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Pérou : le point de vue du Ducroire

En comparaison avec son passé parfois mouvementé, le Pérou connaît pour l’instant une phase de relative stabilité à la fois politique et macroéconomique. La politique économique prudente conduit à la plus basse inflation d’Amérique Latine et à une dette publique négligeable. En outre, exportateur d’importants volumes de matières premières minérales, le Pérou a pleinement profité de la forte croissance mondiale qui a, jusqu’il y a peu, poussé les prix des matières premières vers des sommets.


De cette manière, le poids de la dette extérieure péruvienne s’est fortement allégé, alors que les réserves en devises conservent un niveau très confortable. Le pays prend également des mesures concrètes pour diminuer la dollarisation de son système bancaire et pour le remboursement de sa dette envers le Club de Paris. A présent, le Pérou doit mettre à profit ces acquis pour lutter contre la pauvreté, le chômage et les inégalités, soit les problèmes les plus persistants contre lesquels le pays doit se battre. Cependant, à court terme, le Pérou doit affronter la crise économique mondiale qui s’accompagne d’une très forte contraction des prix de matières premières, dont le cuivre, et pourrait réduire l’important volume d’investissements directs étrangers (IDE) dans les secteurs miniers, affectant ainsi la réalisation des objectifs de politique économique des autorités péruviennes.

Entretemps, plus tôt cette année, le Pérou a rejoint le niveau d’ « investment grade ». Concernant le risque politique lié aux transactions courantes, la SA Ducroire classe le Pérou en catégorie 1, soit la meilleure classification sur une échelle de 1 à 7. Pour ce qui est du risque commercial, le Pérou est classé en catégorie B (échelle de A à C, A étant le risque le plus faible).

Lors du discours sur l’état de la nation en 2007, le président Alan Garcia a présenté ses excuses aux populations pauvres du pays. Regrettant de n’avoir pu réaliser ses promesses électorales, il a promis de mettre tout en oeuvre pour rattraper ce retard lors des quatre dernières années de son gouvernement. Cette étonnante et humble attitude s’inscrit dans le contexte socio-politique tendu qui s’est installé, deux ans après le scrutin qui a porté Garcia pour la seconde fois à la tête du Pérou, après un premier passage en 1985-90. Alors que sa popularité est en chute libre, le chef de l’Etat a dû faire face à de larges mouvements de grèves et de manifestations syndicales. Cette agitation, qui a même entraîné la mobilisation de l’armée, résulte en grande partie du sentiment des classes les plus pauvres de ne pas récolter les fruits de la croissance exceptionnelle que connaît actuellement le pays andin. En effet, les sommets atteints par les prix des matières premières ces dernières années, poussés notamment par la forte demande chinoise, n’ont pas encore provoqué une baisse de la pauvreté, qui touche toujours 50% de la population.

Une population divisée, propice au radicalisme politique
Cette situation rappelle la présidence chaotique d’Alejandro Toledo, qui avait dû composer avec cinq années de records d’impopularité et de mécontentement populaire. Lorsqu’il lui succède en juin 2006, Alan Garcia, représentant la formation de centre-gauche APRA, est
accueilli avec soulagement par les investisseurs. Il vient en effet de battre, au second tour, le nationaliste radical Ollanta Humala. La popularité de ce dernier, soutenu par le président vénézuélien Hugo Chávez, a, depuis lors, fortement diminué, suite notamment à la scission de sa formation politique au congrès. Cependant, l’ancien militaire a profité des manifestations de juillet 2007 pour se replacer à la tête des mouvements contestataires.

Humala peut s’appuyer sur les populations du sud du pays, où se concentre la pauvreté. Le Pérou se caractérise en effet par sa bipolarisation, à la fois sociale, géographique et ethnique. Celle-ci favorise la contestation et rend urgentes les réformes structurelles afin de distribuer plus équitablement les revenus de la croissance, et éviter ainsi une aggravation de la protestation et une hausse de la popularité de l’opposition radicale. En marge de celle-ci, survit d’ailleurs toujours un résidu du Sentier lumineux, groupe maoïste dont les actions violentes ont marqué les années 80 et ont timidement repris depuis fin 2005.

Une autre ombre continue à planer sur le Pérou : celle de l’ancien président autoritaire Alberto Fujimori, au pouvoir de 1990 à 2000. Toujours populaire auprès d’une frange de la population, il est actuellement jugé pour les accusations d’atteinte aux droits de l’homme qui pèsent contre lui. Ce procès met le gouvernement Garcia dans une position délicate, puisque celui-ci s’appuie sur une coalition opportuniste, dans laquelle les supporters de Fujimori sont indispensables. Ainsi, c’est avec le soutien de ces parlementaires affiliés à l’ancien président d’origine japonaise, que le gouvernement a par exemple fait voter en 2007 une loi controversée accroissant le contrôle de l’Etat sur les organisations non-gouvernementales.

