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Les glaneurs

Vous aurez noté le fossé qui va se creusant entre les commentaires lénifiants de la presse selon qui, si tout ne va pas bien, tout va en tout cas beaucoup mieux, et les commentaires de plus en plus apocalyptiques des blogueurs - dont je suis.


Les glaneurs
C’est que pour nous, blogueurs, notre crédibilité est en jeu. La pièce du « tout va bien » est essentiellement écrite en ce moment aux États–Unis mais il n’y a pas critique plus sévère pour un auteur que des spectateurs riant à contretemps. Mr. Geithner, Secrétaire au Trésor américain, l’a appris à ses dépens quand les étudiants de l’université de Pekin se sont esclaffés à sa remarque que l’achat par la Chine de Bons du Trésor américains avaient été un excellent placement.

La crédibilité est cruciale aussi pour les hommes politiques. S’ils entendent durer bien entendu. C’est à cela qu’a dû penser Mr. Sarkozy quand il a affirmé il y a quelques jours devant l’Organisation Internationale du Travail à Genève qu’il est « chimérique et irresponsable de croire que les peuples subiront sans rien dire les conséquences de la crise ». Il avait ajouté : « On ne règlera rien si on ne règle pas d’abord la question du capitalisme financier qui impose à l’économie et à la société son propre système et ses propres normes ». C’est vrai. « Il faut tout revoir : la surveillance prudentielle des banques, la réglementation des hedge funds, les règles comptables, les modes de rémunération », avait-il encore déclaré. C’est vrai aussi. « La crise nous rend de nouveau libre d’imaginer. C’est le moment d’aller le plus loin possible », avait-il conclu. Comment mieux dire ?

Les Etats-Unis, qui dirigent aujourd’hui la claque du « tout va mieux », s’enferrent dans l’erreur. Dans leur « A New Financial Foundation », l’article du Washington Post où ils présentent le plan de supervision des institutions financières de l’administration Obama, Mrs. Summers et Geithner préconisent diverses mesures : une surveillance renforcée, comprise comme davantage d’informations autorisant davantage de laisser-faire, une meilleure protection des consommateurs contre les organismes de crédit, sans rien prévoir pour qu’ils aient moins à s’endetter, l’accent mis désormais sur le risque systémique plutôt que sur celui que présentent les entreprises individuelles, alors que les chaires prestigieuses d’économie de leurs universités continueront de prêcher l’individualisme méthodologique qui nie l’existence d’effets économiques globaux distincts de la somme des comportements individuels.

Face aux États–Unis, la Chine pratique depuis vingt ans l’art martial du Tai-Chi, dont le principe fondamental est d’utiliser pour le défaire, la force de son adversaire : détourner d’une chiquenaude son élan pour l’envoyer s’écraser sur un mur. La tactique lui a bien réussi lorsqu’elle était encore seule, elle s’avérera plus rentable encore étendue ces jours-ci à l’échelle du BRIC (Brésil-Russie-Inde-Chine), dont elle est le leader incontesté.

Et l’Europe dans tout ça ? On entend bien quelques rares voix : celle de Mme Merkel et celle donc de Mr. Sarkozy : « Je veux dire à tous les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne que l’Europe doit être exemplaire parce c’est ainsi qu’elle sera la plus fidèle à ses valeurs et qu’elle aura une chance de les faire partager », a affirmé celui-ci lors de cette même réunion à Genève. « La France veillera à ce qu’aucun débat ne soit enterré, à ce qu’aucune question ne soit éludée ». Dont acte.

Il reste en effet un monde à sauver mais pas simplement celui de l’entrepreneur-héros contre le spéculateur-canaille, comme l’entend le président français : un monde fait des peuples tout entiers, avec l’accent mis, pourquoi pas – une fois n’est pas coutume, sur ceux qui doivent se contenter de ramasser les restes : sur les glaneurs.


Dimanche 21 Juin 2009




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