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Un autre regard sur la RSE…

La RSE (1), d’abord sigle pour Responsabilité Sociale des Entreprises, puis devenu plus récemment celui de Responsabilité Sociétale des Entreprises (pour marquer davantage la responsabilité, l’impact de notre activité économique sur l’environnement, le patrimoine planétaire) constitue un immense sujet… l’alpha et l’oméga de la problématique aux multiples visages que connaît le monde d’aujourd’hui (cela dans la mesure où il est maintenant admis que « l’économique » contraint « le politique »)…


Rémi Guillet
Rémi Guillet
Mais il faut aussi rappeler que les entreprises ne font que se positionner, oeuvrer au mieux de leurs intérêts, (le plus souvent ceux de leurs actionnaires !), appliquant des théories économiques « libérales », donc plutôt peu coercitives, notamment celles qui ont accompagnées l’apparition de l’ère industrielle occidentale et le phénoménal développement induit par celui des sciences et autres technologies… depuis maintenant plus de deux siècles.

Aujourd’hui, on est en mesure d’appréhender l’impact engendré par un développement intensif, ni régulé, ni encadré, ni véritablement maîtrisé, qui n’a su, ni (plus tard) voulu tenir compte de ce qu’il coûtait à la planète, qui a fait l’impasse autant sur la valeur du patrimoine « naturel » alors gaspillé, détruit, que sur la catastrophe écologique provoquée par nos rejets.

Avec le paradigme de la « société de consommation » née après la deuxième guerre mondiale, la RSE ne pouvait donc être mise opportunément sous les projecteurs, laissant alors toute la place au défi de la croissance, une croissance sans limite, progressivement devenue structurellement indispensable à la « survie » d’un modèle économique reposant de plus en plus sur l’anticipation, l’hypothèque sur l’avenir, plus prosaïquement sur le crédit (on achète avant d’en avoir les moyens et le crédit est désormais sollicité aussi bien pour l’investissement que pour la consommation !).

Avec une économie ainsi boostée, en peu d’années, notre Terre en est venue à rendre l’âme, incapable d’assouvir nos besoins en matières premières, en énergie, encore moins en mesure de digérer nos « rejets »… Et l’inquiétude a gagné la conscience collective… Des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour rejoindre le point de vue des quelques pionniers des années 60, alors considérés comme de doux rêveurs. La RSE est devenue une préoccupation…


Dans ce contexte, il est particulièrement pertinent de noter que le modèle économique qui aura marqué le XXème siècle « occidental » (modèle qui, n’ayant toujours pas de véritable concurrent, inspire aujourd’hui encore tous les pays émergents) ne pourra pourtant perdurer encore très longtemps… En effet, ce modèle se complait à ignorer que :

- notre planète est un milieu fini,
- les ressources naturelles ne peuvent plus être utilisées sans compter,
- globalement, l’impact de l’activité économique intensive est responsable de catastrophes dont le coût n’a (déjà) plus de commune mesure avec la « richesse » produite,
- l’iniquité du partage de ladite richesse augmente avec le développement économique, in fine, mettant en péril la cohésion sociale des Etats et la stabilité du monde,
- un grave hiatus est né entre l’économie réelle et son image financière (virtuelle, ou plutôt, stricto sensu, « numérique »),
- un paradigme économique d’abord au service du « capital » et de ses possesseurs qui amène un pays à ne plus pouvoir intégrer l’ensemble de ses forces vives, notamment celles de sa jeunesse, met en péril sa stabilité politique.


Autant de points qui ont leurs déclinaisons dans le cadre d’une réflexion sur la RSE, qu’elle soit considérée selon une approche macro économique ou micro économique.

Et, appréhendée comme entité isolée, la responsabilité sociale/sociétale de l’entreprise se mesure à l’aune de la liberté de stratégie, de gestion, que lui laisse une économie globalement très libérale.


Mais, malgré l’évolution de ce que recouvre le sigle RSE, notre « regard » nous amène à (re)mettre au premier plan le rôle social de l’entreprise (1), l’aspect sociétal y étant désormais le plus souvent associé en filigrane, implicite.