Du populisme d’extrême gauche à l’orthodoxie économique
Toujours relativement fragile sur le plan démocratique, le Pérou bénéficie par contre désormais de la stabilité macroéconomique. En effet, les présidences Fujimori et Toledo, de 1990 à 2006, se sont distinguées par leur austérité économique, ainsi que par d’importantes réformes structurelles. Depuis son accession au pouvoir, Garcia a surpris positivement les marchés financiers, en reconnaissant les erreurs commises lors de son premier passage à la présidence. Celui-ci était, il est vrai, resté dans les esprits pour une corruption généralisée et des politiques économiques désastreuses ayant mené à l’hyperinflation. Abandonnant ses idéologies d’extrême gauche, il maintient les politiques économiques austères de ses prédécesseurs et entretient un environnement favorable aux investisseurs. De plus, Garcia s’est entouré d’une équipe de technocrates business-friendly, et notamment d’un ministre de l’économie et des finances très apprécié des marchés financiers. Il cherche également ostensiblement à se rapprocher des présidents brésiliens, chiliens et colombiens, reconnus pour leur orthodoxie économique.

Garcia a en outre soutenu la conclusion d’un accord avec le Fond monétaire international, afin de rassurer les investisseurs jusqu’en 2009. D’autre part, le président a soutenu l’accord de libre-échange avec les Etats-Unis, qui a enfin été ratifié par le congrès américain en décembre 2007. Désirant devenir un des acteurs clés de la globalisation, le gouvernement a également entamé des discussions sur un accord commercial avec le Canada et le Mexique, ainsi que la Chine. L’aboutissement de ces démarches permettra d’optimiser les avantages de la position géographique idéale du Pérou, ouvert sur le Pacifique et le continent asiatique. Membre de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (APEC), le Pérou compte différents ports d’envergure dont le plus important est Callao, à l’ouest de Lima. De plus, il existe différentes zones d’exportation, où les investisseurs seront, sous certaines conditions, exempts de toute taxation. On en trouve ainsi une à Paita (nord), mais aussi à Ilo, Matarani ou Tacna (sud).

Les investisseurs belges attirés par cette situation pourront de plus bénéficier d’un traitement égal à celui des nationaux. En effet, depuis le début des années 90, une série de réformes a été introduite afin d’ouvrir tous les secteurs de l’économie aux investissements privés, qu’ils soient domestiques ou non. Ceci est reflété par l’indicateur Doing business de la Banque mondiale, qui classe aujourd’hui le Pérou 62ème sur 181 pays, seulement devancé en Amérique du Sud par le Chili. Dans les chiffres, les investissements directs étrangers ont augmenté sensiblement ces dernières années, et représentaient presque 5% du PIB en 2007.

Par contre, le système juridique reste très inefficace et corrompu, manquant d’indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif et pouvant donc poser problème pour le règlement d’un éventuel contentieux. Doing Business montre cependant qu’un contentieux de paiement est réglé en 468 jours en moyenne au Pérou, contre 699 pour l’Amérique latine et 443 pours les pays de l’OCDE. En revanche, la procédure coûtera en moyenne 36% du montant contesté (contre 31% en Amérique latine et 18% dans les pays de l’OCDE). Dans le classement 2007 de Transparency international, qui évalue le degré de corruption, le Pérou est classé 72ème sur 180 pays, soit exactement au même niveau que les puissances émergentes que sont le Mexique, le Brésil, la Chine et l’Inde.

Afin d’aborder le marché péruvien, il est conseillé d’engager un représentant local, qui pourra rechercher les opportunités sur place et participer aux opérations commerciales. Un expert juridique local est également préconisé, afin de composer avec les pratiques du marché informel, ainsi qu’avec la bureaucratie. Enfin, avant de répondre à une offre publique du gouvernement péruvien, il est sage de vérifier que celle-ci respecte toutes les dispositions légales. La majorité des opportunités se trouvent à Lima, où vit 30% de la population, mais des villes telles Arequipa, Chiclayo et Trujillo sont également des centres économiques importants. Il est important de noter que le salaire minimum est fixé à 150 USD au Pérou, soit un niveau significativement plus faible que dans tous les autres pays d’Amérique du Sud, à l’exception de la Bolivie et de l’Uruguay.

