bitcoin augmenter : ils en ont bien besoin. Pour le reste, nous sommes aux antipodes de ce que représente bitcoin.

Le bitcoin est un système monétaire à part entière et permet à n'importe qui sur la planète d'envoyer ou de recevoir de la valeur, sans passer par un organe de contrôle, sans dépendre de qui que ce soit, sans censure possible et le tout, 24/7, en toute transparence, de manière sécurisée et instantané. Il est également le premier cas d'usage concret de ce qu'est la blockchain.

C'est une petite pique à l'écosystème, parfaitement compréhensible pour qui ne s'aveugle pas à travers l'argent. La première chose souvent affichée publiquement par les membres de l'écosystème est la passion, parfois doublée d'un esprit qui se veut chevaleresque et anti-système.

Sauf que personne n'est dupe : les start-ups de l'écosystème ne sont pas philanthropiques et le fil d'actualité Linkedin est bien plus parsemé de levées de fonds en tout genre et d'opportunisme grandissant que d'idéologie du bien commun !

Cependant, bien que je comprenne la critique, ce n'est pas non plus mon avis. Si l'on s'éloigne surement de l'objectif de Satoshi en distribuant sa création par des gestionnaires de fonds, il faut nuancer et reconnaitre plusieurs points positifs :

Les fonds détiendront du bitcoin pour le compte de leur clients et non pour leur compte propre.
Les fonds participeront au changement de narratif ambiant (crypto = arnaque ou blanchiment).
Le bitcoin sera ENFIN démocratisé, peut-être pas encore dans son usage souhaité, mais à minima dans la connaissance de ce que c'est.

Pour conclure, et je pense que c'est le cas de beaucoup de "confrères", si j'aime bitcoin pour tout ce qu'il représente -sa philosophie et sa tech sous-jacente-, je suis également investisseur et à ce titre, j'estime que les ETF sont une bonne chose !

Chronique réalisée par Benoît de Jessey, CEO de Cryptech

Notes :
Benoit de Jessey est co-fondateur de Cryptech, "solution innovante de placement pour la trésorerie d’entreprise"

Nota Bene, Benoît de Jessey s’exprime ici en qualité de contributeur afin d’éclairer sur des actualités du monde de la crypto. Il ne s’agit en aucun cas de conseil en investissement. Benoît de Jessey et Finyear ont conclu un engagement moral concernant ce point. Les propos tenus dans cette chronique ne concernent que son auteur. Si Finyear opère un filtre éditorial, les opinions émises ne peuvent pas être considérées comme le reflet de la direction.

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