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Les achats IT peuvent-ils être responsables ?

Peut-on parler « d’achats IT responsables » ?


François Rabasse
François Rabasse
On parle, faute de mieux, « d’achats responsables » en référence à une démarche de responsabilité sociale et environnementale (RSE, « politique de développement durable d’entreprise », CSR) formelle définie au niveau de l’entreprise et/ou de la DSI.
« Faute de mieux », car le risque est d’accentuer la dimension « obligation morale », qui pour moi n’est pas le sujet.
C’est en tout cas préférable à la terminologie « achats verts ».

Comment les définir ?
La démarche consiste à intégrer des exigences techniques dans l’objet de destination, dans les conditions d’exécution, ainsi que des clauses sociales dans les différentes pièces d’un marché (Cahier des charges, renseignements sur la société, contrat).

Peut-on donner des exemples ?
Exemples de clauses techniques : niveaux de consommation, modularité de composants, composition physico chimique (revêtements, batteries), conformité à un label.
Exemple de conditions d’exécution : cycle des emballages, documentation, chaine logistique.
Exemple de clauses sociales : existence d’une démarche de responsabilité d’entreprise du prestataire, organisation de sa chaine de sous-traitance.

Quelles sont les raisons principales qui motivent une démarche d’achats responsables ?
La volonté de bien faire, certainement, mais aussi l’intérêt à agir : leviers sur son propre business, cycle de rationalisation, contrôle de ses coûts notamment de ses coûts « globaux » (TCO que l’on a l’habitude de manipuler dans l’informatique).
A noter que la démarche d’achats SI responsable peut être « commanditée » par la DG et constituer une contribution de la DSI au programme de « responsabilité de l’entreprise » (dont on peut rappeler la logique de plan de progrès systémique). L’entreprise a choisi de s’améliorer en se souciant de son « empreinte » environnementale et des impacts sociaux de ses activités, notamment à travers ses achats, et la DSI est contributeur.

Quelles sont les obligations des utilisateurs en termes de clauses à intégrer aux appels d’offres ?
Il n’y a pas à proprement parler d’obligations puisque celles-ci (législation ROHS, agréments) relèvent des obligations des fournisseurs.
Mention peut-être particulière sur les obligations de recyclage (DEEE) qu’il est utile de comprendre et de mettre en place en concertation avec son fournisseur d’équipement.
Mention spéciale également des acheteurs publics qui doivent en principe avoir pris en compte la dimension « développement durable » dans la formulation de leurs besoins (Article 5 du Code des Marchés Publics).
Une démarche éco-socio-responsable est une démarche volontaire.

Quelle est la maturité du marché (i.e. de l’offre) ?
C’est à regarder différemment selon les types d’offreurs :
Côté constructeurs, la prise en conscience existe et un utilisateur motivé pourra trouver des réponses à ses questions. Dire que l’éco-ordinateur révolutionnaire est à la porte des labos de R&D serait un peu exagéré, mais il y a moyen de faire de gros progrès, par exemple en consommation et gestion des cycles de vie de ses équipements.
Le marché communique très largement sur ses progrès (même si la sur médiatisation brutale du sujet Green IT peut faire sourire).
Côté prestataires de services, on en est encore à un faible niveau de prise de conscience : cela commence timidement chez les SSII (qui ont pourtant de vrais leviers business à saisir) et les Outsourceurs sont encore muets sur le sujet.
Les grands éditeurs communiquent largement, à la fois sur leurs « CSR Policy » et sur les usages Green possibles de leurs produits. Vus de l’utilisateur, ils sont à considérer comme des fournisseurs de services.

Côté utilisateurs, qu’observe-t-on ?
L’informatique n’a pas été le domaine prioritaire des premières vagues de politiques d’achats responsables des années 2006-2007, mais depuis 2008, le sujet est à l’ordre du jour, notamment dans les secteurs d’activité ou l’informatique est stratégique (Banque, télécom, énergie, transports) ainsi que dans un certain nombre d’établissements publics.