En effet, avant d’être écologique, la « crise » en cours est d’abord sociale. Et, face à l’urgence, il y a plus à attendre d’un modèle de développement revisité, plus soucieux de ses retombées sociales que d’orientations répondant aux préoccupations environnementales pérennisant le modèle économique en cours. Plus concrètement et par exemple, les velléités d’une « croissance verte » ne sont pas forcément pertinentes c’est-à-dire porteuses de réponses face à la problématique sociale et à l’urgence de son traitement. Alors, il est utile de percevoir les priorités et de s’y consacrer…

Alors, se rappeler que ce sont les entreprises qui offrent les emplois, ce sont elles qui rémunèrent le travail et donnent leur pouvoir d’achat aux salariés c'est-à-dire apporte à la majorité des citoyens leurs moyens de vivre, à tous leur capacité à consommer les biens et services produits par l’activité économique. Ce sont elles qui, au bout du compte, assument les attentes d’un peuple en matière d’insertion… En cela, vues dans leur ensemble, les entreprises ont la responsabilité d’équilibres « sociaux » essentiels, à commencer par celui de produire des « utilités » auxquelles les « consommateurs » peuvent accéder.


Et chacun, là où il est, doit se sentir concerné par le (bon) fonctionnement de l’économie moderne, doit se rappeler que chaque citoyen « actif » trouve sa dignité en étant à la fois producteur et consommateur. (Il s’agit pourtant là d’un oubli presque récurrent… chez les défenseurs des consommateurs, voire les pouvoirs publics qui n’attachent pas toute l’importance que mérite le travail dans l’intégration sociale de leurs administrés …).

C’est avec de telles prémisses que cet article tente un éclairage (probablement inattendu pour certains lecteurs !) de la Responsabilité Sociale/Sociétale de l’Entreprise.

La RSE ou la contribution de l’entreprise au « défi social/sociétal » en 8 points…

1 - Maintenir l’emploi via la « flexisécurité interne »

Structure juridique, entité morale, l’entreprise (capitaliste) doit à la fois se donner les moyens de ses ambitions économiques naturelles (d’abord exister, ensuite produire de la valeur ajoutée… pour durer !). Alors, l’entreprise doit en permanence se rappeler que son présent comme son devenir tiennent à son savoir faire, à son potentiel d’innovation c'est-à-dire sont une affaire d’hommes et de femmes qui doivent partager dans la durée une même foi, donc des hommes et femmes qui ne peuvent être traités comme la première variable de gestion (optimisée) de ladite structure.

Et l’entreprise doit tout faire pour mettre en place et entretenir les meilleurs liens de confiance, d’une part, entre ceux qui y apportent leur travail et, d’autre part, ceux qui apportent leurs capitaux.

En cas de baisse d’activités, plutôt que des licenciements ou autre départ à la retraite anticipé, la gouvernance d’entreprise a tout à gagner (et pas uniquement au nom de la RSE) à s’orienter vers le travail à temps partiel, avantageusement le compléter par des heures de formation qu’elle gagnera à encadrer. Des pays voisins ont montré le chemin !

Ceci signifie la mise en place de ce que nous appelons une « flexisécurité interne » à l’entreprise qui maintient (autant que faire se peut !) l’emploi salarié, en s’appuyant alors sur des modalités de rémunérations adaptées, et selon notre suggestion, rémunérations faites de la masse salariale revisitée et de participation aux résultats, flexible, indexée sur les profits (2).

2 - Fidéliser ses actionnaires

Après les hommes et les femmes, les capitaux engagés dans l’entreprise sont le deuxième pilier de la structure. La pérennité de l’entreprise passe donc par la fidélisation des capitaux, donc, en général, par la fidélisation de ses actionnaires…

Alors et en cohérence avec les modalités de rémunération de ses salariés et afin de favoriser l’établissement et le maintien d’un lien de confiance durable entre salariés et actionnaires, les mesures de fidélisation de ces derniers passent (toujours selon notre suggestion(2)), par des modalités de rémunération « symétriques » à celles proposées pour les salariés, donc par une rémunération d’actionnaires faite de profits revisités auxquels s’ajoute une prime de fidélité à l’entreprise, indexée sur la masse salariale…

(A noter que cette disposition mérite le même rang que la précédente du point de vue de son importance)


3 - Partager équitablement la « valeur ajoutée » entre partenaires internes et externes

La finalité de l’entreprise est de produire de la « richesse », de la « valeur ajoutée ». Et le partage de cette richesse relève fondamentalement de la RSE.