Le boom des exportations s’aplanit sur fond de prix miniers moins élevés...
La bonne conjoncture mondiale qui a précédé la crise économique mondiale actuelle a entraîné une hausse de la demande pour les matières premières, et donc poussé leurs cours vers des sommets. Le Pérou pouvant compter sur d’abondantes et diverses ressources minières, ses recettes d’exportations ont progressé à une moyenne annuelle de 34% en 2004-06 et elles continuent à progresser à un rythme annuel proche de 20%. Ceci résulte notamment du prix élevé du cuivre, ayant atteint il y a peu des niveaux records, devenu la première source de devises, mais aussi de la hausse du volume d’exportations (+9% en moyenne annuelle en 2004-07). Toutefois, le compte courant de la balance des paiements devrait à nouveau retomber en déficit dès cette année, après trois ans en positif malgré l’augmentation parallèle des importations. Cette évolution négative reflète l’effet du prix élevé du pétrole, qui représente 20% des importations totales de biens, la hausse des importations de biens en capitaux et, bien sûr, la chute des prix miniers.

Le Pérou bénéficie pleinement des importants investissements réalisés dans le passé, dont témoigne le pic de 9% atteint par le taux de croissance en 2007 et la prévision d’un niveau proche de 7% pour 2008. Pourtant, l’inflation péruvienne reste l’une des plus faibles d’Amérique latine : elle devrait s’établir autour de 2% dans les années à venir, même si on prévoit 5,8% pour cette année. L’appréciation de la monnaie locale, poussée à la hausse par les exportations croissantes, favorise cette faible accélération des prix, de même que l’efficace politique monétaire d’inflation targeting. L’austérité caractérise également la politique budgétaire puisqu’un surplus exceptionnel de plus de 2% du PIB est actuellement enregistré annuellement. Un surplus un peu plus limité devrait être maintenu dans les années à venir. Ceci se reflète par une dette publique qui passera en 2008 sous les 30% du PIB, avant de rapidement se diriger vers les 15%, tandis que les paiements d’intérêt représentent moins de 10% des revenus du gouvernement.

L’ensemble des ratios financiers bénéficie de la bonne santé des exportations péruviennes et les niveaux atteints sont de plus en plus confortables. Ainsi, fin 2007, la dette extérieure représentait moins de 100% des recettes en devises et de 30% du PIB, alors que fin 2003, ces ratios étaient encore proches respectivement de 250 et 50%. Le service de la dette extérieure connaît une évolution similaire, puisqu’il ne s’élevait plus qu’à 12% des recettes en devises en 2007, contre plus de 30% jusque fin 2002.

Dans ce contexte, le risque qu’un client péruvien ne puisse avoir accès aux devises nécessaires au remboursement d’une opération d’importation diminue donc considérablement.

Et ce, d’autant plus que la liquidité est également satisfaisante puisque, fin 2007, la dette à court terme se limitait à 17% des recettes d’exportations. De plus, elle n’atteint même pas un cinquième des réserves en devises, qui elles-mêmes, à leur niveau de mai 2008, permettent d’affronter presque 10 mois d’importations. Par ailleurs, les réserves de la Banque centrale permettent de couvrir entièrement les dépôts en dollars auprès des banques péruviennes (12 mia USD en mars 2007).

Depuis quelques années, les ratios de dollarisation sont en forte baisse, grâce notamment à la politique d’inflation targeting mise en place depuis 2002. L’efficacité de cette dernière a accru la confiance des résidents envers la monnaie locale pour leurs dépôts bancaires. Cependant, le système bancaire reste encore fortement dollarisé, puisque presque 50% des dépôts totaux sont en monnaie étrangère, alors que pour les crédits, la proportion est proche de 60%. Cette forte dollarisation est utilisée comme prétexte par la banque centrale pour intervenir sur le marché des changes et empêcher ainsi une trop importante appréciation de la monnaie locale. Le danger réside dans un éventuel choc extérieur négatif qui entraînerait une dépréciation brutale du taux de change via une chute des exportations. Cette dépréciation affecterait en effet les débiteurs de crédits en dollars qui ne disposent que de revenus en monnaie locale.

Une structure économique diversifiée
A moyen terme, la croissance devrait se maintenir au-delà des 5%. Le potentiel de l’économie est favorisé par un taux d’épargne domestique à presque 30% du PIB, alors que le taux d’investissement excède lui les 20% depuis 2006. Le Pérou ne devrait de plus pas trop souffrir d’un cours moins élevé du cuivre, qui lui fournit 20% de ses recettes en devises, soit une proportion qui ne rend pas l’économie excessivement dépendante de ce métal. D’une manière générale, et même si les produits manufacturés ne représentent que 14% des exportations de biens, la structure des exportations du Pérou est très diversifiée, ce qui diminue sa vulnérabilité à tout choc négatif sur l’une de ses ressources naturelles.

