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Un diplôme n’est pas nécessairement un élément objectif permettant de choisir entre deux candidats

Selon la Cour de cassation, un diplôme n’est pas nécessairement un élément objectif permettant de choisir entre deux candidats à un poste à pourvoir sans encourir le risque de discriminer…


Cass. soc. 15 décembre 2011, n° 10-15873

Récemment, la Cour de cassation s’est prononcée sur une affaire qui avait défrayé la chronique en 2010, dans laquelle deux salariés, employés pour des missions d’intérimaires, à des postes identiques, par la société Airbus France (devenue Airbus Opération), avaient candidaté à un poste (en CDI) au sein de la société.

Le candidat écarté de la procédure de recrutement, soutenant qu'il avait fait l'objet d'une discrimination liée à son origine maghrébine et à son nom de famille, avait saisi le Conseil de prud’hommes de Toulouse afin d’obtenir sa réintégration dans l’entreprise ainsi que des dommages et intérêts.
La société Airbus Opération avait notamment justifié son choix en avançant le fait que le candidat retenu était titulaire d’un diplôme d’un niveau supérieur (baccalauréat professionnel) à celui du candidat évincé (BEP).

Le Conseil de prud’hommes donnait raison à la société et jugeait que le recrutement, fondé sur un élément objectif (l’obtention d’un diplôme de niveau supérieur), n’était pas discriminatoire.

L’affaire était alors portée devant la Cour d’appel de Toulouse qui considérait que le recrutement n’était pas fondé sur un élément objectif, notamment parce que :
- rien ne prouvait que le niveau baccalauréat professionnel était une exigence indispensable pour le poste ;
- une partie des salariés occupant des postes similaires dans l’entreprise n'étaient pas titulaires d'un baccalauréat professionnel ;
- et parce que l’employeur n’avait pas défini en amont les exigences requises pour le poste (il n’avait notamment pas publié d’offre mentionnant une condition de diplôme).

La Cour d’appel, en revanche, refusait d’ordonner la réintégration du salarié évincé dans les effectifs de la société Airbus Opération ce qui, 4 ans après les faits, aurait eu des conséquences désastreuses pour l’entreprise.

Rappelant le principe (trop souvent malmené) selon lequel il est impossible de contraindre un employeur à conclure un contrat de travail, elle décidait pour la première fois que l’article L. 1132-4 du Code du travail (qui prévoit la nullité de tout acte discriminatoire) n’était pas applicable aux discriminations à l’embauche.

En conséquence, le salarié se voyait « simplement » octroyer 10.000 € de dommages et intérêts.

La société Airbus Opération a porté le litige devant la Cour de cassation afin de contester cette condamnation ; son pourvoi a été rejeté le 15 décembre 2011, la Cour estimant que la détention d’un diplôme supérieur ne constitue un élément objectif qu’à condition de prouver qu’il est utile « à l’exercice des fonctions en vue desquelles le recrutement a été effectué ».

Pour les employeurs, cela signifie qu’il ne sera désormais possible de justifier le choix d’un candidat en fonction d’un diplôme qu’à la condition de pouvoir prouver :
- que le diplôme est nécessaire pour occuper le poste concerné ;
- ou bien qu’en amont, l’obtention de ce diplôme a été définie comme une condition pour le poste, qui devra être mentionnée dans l’offre d’emploi.

En conséquence, les employeurs devront, avant même d’initier une procédure d’embauche, avoir à la fois défini précisément le poste à pourvoir et identifié le ou les diplômes dont devra être titulaire le candidat sélectionné, ce qui nous paraît pour le moins ambitieux et va singulièrement complexifier la rédaction des offres d’emploi…

Cette jurisprudence restreint un peu plus la liberté des entreprises dans le choix des candidats.

Si la qualité des diplômes n’est même plus nécessairement un élément objectif de nature à justifier le choix d’un candidat, il est permis de s’interroger légitimement sur les critères que les employeurs vont désormais pouvoir invoquer pour expliquer leur décision et ainsi éviter des condamnations…

Dans la mesure où le recrutement d’une personne appartenant à une « minorité » sera plus difficilement contestable, ce type de décisions n’incite-t-il pas précisément à choisir un candidat en raison de ses origines, plutôt qu’en fonction de ses qualités professionnelles ?

Plus encore, si le choix d’un candidat doit être intégralement fondé sur des critères objectifs et prédéterminés, quel sera désormais l’intérêt des entretiens d’embauche ? En effet, à pousser le raisonnement à l’extrême, pourquoi ne pas aller jusqu’à les supprimer et les remplacer par un traitement automatisé des candidatures… Mais est-ce qu’un recrutement réalisé sans la moindre considération de la personnalité du candidat est réellement un recrutement efficace ? Nous nous permettons d’en douter.

La Revue est une publication Squire Sanders | Avocats Paris
www.ssd.com

Vendredi 24 Février 2012




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