Selon le mode de rétributions traditionnel, les profits vont exclusivement aux actionnaires (voire plus généralement aux possesseurs des actifs), les charges(3) salariales vont exclusivement aux salariés : c’est la masse salariale. Comme il s’agit d’une distribution dont la somme relève des résultats comptables (qui est donc définie), plus les premiers ont, moins les seconds auront et inversement.

Ainsi, un climat conflictuel a toujours régné au sein de l’entreprise, entre les détenteurs du capital et les salariés (un conflit exacerbé par les analyses de Marx alléguant que la totalité de la valeur ajoutée devait revenir au seul « travail »). Le modèle que nous avons développé (2) a mis l’équité de la distribution de la valeur ajoutée au coeur d’une négociation entre actionnaires et salariés. Il y a là une négociation qui, par principe, est aussi une contribution à la quête macro économique d’un équilibre satisfaisant entre la production globale d’utilités et leur consommation... (Voire, si on admet que salaires signifient principalement « consommation » et profits signifient « épargne / investissement », balance équitable entre la gestion du présent et la préparation du futur).

4 - Partager équitablement la rémunération du travail entre les diverses catégories de salariés

Si la rémunération des « dirigeants » des (grandes) entreprises » est souvent médiatisée pour ses excès, la ventilation de la rémunération du travail à l’intérieur de l’entreprise entre les différentes catégories d’intervenants est également un problème qui mérite examen dans le cadre d’une réflexion sur la RSE.

Notre vision nous amène à prôner que chaque gouvernance instaure, toujours par la négociation interne, sa « formule » de répartition de la rémunération du travail entre toutes les catégories d’employés.


A noter alors que le modèle de rémunération négocié et équitable proposé peut s’étendre au cas où plus de deux catégories d’intervenants internes et/ou externes sont identifiés, par exemple, dans le cas où les dirigeants constituent une troisième catégorie (2).

5 - Favoriser le partage équitable de la valeur ajoutée tout au long des « filières »

Les producteurs de « matières premières » sont nombreux à être menacés dans leur existence économique par des entreprises « aval » pratiquant des abus de « pouvoir » dus à leur positionnement de dominant dans les transactions commerciales avec leurs « fournisseurs ».

Nous pensons aux agriculteurs (notamment encore aujourd’hui aux producteurs de lait), aux pêcheurs, qui trop souvent sont victimes de telles situations… Aux centrales d’achat et autres mastodontes de la grande distribution de prendre davantage conscience de leur responsabilité sociale et de modifier des comportements qui mettent en péril des professions stratégiquement indispensables à bien des égards, notamment au plan national.

Face aux quotas aujourd’hui souvent nécessaires, de nouveaux modèles de ventilation de la valeur ajoutée par l’ensemble des filières sont donc à inventer pour permettre aux producteurs de matières premières de recouvrer dans tous les cas espoir et dignité.

Dans la continuité de l’application du modèle suggéré, et au nom de l’équité, les prix desdites matières premières seraient alors à indexer sur la totalité de la valeur ajoutée produite par l’ensemble de tous les intervenants « aval » de chaque filière concernée.

6 - Faire un bon choix social/sociétal des partenaires

Nous entendons par partenaires essentiellement et à nouveau les partenaires fournisseurs. Derrière le choix de ses fournisseurs se cache une très forte responsabilité sociétale pour chaque entreprise, particulièrement dans le contexte de la mondialisation des échanges.

Obnubilée par son souci de « profits » maxima (en réponse aux exigences toujours plus fortes de ses actionnaires, aujourd’hui seuls véritables gouvernants des entreprises !), l’entreprise a du mal à ne pas se délocaliser, à travailler avec des partenaires locaux, oubliant le coût écologique du transport des marchandises, oubliant qu’un partenariat avec une entreprise « socialement » et géographiquement proche répond toujours également mieux aux exigences d’une responsabilité sociétale bien comprise, tant au niveau local que régional et national.