Outre le cuivre, le Pérou exporte notamment en abondance de l’or, du zinc et du pétrole, et peut également compter sur deux autres importantes sources de devises, avec les transferts des expatriés et le tourisme. Plus d’un quart des exportations péruviennes ont pour destination les Etats-Unis, suivis par la Chine, le Canada, le Chili et le Japon, alors que la Suisse est le premier importateur européen. Du côté des fournisseurs, le Pérou importe 20% des ses marchandises des Etats-Unis et 45% des pays sud-américains.

Même si elles sont en légère hausse, les exportations belges restent limitées à destination du Pérou et ne s’élevaient qu’à 54 M EUR en 2006. Ce pays ne représente que le 6ème partenaire commercial de la Belgique dans le continent sud-américain, alors qu’il n’est que le 90ème importateur de produits belges et le 70ème fournisseur. La Belgique y exporte majoritairement des produits de l’industrie chimique, ainsi que des biens d’équipement. Des opportunités existent toutefois également dans des secteurs tels que le matériel de transport, les matières plastiques et textiles, ainsi que les pâtes de bois.

Remboursement anticipé de la dette péruvienne
Les exportateurs belges intéressés par le marché péruvien seront rassurés d’apprendre que l’expérience de paiement est très bonne, aussi bien avec les débiteurs privés que publics. Le gouvernement respecte ses accords de rééchelonnement de la dette et profite même de la conjoncture favorable pour régler définitivement sa situation vis-à-vis des membres du Club de Paris, dont la Belgique, à qui l’Etat péruvien devrait bientôt rembourser anticipativement l’entièreté de sa dette.

La probabilité de non-paiement d’un débiteur péruvien n’est cependant pas nulle. Elle est particulièrement à prendre en compte dans le contexte de crise financière mondiale et de l’aversion accrue des investisseurs envers les marchés émergents. Le Pérou est relativement dépendant du marché US et pourrait souffrir davantage de la récession économique aux Etats-Unis. Vu les problèmes que rencontre actuellement le président Garcia, les prochains mois seront également décisifs afin de tester la solidité de son engagement à maintenir des politiques économiques austères. Si, en cas de choc extérieur négatif, conjugué à une poursuite de la chute de sa popularité, il retournait vers les politiques expansionnistes et populistes passées, la méfiance des investisseurs et l’instabilité macroéconomique pourraient faire leur réapparition.

Prenant conscience de la persistance d’un risque que le débiteur péruvien ne pourra ou ne voudra honorer ses obligations, l’exportateur belge pourra s’appuyer sur la SA Ducroire. L’assureur crédit offre en effet une couverture en open account pour le Pérou, c’est à dire sans exigence de garantie bancaire, contre le risque de non-paiement. La quotité garantie s’élève à 95% en cas de sinistre né d’une situation de force majeure (pénurie de devise, catastrophe naturelle, guerre,...), tandis qu’elle se monte à 90% pour les sinistres dus à un problème typiquement commercial (faillite...).
En bref...

Alors que le Pérou s’est vu attribué l’investment grade par deux des trois principales agences de notation en 2008, la SA Ducroire classe le Pérou en catégorie 1 pour le risque politique lié aux transactions courantes, soit la meilleure classification sur une échelle de 1 à 7. En ce qui concerne le risque commercial, le Pérou est classé en catégorie B (échelle de A à C, A étant le risque le plus faible).

Par rapport à un passé parfois agité, le Pérou connaît actuellement une phase de stabilité, à la fois politique et macroéconomique. En effet, le gouvernement du président Garcia maintient des politiques économiques prudentes, reflétées par une inflation plutôt sous contrôle et un surplus budgétaire. De plus, l’économie péruvienne, qui exporte abondamment divers produits miniers, profite pleinement de la virulente croissance des puissances émergentes, malgré un ralentissement attendu dans les mois à venir. En effet, celle-ci entraîne une hausse du volume des exportations, même si les prix mondiaux des matières premières sont brutalement retombés de leurs sommets. Le Pérou voit le poids de sa dette extérieure devenir de plus en plus soutenable, alors que les réserves en devises conservent un niveau très confortable. Agissant également concrètement pour diminuer la dollarisation de son système bancaire et rembourser anticipativement sa dette envers le Club de Paris, le Pérou doit maintenant mettre à profit son juteux secteur minier qui, s’il est conjugué à l’orthodoxie économique, lui permettra de lutter contre ses problèmes les plus tenaces : la pauvreté, le chômage et les inégalités.

Raphaël Cecchi
Country Risk Analist

www.ducroire.fr

Lundi 17 Novembre 2008




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