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Web3 : l’écosystème français déjà mûr ?

Janvier 2023, Retail’s Big Show de la NRF, New York. Pour cet évènement, l’une des grand-messes mondiales des écosystèmes numériques, 40 startups françaises viendront représenter la French Tech. Parmi elles, une dizaine est positionnée sur le segment du Web3. Signe de la maturité de la filière hexagonale ? Oui, selon Ben Marrel, l’un des cofondateurs du fonds de capital-investissement Breega, qui nous livre ses perspectives pour le secteur. Pour lui, « la France a su capitaliser sur son potentiel pour s’imposer comme l’une des places fortes mondiales des filières Web3 et FinTech ».


Un fourmillement d’initiatives

Dans le monde du Web3 français, les initiatives s’accumulent et l’écosystème montre qu’il a la bougeotte. Et ce, malgré une actualité sectorielle pour le moins tendue et un bear market qui n’en finit plus. Avril 2022. Le géant chinois Binance installe à StationF, un espace entièrement dédié au Web3. 8 juin 2022. Côté VC, Ledger et Cathay Innovation lancent un fonds de 100 millions d’euros consacré au Web3. 22 juin 2022. Côté capital-investissement, le fonds Breega lève 250 millions pour les fintechs et le web3. « Un tiers dédié au marché français. Le reste pour le Royaume-Uni et l’Espagne et son potentiel de projection en Amérique latine », souligne Ben Marrel, dont le fonds s’est implanté successivement à Londres et Barcelone. 12 juin 2022. Méta, la maison-mère de Facebook, s’allie avec Simplon, l’une des écoles de référence des métiers du numérique, pour déployer dans plusieurs grandes villes françaises des campus centrés sur la formation de développeurs et techniciens pour les acteurs du Web3.

Derrière les deux licornes françaises valorisées à plus d’un milliard de dollars, Sorare, spécialisée sur le « fantasy sport » à partir de cartes digitales sous forme de NFT et Ledger, le géant national des portefeuilles numériques, c’est tout un écosystème qui fourmille d’innovations et tend à se structurer. « Ces deux succès démontrent tout le potentiel des start-ups françaises et poussent les fonds à y investir très tôt », affirme Ben Marrel. Même pour les groupes cotés, pas question de prendre le train en marche. Citons, entre autres, EDF, qui cherche à donner une vie nouvelle à ses supercalculateurs par la gestion de nœuds sur Etherum via sa filiale Exaion, le Groupe Casino qui garantit la propriété de vins classés par des NFTs ou encore la Société Générale et sa filiale Forge spécialisée dans les cryptoactifs. « Le positionnement des grands groupes sur le Web3 est stratégique pour deux raisons : d’abord, cela prouve qu’ils ont confiance dans ses potentialités opérationnelles. Ensuite, leur force de frappe permet de toucher des marchés bien plus vastes que les nouveaux entrants et contribue à acculturer peu à peu le grand public à ses nouveaux usages », considère le cofondateur et CEO de Breega.

Déploiement d’un cadre juridique clair

Quels sont les ressorts du succès du Web3 made in France, alors même que l’Hexagone pointe péniblement à la 12e place du classement international de l’innovation ? « J’identifie personnellement trois raisons principales. D’abord, la mise en œuvre d’un cadre juridique ambitieux et strictement défini. Ensuite, une impulsion politique venue du plus haut-niveau, dont il faut reconnaître la réussite. Enfin, un vivier déjà fertile », affirme Ben Marrel.

Deux grandes étapes sont venues jalonner la formalisation du droit français et européen relatif aux cryptomonnaies. La création du PSAN en France, d’abord, qui oblige les entreprises proposant des services d’échange de cryptomonnaies à s’enregistrer et recevoir l’agrément de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Un statut clair, dont les délais de traitement pour son obtention ont été durablement raccourcis, passant de 18 à 6 mois en moyenne. L’adoption du règlement MiCA à l’échelle européenne ensuite, pensé sous l’impulsion des textes français, qui encadre sereinement le développement du Web3 à l’échelle de l’UE.

