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Crypto-monnaies : vers une réglementation généralisée ?

Par Laura Péré, consultante chez mc2i & Lorenzo Bertola, Directeur du pôle banque, finance, assurance chez mc2i.


L’intérêt pour les crypto-monnaies et la blockchain ne cesse d’augmenter depuis plusieurs années. Évoluant autrefois en marge du système financier, les monnaies numériques ont depuis quelques années gagné en légitimité. En effet, en novembre 2021, elles ont temporairement atteint les 3 000 milliards de dollars de capitalisation. Ce montant dépasse ainsi la valorisation cumulée des sociétés du CAC 40.

Jack Dorsey, fondateur de Twitter et de Square, a quant à lui déjà indiqué croire au potentiel des crypto-monnaies : « Le monde finira par n’avoir qu’une seule monnaie. Internet n’aura qu’une seule monnaie. Je crois personnellement que ce sera Bitcoin ».

Désormais, tous les acteurs économiques s’y intéressent : les grandes entreprises, mais aussi les investisseurs institutionnels, les banques, et les réseaux de paiement, comme Paypal ou Mastercard, qui intègrent aujourd’hui les crypto-monnaies à leurs systèmes.

Basées sur la blockchain, elles permettent aujourd'hui à des utilisateurs du monde entier d'effectuer des transactions sur des réseaux distribués.

Cependant, le manque de contrôle et de cadre réglementaire met en danger les particuliers. En effet, ils sont souvent mal informés face à des géants de l'investissement qui influent à leur avantage sur le prix des crypto-monnaies. Il est donc nécessaire d'avoir une coordination internationale à ce sujet et d'instaurer un cadre réglementaire pour protéger les acteurs, ce qui semble loin d'être évident.

État des lieux de la réglementation française

Afin de répondre au développement croissant du marché des actifs numériques et à la nécessité de clarifier le droit applicable, la France a introduit la loi PACTE, adoptée le 11 avril 2019. Celle-ci instaure un nouveau cadre réglementaire pour les opérations liées à l’émission de jetons de monnaies électroniques (appelés également ICO pour “Initial Coin Offering”). Elle crée également un nouveau statut pour les professionnels de la crypto-monnaie : les “Prestataires de Services sur Actifs Numériques” (PSAN). La France se positionne, avec ce texte, comme l'un des grands acteurs mondiaux en termes de cryptos-actifs.
Les objectifs sont multiples :
• L'instauration d'un cadre réglementaire et de certaines exigences à la levée de fonds par émission de jetons
• L’enregistrement obligatoire auprès de l’AMF pour les PSAN
• La mise en place d’agrément AMF (obligatoire pour les PSAN souhaitant démarcher le grand public)

La finalité est d’assurer l’intégrité du marché, ainsi que de fournir une information fiable et des garanties aux investisseurs.

De plus, dans le cadre de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT), le PSAN doit identifier et évaluer les risques auxquels il est exposé et mettre en place une politique adaptée à ces risques (selon notamment les caractéristiques clients ou pays).

Vers une réglementation au niveau européen ?

La Commission Européenne prend quant à elle une position de défiance vis-à-vis des crypto-actifs. Elle propose donc d’encadrer les activités autour des actifs numériques afin de garantir la protection des consommateurs et investisseurs, tout en soutenant l’innovation et en garantissant la stabilité financière. Elle a publié le 24 septembre 2020 une proposition de règlement intitulée « Markets In Crypto Assets » (MiCA, avec un objectif d’entrée en vigueur dès 2024.

Sa position, notamment sur les stablecoins (jetons avec faible volatilité), semble manifester la crainte que ces crypto-monnaies viennent concurrencer l’Euro. Cette position protectionniste de l'Union Européenne se traduira par l’obligation d’une supervision de l’Autorité Bancaire Européenne. De plus, les fournisseurs devront obtenir un agrément auprès d'une autorité compétente avant de proposer leurs services dans l’Union Européenne.

D’autre part, la 5ème directive européenne relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux impose de nouvelles obligations aux acteurs du marché des crypto-actifs. La directive considère les plateformes d’échange et les fournisseurs de portefeuilles de crypto-actifs comme des entités assujetties à la LCB-FT. Concrètement, ces acteurs seront tenus d’exécuter des procédures approfondies de KYC (Know Your Customer) et CDD (Customer Due Diligence) lors de l’établissement d’une relation commerciale.
Par ailleurs, d’autres parties prenantes atténuent la marge de manœuvre du législateur européen, comme certaines organisations inter-gouvernementales, à l’instar du Fonds Monétaire International (FMI) ou du Groupe d’action financière (GAFI).

Vers un cadre réglementaire mondial ?

Certains Etats à travers le monde, notamment le Salvador, ont instauré une crypto-monnaie comme monnaie légale. En réponse à cela, le FMI a mis en garde le pays contre « les risques importants associés à son utilisation pour la stabilité financière, l’intégrité financière et la protection des consommateurs ».

Le FMI a également recommandé au Financial Stability Board (FSB d’élaborer un cadre mondial comprenant des normes de réglementation des actifs de crypto-monnaie dans le but de fournir une approche globale et coordonnée de la gestion des risques pour la stabilité financière.

Le GAFI qui est spécialisé dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, recommande que les prestataires de services liés aux crypto-monnaies soient réglementés. De plus, il préconise qu’ils soient autorisés, enregistrés ou soumis à des systèmes efficaces de suivi ou supervision.

Du côté des USA, il n’y a pas de réglementations spécifiques aux crypto-monnaies. Néanmoins, pour le président de la FED Jérôme Powell et la secrétaire du trésor Janet Yellen, il est nécessaire d’approuver rapidement une réglementation de ce marché. En effet, selon eux, la croissance des « stablecoins » représenterait un élément de déstabilisation pour les marchés financiers traditionnels.

Certains courtiers spécialisés dans les crypto-monnaies eux-mêmes partagent ces constats et sont en faveur d’un cadre réglementaire : Coinbase par exemple travaille actuellement sur des propositions qui seront présentées aux régulateurs américains.

Concernant la Chine, le gouvernement a clairement affiché sa réticence aux crypto-monnaies en 2017, en supprimant les plateformes d’échanges locales et en interdisant les ICO. De plus, l’usage des crypto-monnaies est interdit dans les banques chinoises depuis peu.

Ces choix sont en alignement avec le lancement de sa propre monnaie virtuelle, le yuan numérique (e-CNY). En effet, la Chine souhaite s’imposer en éliminant la concurrence sur son propre territoire et en contournant l’influence du dollar dans le monde.

Certains pays ont pris conscience des risques liés à l’adoption des crypto-monnaies et mettent en place des réglementations à leur échelle. Cependant, il apparaît qu’au niveau mondial, il y ait des désaccords, ce qui ne permet pas de créer une réglementation unique applicable à tous.

« Vous pensez que les gens flippent au sujet du Bitcoin ? Imaginez comment ils ont flippé quand on leur a dit que dorénavant, au lieu de commercer avec de l’or, ils utiliseraient des bouts de papier. » Andreas Antonopoulos.

Mardi 22 Mars 2022




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