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Nouveau rôle de la RSE au Moyen-Orient (2)

Un besoin urgent de faire croitre l'emploi stimule une tendance novatrice en matière de RSE et d'initiatives commerciales nobles.


Laurent Leloup
Laurent Leloup
Première partie : www.finyear.com/Nouveau-role-de-la-RSE-au-Moyen-Orient-1_a28550.html

La vague des initiatives d'entreprise soutenant la création d'emplois dans la région MENA est encore nouvelle et n'a pas définitivement donné des résultats à long terme. Mais la hausse de l'activité et les preuves concrètes nous convainquent que la tendance est significative et pourrait s'avérer cruciale pour le développement économique de la région et pour les capacités de création d'emplois.

Il existe deux domaines dans lesquels les entreprises privées ont déjà engagé de grands mouvements pour nourrir l'écosystème entrepreneurial et promouvoir la création de PME : l'éducation et le réseautage, et le financement.

L'éducation et le réseautage

L'éducation est une vaste catégorie qui englobe tout : d'inculquer la culture financière de base, en passant par enseigner la théorie et les pratiques commerciales, jusqu'à fournir une formation pratique et des conseils de mentors avec des expertises sur le business et les start-up.
La base de cette pyramide de l'éducation est d'enseigner les concepts fondamentaux sur le budget et l'investissement. SEDCO Holding, une société privée de gestion de fortune basée en Arabie Saoudite, et qui pratique la RSE depuis 2006, a menée cette année une enquête nationale auprès de 1.000 jeunes saoudiens, le segment démographique qui représente 40% de la population, afin d'évaluer leurs habitudes dans la gestion des dépenses, l'épargne et l'investissement. Selon l'enquête, seulement 11% d'entre eux ont gardé la trace de leurs dépenses, et 80% n'ont pas de budget. Toutefois, 90% ont déclaré qu'ils souhaitaient augmenter leurs connaissances financières.

En réponse, la société a lancé son programme de publications financières, appelé Riyali, en partenariat avec le ministère saoudien du Travail et de "Operation Hope", une organisation internationale sans but lucratif basée aux États-Unis. En travaillant avec les organismes du secteur public et les universités locales pour augmenter le niveau, Riyali vise à atteindre des dizaines de milliers d'étudiants au cours des prochaines années. Si les jeunes "n'ont pas aujourd'hui les bases de la finance ils vont avoir beaucoup de difficultés quand ils entreront demain sur le marché du travail", a noté Amr Banaja, directeur du programme Riyali et vice-président de la communication et du marketing chez SEDCO.

Un autre exemple vient de "Abdul Latif Jameel Group" en Arabie Saoudite, qui a créé les "Abdul Latif Jameel Community Initiatives" ( ALJCI) en 2003. En matière de RSE, ALJCI se concentre fortement sur la création d'emplois. Son programme "Bab Rizq Jameel" (BRJ), ou “The Beautiful Gateway to Prosperity”, se concentre sur l'identification des possibilités d'emploi, l'acquisition des compétences et la formation aux personnes, ainsi que sur l'octroi de prêts (microfinance) pour de nouveaux projets d'entreprise. À ce jour, BRJ a créé des centaines de milliers d'emplois, soit près de 50.000 en 2011 et plus de 58 000 en 2012, pour les hommes et les femmes d'Arabie saoudite et d'autres pays de la région MENA, dont le Maroc, la Syrie et l'Egypte.

Plusieurs grandes entreprises intensifient la délivrance d'informations et d'éducation sur les concepts d'affaires plus complexes. Par exemple, Emirates Integrated Telecommunications Company a lancé la plate-forme Q&A Ejaba.me en 2013. Le site offre aux entrepreneurs des réponses d'experts sur des sujets tels que la gestion, les services juridiques, le financement et les droits de propriété intellectuelle. Conçu par l'entrepreneur français Joanna Truffaut, Ejaba.me est destiné à donner aux entrepreneurs l'accès à des conseils abordables à un moment dans leur développement où les fonds sont rares. Le site facture à la réponse : 20USD pour des réponses courtes et 30USD pour les plus longues. Il envisage également d'offrir des forfaits d'abonnement mensuels à moindre coût pour les grands utilisateurs.