Mais tout n’est pas encore fixé. De nouveaux changements pourraient encore advenir en 2023, avec une possible révision du régime fiscal français des cryptoactifs. « Une réglementation saine permet à tous les acteurs d’être sur un pied d’égalité sans être parasités par ceux qui ne respecteraient pas les règles, tout en s’attachant à ne pas freiner l’innovation. C’est ce qui est en train de se dessiner », estime Ben Marrel. La crainte d’une France juridiquement hostile aux usages du Web3 et d’une hypothétique lourdeur administrative et bureaucratique pour les acteurs du secteur tend à s’estomper. Un soulagement évident pour la filière.

Le soutien politique, un catalyseur ?

Sur le plan du soutien politique, tout n’était pas non plus gagné. En octobre 2020, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire dénonçait sur une chaîne publique la supposée responsabilité des monnaies virtuelles dans le financement des mouvements terroristes. Cette prise de position avait fortement ému la filière. Et notamment l’ADAN, l’une des principales associations du secteur, qui déplorait dans un communiqué daté du 3 novembre 2020 que « les actifs numériques soient encore pointés du doigt comme boucs émissaires faciles en ces temps troublés, alors que l’industrie est en plein essor et aurait plutôt besoin d’un soutien public ». Mais la filière a rapidement pu se rassurer. Deux ans plus tard, le même Bruno Le Maire affirmait vouloir faire de la France « le hub européen de l’écosystème des cryptoactifs », tout en déclarant sa flamme au marché des NFT. Autre preuve de l’intérêt croissant de la sphère publique pour le monde du Web3, BPI France a annoncé, en juin dernier, abonder à hauteur de plusieurs millions d’euros le fonds Web3 lancé par Ledger et Cathay Innovation.

Hors des prises de position les plus médiatisées du ministre de l’Économie, Jean-Noël Barrot, le secrétaire d’État à l’économie numérique, dont l’intérêt pour les cryptomonnaies est pleinement assumé, s’active en sous-main et écume les évènements de la filière Web3 pour promouvoir l’attractivité de la France et en attirer les principaux acteurs. Pari réussi ? L’installation coup sur coup de deux mastodontes du secteur en France, la plateforme d’échange de cryptomonnaies Binance et la bourse Crypto.com, a sans nul doute renforcé la place parisienne sur le plan international. « Soutien politique et clarté juridique n’ont cependant été que les catalyseurs d’un potentiel existant. La France bénéficiait déjà d’un réseau universitaire scientifique et technique de très haut niveau et d’un très riche tissu d’entrepreneurs sur lesquels il fallait en effet capitaliser », tempère Ben Marrel.

Tempête en vue ?

Dans le même temps, des inquiétudes se font sentir après la faillite du géant FTX, stoppé net dans sa croissance effrénée le 11 novembre dernier avec, dans l’air, un parfum de scandale. Le tout dans un contexte déjà sous pression après l’impressionnant cryptokrach de juin 2022, qui a vu le bitcoin perdre environ 70 % de sa valeur. De quoi jeter un froid même chez les plus enthousiastes. Depuis, les valorisations stagnent, voire subissent une tendance baissière, les levées de fonds sont plus modestes et les deals plus rares. La tempête va sans doute durablement réorganiser le marché. En bien ? « Les récents évènements peuvent contribuer à structurer le marché de manière apaisée. Les dossiers sont désormais étudiés avec plus de minutie, on fait plus de due dil. On se concentre sur la technologie, ce qu’elle peut apporter aux gens et sur la cohérence du business model. La confiance mettra quelque temps à revenir, mais elle reviendra… », souligne, confiant, Ben Marrel.

Et demain ? « Au-delà des faillites ponctuelles et des évolutions cycliques de l’industrie, je crois fermement au potentiel de transformation du Web3 et à la massification de ses usages. Dans ce domaine, comme ailleurs, il faut penser le long-terme et ne pas se laisser trop émouvoir par les soubresauts, dont il faut comprendre les ressorts pour structurer et nettoyer le marché », conclut le cofondateur de Breega.

Vendredi 23 Décembre 2022




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