Puisque le libre échangisme ne semble pouvoir tolérer l’intervention directe des Etats (ou en attendant que cela ne vienne !), d’autres pistes sont à envisager au nom de la RSE. Par exemple, s’appuyant sur ses vertus, mettant en exergue, après le coût des transports, la réduction des délais de livraison, la réduction des volumes de stocks, de leur coût de constitution, de gestion, la proximité doit être le principal argument pour un « bon choix » de partenaires….

De nombreuses entreprises commencent à modifier leur pratique du « libre échange » pour « revenir » dans ce sens

7 - Développer des «externalités»

Un emploi stable dans une entreprise bien en place, c’est pour un individu, pour une famille, confiance en l’avenir, faire des projets, « s’implanter », acheter une résidence…. Les générations précédentes ont vécu ou espéré cela ! Et un tel « ressenti » n’est pas prêt de disparaître… Sans cette perspective, il y a pour de nombreux jeunes d’abord frustration face aux aînés, difficulté à fonder un foyer… sans oublier les cas encore plus douloureux.

Matrice de tissu social, créatrice d’intégration, l’entreprise doit avoir conscience des très nombreuses externalités qu’elle peut engendrer… Et développer ces externalités peut « rapporter » plus que toutes les publicités du monde…

8 - Opter pour des stratégies de moyen et long terme et le respect de l’environnement

Après les points précédents qui sont à lire comme autant de pistes « pertinentes » en réponse à la crise sociale, ce dernier point rappelle les nombreuses recommandations et travaux en cours… dans le cadre de réflexions plus spécifiques au « développement durable ».

Si nous ne les reprenons pas dans ce bref article, nous gardons tout notre attachement à ce travail qui touche au plus près notre sensibilité face à la problématique écologique...


Selon notre vision, la responsabilité sociale de l’entreprise reste donc le fondement de la responsabilité sociétale de la micro comme de la macro économie.

Parmi les mesures les plus « envisageables » (rapidement !) on retiendra que les dispositions visant à fidéliser les actionnaires à leur(s) entreprise(s) sont « porteuses » de changements significatifs dans les stratégies d’entreprises pour aller dans le sens des responsabilités sociale et sociétale.

En effet, des actionnaires fidélisés, ce sont aussi (de facto) des actionnaires plus soucieux de responsabilité sociale, devenus plus enclins à la raison en matière de profits, plus responsables face aux problématiques de l’emploi, du long terme. Tenant compte de leur « poids » dans la gestion, dans les choix stratégiques des entreprises, ce sont, sans nul doute, de nouvelles gouvernances, plus enclines à la pratique d’un autre capitalisme, plus modéré, plus enclines au partage des richesses produites, plus respectueuses du patrimoine naturel…


Mais, on comprendra aussi que, refusant toute forme d’autodestruction, pour aller davantage dans le sens de la RSE, l’entreprise doit pouvoir s’appuyer sur des politiques, des dispositions nationales qui favorisent cette démarche. En même temps, une autre approche théorique de l’économie, un enseignement revisité des sciences de la (bonne) gestion, deviennent nécessaires. De même, au niveau mondial, des régulations à négocier puis à appliquer, sont également indispensables.

Alors, la responsabilité sociétale des entreprises pourra être considérée comme un maillon essentiel de la réponse aux besoins d’un monde ébranlé de toutes parts par des phénomènes, sociaux, sociétaux, et particulièrement de la réponse aux besoins d’une jeunesse de plus en plus souvent, à la fois, éduquée et frustrée.
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(1) Au début des années 80, Léon Wegnez écrivait dans « Le miracle japonais » et pour en mieux comprendre le ressort que la finalité première des entreprises japonaises… était sociale. C’est dire ce qu’était la RSE traditionnelle au pays du soleil levant !

(2) Voir le livre « Pour plus de solidarité entre le capital et le travail ou de nouvelles chances pour l’emploi » par R. Guillet paru chez l’Harmattan en 2004 (version livre) et en 2009 (version e-article) ainsi que, sur le même site, les articles complémentaires, notamment l’article « Quelques éléments sur la construction du modèle »

(3) Ce vocabulaire est « instructif » quant à la vision de la rémunération du travail !

Rémi Guillet, expert-partenaire CFO-news
guilletremi@yahoo.fr

Jeudi 10 Mars 2011




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