Que penser de la démarche des « questionnaires de développement durable » ?
On a pu voir depuis 2005 ces envois de questionnaires développement durable envoyés par de grands clients, généralement en fin d’année. Ces démarches sont pilotées tantôt par les achats, tantôt par une fonction centrale « développement durable », parfois même externalisées. Parfois assimilées à un référencement, il faut comprendre que ces démarches relevaient d’une politique d’entreprise (visant à alimenter le « reporting développement durable » ou à satisfaire à un engagement du type « Global Compact »).
Je n’ai pas le sentiment que ces initiatives aient beaucoup contribué à faire avancer les uns et les autres : ils plongeaient parfois les prestataires dans une grande perplexité (certains questionnaires sont sur-réalistes) et beaucoup de réponses n’étaient probablement pas lues.
En revanche, on voit désormais de « vrais » questionnaires, généralement semi ouverts, qui vont au fond du sujet, même s’ils le font avec plus de discernement.

Doit-on être soi-même très avancé dans sa propre démarche de RSE pour demander à ses fournisseurs de « montrer leur vertu » ?
Oui et non.
Oui, quand on voit certains « questionnaires développement durable » émis par de grands clients qui sont réellement comminatoires. On ne peut pas s’empêcher de penser qu’il est parfois bon de balayer devant leur porte.
Non, quand on a compris la logique de la « nouvelle relation client-fournisseur » sous-tendue par une démarche d’achats responsables bien conduite. En 2 mots c’est « je ne vous demande pas d’être parfait, je vous demande de comprendre dans quelle démarche je m’inscris et de me dire ce que vous faites de votre côté». Cela peut être un peu déconcertant pour des acheteurs découvrant le sujet, mais c’est la dimension (systémique) indissociable de la logique de responsabilité d’entreprise (qualifiée parfois de démarche de développement durable pour l’entreprise).

Est-ce à dire que les relations commerciales sont amenées à se transformer ?
En partie seulement. La logique d’achats (obtenir les meilleures conditions de prix, de qualité, d’engagements, etc) demeure. C’est un « 2ème canal de communication » qui s’ouvre avec ses fournisseurs.

Est-ce une transformation du métier d’acheteur ?
Oui, incontestablement. C’est pour cela une démarche qui s’accompagne un minimum.
J’ai plusieurs fois remarqué que la dimension d’achats responsables redonne du sens au métier des acheteurs.

Quels conseils donner à une DSI qui aborde ce sujet ?
Tout d’abord de commencer par un marché qui lui permette de s’y consacrer pleinement et/ou par ses fournisseurs de premier rang.
Ensuite, de se mettre au clair sur les moteurs de sa démarche (programme d’entreprise, axe de progrès pour la DSI, leviers métiers immédiats) et de le formaliser.
Bien calibrer son niveau d’exigences, c'est-à-dire regarder la capacité de réponse du marché. En effet le but des achats responsables n’est pas de rétrécir l’offre par un niveau d’exigences techniques déraisonnable, ni de mettre ses prestataires de services dans un étau, mais bien de progresser ensemble en tirant un bénéfice mutuel.

Les acheteurs publics ne sont-ils pas prisonniers des procédures de marchés publics, et en conséquence moins bien armés pour piloter des consultations green IT ?
Non. La dernière version du code des marchés publics (CMP2006) est au contraire une très riche « boite à outils » au service de « l’achat public responsable », y compris sur des clauses de responsabilité. Il faut cependant respecter quelques règles et bien préparer son marché : par exemple, mentionner dans la publicité la dimension sociale ou environnementale, ne retenir dans les clauses examinées que celles qui sont en rapport avec l’objet du marché.

Donc pour vous, la prise en compte de la dimension « sociale » fait partie de la démarche d’achats Green IT ?
Assurément, tout d’abord parce que la démarche Green IT rejoint celle d’une « RSE du DSI ». Le Green IT soulève une réflexion qui en fait un vrai sujet de management et ne devrait pas être vu comme un chantier strictement technique.
D’autre part parce que la DSI travaille avant tout avec du « matériel humain ». Additionnez la masse salariale et les budgets de services et vous serez à 70% du budget de la DSI.
J’encourage vivement les DSI à s’emparer du sujet Green IT sous cet angle ; le chantier « achats responsables » est l’un des 4 chantiers à lancer dès le début de la démarche.

François RABASSE, Directeur associé du cabinet de conseil à direction SENSE
Cabinet spécialiste de la mise en oeuvre de démarches de RSE
www.sense-mc.com

Mardi 28 Avril 2009




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