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Marchés, Grèce, zone euro : La nouvelle crise a déjà commencé

En annonçant dès le début 2015 que les marchés financiers allaient connaître une année difficile ou encore en expliquant il y a quelques mois qu'un krach obligataire et boursier allait se produire d'ici l'automne prochain, nous prenions des risques. Mais n'est-ce pas là notre métier ? En l'occurrence, établir nos prévisions en toute indépendance, en prenant certes des risques, mais uniquement sur la base d'une analyse économique objective. Il s'agit donc de risques calculés. C'est grâce à ce travail du quotidien que tous les ans, nous pouvons présenter le bilan de nos prévisions en toute tranquillité. C'est par exemple grâce à lui que l'an passé, toutes nos prévisions ont été réalisées, sauf une : la baisse des taux d'intérêt des obligations des Etat européens.


Marc Touati
Marc Touati
Nous savons cependant que, compte tenu de ces prises de position et en dépit de nos réussites passées, nous sommes constamment attendus au tournant, notamment par ceux qui refusent de prendre des risques et suivent bêtement le consensus, préférant avoir tort avec tout le monde que raison tout seul…

Cette année encore, ces partisans du consensus mou vont donc encore se tromper. Même s'il ne faut évidemment pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, la récente et forte remontée des taux d'intérêt des obligations d'Etat, ainsi que la baisse marquée des indices boursiers montre effectivement que la nouvelle crise a déjà commencé.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : - 8 % pour l'Eurostoxx 50 depuis la mi-avril, - 7 % pour le Cac 40 depuis la fin avril, ou encore - 2,1 % pour le Dow Jones en dix jours. Parallèlement, les taux longs eurolandais se sont nettement tendus : de 0,25 % le 20 avril dernier à 1,1 % pour le taux d'intérêt à 10 ans de l'OAT, de 1,19 % le 7 avril à 2,3 % pour celui des obligations de l'Etat italien. Même le Bund allemand a bu la tasse, voyant son taux à 10 ans passer de 0,016 % le 17 avril dernier à actuellement 0,8 %.

A la lecture de ces évolutions, on se demande d'ailleurs où sont passés les très nombreux économistes et prévisionnistes en tous genres qui claironnaient il y a peu que les marchés boursiers allaient encore fortement progresser, ou que l'extrême faiblesse des taux longs étaient normale et qu'elle allait s'installer pendant très longtemps. Et si les niveaux de ces taux d'intérêt restent encore bas, la violence de leur récente remontée s'apparente clairement à un mini-krach obligataire, qui est d'ailleurs loin d'être terminé.

Et ce, quelle que soit l'issue du dossier grec. En effet, tout le monde sait désormais que la Grèce ne remboursera pas tout ou partie de sa dette et que, parallèlement, Syriza ne reviendra pas sur ses promesses électorales. Le nouveau délai imposé par la Grèce et accordé à contrecœur par le FMI pour différer le remboursement des échéances des prochains jours à fin juin ne fait que confirmer que le but de toutes les négociations récentes est simplement de gagner du temps.

Dans un monde cartésien, le « Grexit » serait donc inévitable. Il s'agit d'ailleurs selon nous de la seule solution viable pour sauver ce qui reste de la zone euro, mais aussi pour guérir la Grèce, qui, grâce à l'annulation de sa dette et à une devise normale au regard de ses fondamentaux économiques, pourrait ainsi progressivement retrouver le chemin d'une croissance soutenue, autonome et durable. Seulement voilà, par peur, par connivence, par manque de courage ou les trois à la fois, les dirigeants eurolandais, grecs et ceux du FMI ne souhaitent pas en aller jusque-là, du moins pour le moment.

Nous nous dirigeons donc « tranquillement » vers un nouveau cadeau d'une centaine de milliards d'euros accordé à la Grèce sans contrepartie majeure, si ce n'est quelques ajustements cosmétiques du discours de Tsipras. Dès lors, comme le déficit public grec continuera d'augmenter, il faudra encore consentir de nouveaux cadeaux dans environ un an. Et le puit sans fond continuera de se creuser… Autrement dit, la Grèce deviendra un pays sous perfusion permanente, réduisant encore davantage la crédibilité, déjà bien faible, de la zone euro.

Mais, attention, ce nouveau cadeau empoisonné ne résoudra absolument pas la crise grecque, ni même celle qui commence à s'installer sur les marchés obligataires et boursiers internationaux. En effet, en différant, c'est-à-dire en fait en annulant, une nouvelle partie de la dette grecque, les Etats eurolandais devront inscrire cette nouvelle perte dans leurs comptes. D'où une augmentation de leur déficit et de leur dette. Ce nouveau dérapage ne manquera donc pas d'alimenter la remontée des taux d'intérêt des obligations d'Etat, entraînant un krach obligataire, puis une tempête boursière et enfin une récession, en particulier dans la zone euro.

Nous aimerions vraiment pouvoir annoncer le contraire. Mais nous devons avant tout rester réalistes, ce que ne sont plus les dirigeants monétaires et politiques eurolandais, qui s'entêtent à avancer qu'il n'y a pas de bulle boursière ou obligataire.

Or, comme en témoigne l'évolution récente des marchés financiers, le dégonflement de cette double bulle a déjà commencé. Espérons simplement qu'il ne s'agira que d'un nouveau krach parmi d'autres et non du « big one », qui entraînerait le monde et plus particulièrement l'Europe dans une nouvelle décennie de crise économique et sociale.

Car, si la Chine, les Etats-Unis et certains autres pays ayant modernisé leurs structures économiques et/ou disposant de réserves de changes conséquentes pourront résister tant bien que mal à une nouvelle crise, il n'en est absolument pas le cas pour la zone euro, qui a déjà utilisé toutes ses cartouches et serait, une fois encore, la grande perdante du futur krach.

Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).

www.acdefi.com


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Lundi 8 Juin 2015




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