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Nouvelle confirmation de la libre répartition de l'impôt sur les sociétés entre sociétés intégrées

CAA Versailles 14 juin 2011 n° 09VE03831, Sté Kingfisher international France Limited


Dans un arrêt du 14 juin 2011[1], la Cour administrative d'appel de Versailles a rendu une nouvelle décision confirmant la liberté de répartition de l'impôt sur les sociétés au sein de groupes fiscaux intégrés.

En l'espèce, l'établissement stable de la société Kingfisher international France Limited (ci-après la Sté Kingfisher) avait conclu avec ses filiales une convention fiscale dite de type IV aux termes de laquelle l'ensemble de la charge et de l'économie d'impôt au sein du groupe était supporté par, ou bénéficiait intégralement à, la société tête de groupe. Il y était en outre prévu que lors de leur sortie du groupe, les filiales seraient indemnisées de la perte du droit à report des déficits générés pendant l'intégration et non utilisés par elles.

Lors de la cessation du groupe intervenue en 2003, la Sté Kingfisher a appliqué l'instruction administrative[2] selon laquelle "lorsque l'impôt mis à la charge de chacune des sociétés du groupe est d'un montant différent de celui [qu'elle aurait dû verser si elle n'était pas membre du groupe], cette différence est considérée comme une subvention" puis a réclamé les sommes qu'elle avait versées dans ce cadre. Maintenant sa doctrine, l'administration fiscale a considéré que la mise en œuvre de cette convention avait généré une subvention indirecte devenant imposable au moment de la cessation du groupe.

Dans la lignée de l'arrêt Wolseley Centers France[3] dans lequel la Haute Assemblée a posé le principe de la libre répartition de la charge d'impôt au sein d'un groupe fiscal intégré, la Cour rappelle ici que les modalités de répartition de l'impôt sur les sociétés au sein d'un groupe intégré n'étant pas visées par la loi, aucune disposition n'impose que chaque filiale acquitte la quote-part de l'impôt qui lui incomberait en l'absence d'intégration, à la condition que cette répartition conventionnelle de l'impôt ne porte pas atteinte à l'intérêt social propre de chaque société ainsi qu' aux droits de leurs associés.

Pour juger qu'une convention de type IV n'induisait aucune distorsion qui serait constitutive d'un acte anormal de gestion, les juges reprennent cette analyse, en énonçant que si la Sté Kingfisher pouvait être conduite à supporter une imposition supérieure à celle qu'elle aurait supportée en l'absence d'intégration, cette situation n'était que la conséquence de sa décision d'opter pour ce régime qui la rendait seule redevable de l'impôt en application de la loi fiscale. En outre, la cour précise que la société tête de groupe pouvait bénéficier de l'imputation des déficits de ses filiales sur le résultat d'ensemble. Enfin, les juges indiquent que l'absence de refacturation de l'impôt avait eu pour effet de valoriser les participations de la Sté Kingfisher dans ces filiales à hauteur de son pourcentage de détention. Il convient d'ailleurs de préciser qu'en pratique, les participations minoritaires sont extrêmement réduites lorsque ce type de convention est mis en œuvre, souvent pour des raisons liées à des dispositions légales étrangères.

La Cour se prononce également sur la condition liée au respect de l'intérêt social des filiales. En l'espèce, elle juge que les droits des associés ou actionnaires minoritaires n'étaient pas méconnus par les stipulations de la convention, dans la mesure où les filiales n'étaient jamais conduites à supporter une imposition supérieure à celle qu'elles auraient supportée en l'absence d'intégration et que la convention prévoyait, en outre, une indemnisation pour compenser l'éventuelle perte du droit à report de leurs déficits.

En conséquence, les filiales déficitaires étaient dans la même situation qu'en l'absence d'intégration et les filiales bénéficiaires étaient, quant à elles, également dispensées de verser de l'impôt, leur appartenance au groupe ne les lésant donc pas. Il convient de souligner qu'il aurait toutefois pu en être différemment en l'absence de réallocation, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

L'instruction administrative[4] dont se prévalait l'administration et qui prévoyait notamment que "la prise en charge par la société mère de l'impôt dû par les sociétés du groupe fait naître une créance de la société sur ces sociétés à hauteur de l'impôt que chacune d'elle aurait dû verser si elle n'était pas membre du groupe" est ainsi expressément écartée par la Cour en ce qu'elle ajoute à la loi.

Dans cet arrêt, les juges poursuivent ainsi la validation des clauses de répartition de l'impôt prévues dans les modèles de conventions d'intégration fiscale qui ne sont pas ceux préconisés par la doctrine administrative, confirmant le principe général de libre répartition de la charge d'impôt du groupe entre les sociétés qui le composent. Le Ministre ayant décidé de se pourvoir en cassation à l'encontre de cet arrêt - les montants en jeu (plus de 137 M€ en base) pouvant justifier cette persévérance - la Haute Assemblée est donc appelée à continuer son édifice jurisprudentiel relatif aux questions de répartition d'impôt au sein des groupes intégrés.

[1] CAA Versailles, 3è ch., 14 juin 2011, n° 09VE03831, Sté Kingfisher international France Limited confirmant la décision du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 2è ch., 30 juin 2009 n°0401884.
[2] 4 H-13-92 du 10 août 1992 n°131 à 134.
[3] CE 12 mars 2010 n° 328424, Wolseley Centers France dans le cadre d'un modèle de convention prévoyant une répartition de l'impôt au prorata des résultats individuels des filiales.
[4] 4 H-9-88 du 9 mai 1988.

Ariane Calloud
Baker & McKenzie SCP
1 rue Paul Baudry
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Mercredi 2 Novembre 2011




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