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Stelphia AM - Japon : de la déflation à l’hyperinflation ?

Le Trésor japonais pourrait ne plus trouver plus suffisamment d’investisseurs à un horizon de cinq ans, dans un contexte d’assèchement de l’épargne domestique. Seule une baisse du yen et une forte hausse des taux permettront bientôt d’attirer des investisseurs. Mais à quel prix pour l’économie et pour les comptes publics ?


La dégradation constante du ratio dette / PIB au Japon n’est pas nouvelle. Mais aussi considérable qu’il soit par son ampleur, ce déséquilibre n’a jusqu’à présent suscité qu’un intérêt poli de la part des investisseurs, durablement rassurés par l’absence de conséquence sur le niveau des taux à long terme. Mais voilà. L’importance de la crise économique et des plans de relance va accélérer ce phénomène dans des proportions préoccupantes. Une dérive qui commence à être prise au sérieux, puisque des économistes de grandes banques d’investissement commencent à s’alarmer de ses conséquences possibles. C’est notamment le cas de J.P. Morgan a récemment organisé une conférence téléphonique sur le thème : « le Japon a-t-il passé le point de non-retour?».

1. Bientôt une pénurie d’épargne domestique
Le moment se rapproche où l’Etat japonais ne sera plus en mesure de financer son déficit grâce à l’épargne domestique. Si cette incapacité n’est pas anticipée et prévenue, le Japon risquera d’aller soit vers le défaut, une hypothèse peu probable, soit vers l’hyperinflation, conséquence inéluctable de la monétisation de la dette qui serait alors nécessaire. L’équilibre actuel repose sur le fait que l’épargne domestique est suffisante pour couvrir la totalité des besoins d’emprunt de l’Etat, et que les investisseurs japonais acceptent de placer à long terme pratiquement sans rémunération. La dette est détenue à 93,6% par les investisseurs locaux. Mais, contrairement à une idée reçue, le taux d’épargne des ménages n’est plus élevé aujourd’hui. Pire, il diminue régulièrement du fait du vieillissement de la population. Autour de 20% en 1980, il devrait avoisiner 0% dès 2014. Les compagnies d’assurance-vie commercialisent d’ailleurs de moins en moins de contrats d’épargne nouveaux et versent de plus en plus de rentes.
A l’horizon de cinq ans, le Japon risque donc d’avoir besoin des investisseurs étrangers pour acheter les titres du Trésor. Mais ce n’est ni avec un yen au niveau actuel, ni avec des taux d’intérêt aussi bas qu’il rencontrera une demande. Un spirale baisse de la devise / hausse de l’inflation / hausse des taux pourrait alors se mettre en place, la banque centrale étant la seule contrepartie possible jusqu’à ce que le système s’équilibre.

2. Un ratio dette / PIB de 300% en 2019 ?
L’OCDE estime à 60% le ratio dette / PIB du pays en 1980. Il était de 170% en 2008. D’autres sources le situent à un niveau un peu plus élevé. En tout cas, la récession de 2009 accompagnée d’une légère baisse des prix combinée à un déficit budgétaire important va lui faire faire un nouveau bond qui sera de l’ordre de 20%. La barre des 200% sera dépassée rapidement. Sur la pente actuelle, le ratio serait de 300% en 2019. Les causes de cette dégradation se trouvent dans une croissance nominale proche de 0% depuis plus de quinze ans et dans la hausse des dépenses liées à la protection sociale. L’arrivée au pouvoir du parti de centre gauche DPJ n’est pas susceptible d’inverser cette dernière tendance : le DPJ estime que le parti libéral LDP a trop peu fait dans le domaine de la protection sociale.

3. Vers une baisse du yen, une hausse des taux et un retour de… l’inflation
A un horizon de cinq ans, le Trésor japonais ne trouvera plus suffisamment d’investisseurs. La banque centrale sera alors amenée à monétiser la dette publique dans des proportions de plus en plus importantes, provoquant une baisse du yen susceptible de susciter l’intérêt des investisseurs étrangers. Mais ceux-ci n’investiront pas sans une hausse des taux obligataires. Actuellement, grâce aux taux très bas, le service de la dette ne représente que 2,6% du PIB (un ratio inférieur à celui des USA ou de la zone euro). Mais si les taux venaient à monter de 2% pendant une période de dix ans, la totalité des recettes fiscales seraient absorbées par le service de la dette. On voit là que la perspective de long terme va être très difficile à gérer. La faiblesse de la démographie et l’absence d’immigration constituent un facteur aggravant. Le Japon est dès aujourd’hui dans une spirale de la dette dont la sortie va être dans tous les cas difficile : baisse de la devise, hausse des taux et inflation nettement plus élevée seront au rendez-vous.

4. Quelles solutions ?
Dans la gamme des réponses classiques à ce type de situation, il n’existe pas de mesure qui puisse se révéler efficace. La réduction des dépenses publiques n’est pas possible dans la situation actuelle. Une hausse de la fiscalité, par l’intermédiaire d’une hausse de la TVA par exemple, aurait un impact négatif sur une consommation déjà faible. L’absence de croissance nominale rend en fait toute tentative d’ajustement inopérante. La crise de la dette japonaise apparaissant inévitable, l’attitude la plus raisonnable pour les autorités serait d’accepter qu’il faut l’anticiper de façon qu’elle ne devienne pas totalement ingérable. Le Japon doit comprendre que bien que son économie soit très compétitive, ce que traduit la force du yen, elle est entrée dans un processus d’implosion lente. La valeur de la monnaie doit traduire cette dégradation qui est un phénomène très profond. Cela est difficile : la fierté nationale est en jeu. Par ailleurs, la baisse de la devise sera accompagnée d’une hausse des taux qui pèsera sur les comptes publics. Mais la situation sera pire si rien n’est fait.
Profiter de toute baisse de la devise pour augmenter les salaires dans les sociétés exportatrices de façon à faire remonter graduellement l’inflation et faciliter une baisse structurelle progressive du yen est une piste à explorer. Les autorités japonaises sont les premières concernées. Il nous semble que le G 20 doit commencer à réfléchir à ce type de problème. Après avoir montré une capacité de réaction remarquable dans la crise de 2008, il doit montrer une capacité d’anticipation et traiter ce problème de dette publique qui concerne, de toute façon, tous les grands Etats. L’hypothèse du défaut étant peu probable, l’absence de réponse concrète dans les prochaines années ferait passer le Japon d’une situation de croissance nominale structurellement proche de 0% à une période d’hyperinflation, la devise risquant de s’effondrer en quelques mois.

A propos de Stelphia Asset Management : Stelphia Asset Management est une société de gestion indépendante française notamment spécialisée sur les marchés de taux et d’actions d’Europe convergente et émergente. Son équipe fonde sa méthodologie autour d’une vision analytique de la construction européenne et de la globalisation de l’économie mondiale. Société indépendante détenue majoritairement par ses fondateurs, Stelphia Asset Management compte Ofi Asset Management et La Banque Postale Asset Management à son capital. Les encours gérés s’élèvent début octobre 2009 à 215 millions d’euros.
www.stelphia.com

Jeudi 19 Novembre 2009




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