D'autres entreprises de la région offrent plus de formation pratique et de mentorat aux entrepreneurs dans des domaines aussi variés que les télécommunications et les opérations maritimes. Intigral, une société de médias numériques basée à Dubaï, joint-venture entre Saudi Telecom Company (STC) et All Asia Networks (ASTRO), a lancé un accélérateur nommé Afkar.me pour soutenir le démarrage de produits et services numériques. Les start-ups travaillent à partir des bureaux de Intigral, soit à Dubaï ou soit à Riyad, pendant trois mois, pour développer leurs idées avec l'aide de l'expertise de l'agence et d'un réseau de mentors. Afkar.me a créé des partenariats régionaux avec Astrolabs, ArabNet, the Online Project, le cabinet conseil Oliver Wyman, le cabinet de relations publiques Ketchum Raad, et les programmes Wamda. Ces partenaires offrent du mentorat, des conseils juridiques, le développement de produits, la conception, le marketing et les relations publiques, et l'appui au développement de l'entreprise. L'objectif est, pour les start-up, de créer des produits viables que Afkar.me peut connecter directement aux opportunités télécom en Arabie Saoudite, en Afrique et en Asie.

Un autre nouvel accélérateur parrainé par l'entreprise est Turn8, un programme d'un an soutenu par DP World, l'un des plus grands opérateurs de terminaux maritimes dans le monde, et qui est détenu par le gouvernement de Dubaï. Turn8 identifie les candidats à l'accélérateur au cours d'une série mondiale de conférences, incube ces start-up pendant plusieurs mois, puis les place dans un road show. Étant donné le profil du parrain de l'accélérateur, il n'est pas surprenant que les start-up se concentrent principalement sur des secteurs tels que l'exploitation des ports maritimes, y compris le transport, la logistique, l'environnement, la santé et la sécurité, et les voyages.

Comme beaucoup d'autres initiatives, Turn8 n'est pas un programme altruiste. Il profite aux deux parties. "Nous avons réalisé que le changement s'effectue si vite autour de nous que nous devons en faire partie", a déclaré Yousif Al Mutawa, directeur de l'information de DP World, selon un article paru dans Wamda, un site Web consacré aux actualités de la petite entreprise et de l'esprit d'entreprise dans la région MENA. "C'est une grande mission pour les dirigeants de favoriser l'écosystème entrepreneurial aux Émirats Arabes Unis."

L'élan, derrière ces initiatives en matière de RSE et de nouveaux modèles d'affaires, ne vient pas seulement des entreprises locales basées au Moyen-Orient. Certaines multinationales bien connues placent tout leur poids derrière ce mouvement. Google, par exemple, appuie la Bibliothèque Giza pour les entrepreneurs, un espace communautaire dans Giza, banlieue du Caire, conçu pour offrir des tests, du soutien et de la formation pour les jeunes pousses qui mettent l'accent sur ​​la technologie Web.

La Bibliothèque de Giza offrira un ensemble de solutions que les start-ups pourront utiliser pour tester leurs produits et leurs services. Elle accueillera également des groupes de "meet-up", des séances de formation et des cours sur des sujets tels que le développement technique et la conception, la planification et la gestion d'entreprise, et le développement de modèles d'affaires (business model). L'espace de travail communautaire va parrainer des conférences et des séances de mentorat avec des experts de l'industrie et fournir des programmes ciblés pour des marchés verticaux spécifiques, y compris les applications mobiles, le e- commerce, la santé, l'éducation et les jeux.

«La Bibliothèque de Giza va générer des idées, des emplois, et de l'énergie pour développer l'énergie et le potentiel inexploités de la jeunesse égyptienne", a déclaré Wael Fakharany, directeur régional de Google en Egypte et en Afrique du Nord, dans un communiqué publié par Wamda.

Création de possibilités de financement

Au-delà de l'éducation et de la formation, certaines entreprises établies commencent à fournir plus de soutien d'investissement aux PME. Fin 2012, dans un discours au Global Entrepreneurship Summit à Dubaï, Fadi Ghandour, fondateur et PDG de Aramex, a déclaré que les PME sont confrontées à de graves obstacles lorsqu'elles tentent d'accéder au marché bancaire, y compris pour les taux d'intérêt élevés et les demandes de garanties. Selon le rapport de 2012 de la Banque mondiale sur les PME et la création d'emplois dans le monde arabe, seulement 20% des PME ont un prêt ou une ligne de crédit, et les prêts aux PME comptent pour seulement 8% du total des prêts consentis dans le monde arabe, le ratio le plus faible à l'échelle mondiale.

Les mesures proposées par Ghandour pour les entreprises comprennent :
- l'établissement de réseaux d'investisseurs (angels) par ville, par pays, et par secteur,
- l'investissement et le soutien des fonds de capital-risque, des fonds de private equity et d'autres outils d'investissement,
- les partenariats avec des banques pour développer des relations favorable aux PME,
- et l'investissement dans des fonds de micro-entreprises et des institutions de microfinance.
Certaines de ces activités seront, idéalement, à but lucratif, mais la mission de base est la création et le maintien d'un environnement régionale favorable dans lequel l'esprit d'entreprise peut prospérer.

Dans le meêm esprit, les "Abdul Latif Jameel Community Initiatives" se sont engagés à soutenir le "MIT Arab Business Plan Competition" pour les cinq prochaines années afin d'assurer la viabilité de l'initiative. Le concours a reçu 1.852 demandes de 13 pays arabes. Elle exige des entrepreneurs de travailler en équipe et à présenter leurs idées d'affaires à certains des plus grands décideurs du Moyen-Orient. Les équipes finalistes sont en compétition pour des subventions de démarrage de 60,000 USD ainsi que pour le soutien de mentors, de dirigeants d'entreprises et de consultants.

Certaines entreprises établies font des investissements directs dans l'espace de start-up. Le Middle East Broadcasting Center Group (MBC), la première société privée de radiodiffusion par satellite dans le monde arabe, a récemment commencé à investir dans des start-up (médias et divertissement) à l'aide de sa branche financière, MBC Ventures. Outre les placements de trésorerie, qui vont de 100.000 à 500.000 dollars par transaction, MBC mettra à profit son expertise pour soutenir les start-up dans des domaines tels que la publicité, les médias sociaux et les questions juridiques.

Plusieurs des incubateurs de la région soutenus par des sociétés établies comprennent également un volet de financement. Turn8 investira 24 000 USD pour aider les équipes qui font preuve d'innovation pour concevoir, construire et lancer un prototype. Afkar.me de Intigral utilise un modèle de financement différent. Au lieu d'offrir des capitaux d'amorçage pour une participation, il injectera 20,000 USD dans le capital d'amorçage sous forme de prêt. Une fois que les start-ups ont lancé leurs produits, Afkar.me va les présenter à un réseau de partenaires et d'investisseurs tels que STC Ventures, MBC Ventures, et Middle-east Venture Partners.

"Nous n’avons pas vocation à valoriser une société dès le premier jour", a expliqué Victor Kiriakos, directeur senior des produits stratégiques à Intigral, selon un article paru dans Wamda. "Notre objectif est de créer une entreprise qui pourrait devenir notre partenaire, afin que nous puissions mettre en place des actions de développement et de valorisation. Nous ne sommes pas à la recherche d'un retour sur investissement, nous cherchons à enrichir l'écosystème".

La RSE comme agent de changement

Bien que de grandes entreprises continuent et même augmentent leur promotion de l'entreprenariat et de la création d'emplois dans le Moyen-Orient, le plein impact de leurs activités ne se fera sentir que dans plusieurs années.

Cependant, même à court terme, le changement de pensée de l'entreprise en matière de RSE et des investissements démontre une bonne compréhension des problèmes de la région et des lacunes présentes au sein de l'environnement entrepreneurial.

Accroître la collaboration entre les gouvernements et les entreprises afin de mettre en place un écosystème favorable aux PME pourrait être crucial pour le développement économique de la région MENA.
Il peut aussi devenir un modèle pour d'autres régions en développement et également pour les multinationales qui cherchent à lancer des programmes de RSE dans ces régions.

La RSE peut être beaucoup plus qu'une simple démarche d'entreprise. Elle peut être un agent de véritable et nécessaire progrès économique.

Laurent Leloup

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Mercredi 12 Février 2014




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