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Les « Nouvelles perspectives de la souveraineté »

Ce nouveau livre [mon 4ème] s’attache à révéler au plus grand nombre les « Nouvelles perspectives de la souveraineté »,(1) comme si « la vaste Athènes contemporaine dans laquelle nous vivons avait effacé [définitivement ?] les frontières » [Jérôme Ferrari]. Pour nous en convaincre, prenons quelques exemples notamment sur le plan économique. Car ne nous y trompons pas, « que l’indépendance, expression du droit des peuples à l’autodétermination, puisse être scindée entre une branche politique et une branche économique et que la seconde risque de compromettre la première, invite à s’interroger sur l’unité de l’ordre international ».(2) Pour preuve, la redistribution des espaces économiques dans le monde prend à contre-pied les systèmes économiques, juridiques et sociaux conçus pour régir une société internationale divisée en Etats-nations. Ainsi, l’ « Etat admet désormais qu’il est trop petit pour appréhender le marché global, et le voudrait-il, qu’il est impuissant à le faire ».(3)


Thierry Charles
Thierry Charles
Du reste de toute évidence, personne n'est satisfait du statu quo. La Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures [BAII] destinée à accélérer le financement des infrastructures en Asie, est pour un grand nombre d’observateurs une avancée majeure en termes de gouvernance mondiale. Selon le prix Nobel d'économie, Joseph Stiglitz, nous devrions accueillir favorablement l'initiative chinoise visant à « multilatéraliser » les flux financiers consacrés aux investissements : « C'était exactement la politique américaine dans la période qui a suivi la 2ème Guerre mondiale, lorsque la Banque mondiale a été instituée pour multilatéraliser les fonds de développement, qui venaient essentiellement des Etats-Unis ».(4) Mais il constate que dans un monde de plus en plus multipolaire, les Etats-Unis veulent rester le « primus inter pares ». Ce qui confirme d’ailleurs, une constante du droit international : la « consolidation du fait accompli ».

Les Etats-Unis aspirent même à une sorte d’hégémonie juridique. Le 27 mai 2015, sept importants responsables de la FIFA sont arrêtés à Zurich à la demande du département américain de la justice. Ils sont accusés d’avoir mis en place un système de rétrocommissions de plusieurs millions de dollars [l’enquête concerne notamment les conditions d’attribution du Mondial 2018 à la Russie]. La Russie n’apprécie vraiment pas l’opération judiciaire engagée par les Etats-Unis contre la Fifa. Dans un communiqué, le ministère russe des affaires étrangères a appelé Washington « à mettre fin à ses tentatives d’exercer la justice bien loin de ses frontières ».

Autre exemple sur le plan financier. Désormais, il est illusoire de penser qu'un pays, en raison de la flexibilité des changes, peut conduire en toute indépendance sa politique monétaire. Selon les membres, du « Cercle Turgot » : « les cycles de crédit sont mondiaux ; ils déstabilisent les pays émergents ; ils ont déstabilisé la zone euro. Dans un monde qui abandonne le protectionnisme direct, trop voyant, l'arme monétaire se fait instrument de la guerre commerciale ».(5) Malheur ! Le monde de la finance a définitivement perdu en l’Etat son « grand horloger ».

Mais le concept de souveraineté fait également l’objet de critiques sur ses nouveaux fondements politiques et surtout sur ses applications concrètes. A cet égard, le drame des migrants en Méditerranée, alors que les naufrages se multiplient aux portes de l'Europe, montre bien qu’à la liberté de quitter son pays ne répond pas la liberté de pénétrer dans un autre [l'Union européenne et l'opération « Triton » - après « Mare Nostrum » -, n'arrivant pas à faire face aux flux, voire même à mener les sauvetages à temps]. « Emigrants, fuyards, apostats – Sans patrie entre les états […]. Douaniers ; à quoi sert la frontière ? – Chaque riche a la terre entière – Tout misérable est étranger », écrit Marguerite Yourcenar en 1934 qui distinguait déjà son « exil » américain de « migrations plus misérables ». Quant aux frontières de l’espace Schengen, elles ont pour certains trop lâches et pour d’autres trop fermées.

Jamais au cours des dernières décennies, les conflits très graves, larvés ou ouverts, ne se sont autant propagés. Le président philippin Benigno S. Aquino III compare même la situation de son pays avec celle de la Tchécoslovaquie à la veille de la Seconde Guerre mondiale, obligée d’abandonner des parties de son territoire au profit de l’Allemagne. Dans « The Contest of the Century », le journaliste Geoff Dyer rappelle que Pékin a entrepris de transformer la zone économique exclusive de 200 miles autour de ses côtes, telle que déterminée par les Nations unies, en eaux territoriales [normalement à 12 miles des côtes]. Les bateaux ne pourraient alors plus y naviguer sans son autorisation et la Chine contrôlerait certaines des plus importantes routes maritimes de la planète.

Quant aux moyens de lutter contre la menace terroriste résultant de l’existence d’ « Etats déliquescents » [Syrie, Irak, Lybie, etc.], les « approches dites pragmatiques qui se rattachent davantage à une matrice alternative à la souveraineté : celle de la gouvernance mondiale […] ne fait pas l’unanimité […]. Les uns sont plus prompts à considérer qu’elle est non seulement inévitable mais encore souhaitable. Les autres, en revanche, insisteront sur les effets pervers engendrés par l’abandon du principe de souveraineté ».

Enfin nul ne doute que l’Internet est devenu au fil du temps l’ « épine dorsale » de nos sociétés ainsi qu’un levier majeur de transformation économique, sociale et culturelle. A cet égard, les révélations d’Edward Snowden et les attaques menées sur les réseaux mettent en lumière les nouveaux défis auxquels sont confrontés la plupart des États, les acteurs économiques [voire les citoyens eux-mêmes], pour préserver leur « souveraineté numérique ».

Preuve est ainsi faite que la souveraineté est une idée neuve en ce début du 21ème siècle, sans être « déchue » sa nature évolue.

A lire : Thierry Charles, Les Nouvelles perspectives de la souveraineté, Edit. L’Harmattan, Collection : Questions contemporaines, juin 2015, 222 pages ; 21,5 x 13,5 cm ISBN 978-2-343-06157-3 EAN 9782343061573 / www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=47294 « Nous n’avons plus la mesure ni de cette coupole ni de cet amphithéâtre qu’est la souveraineté... ». (6)


Thierry CHARLES
Directeur des affaires Juridiques Allizé-Plasturgie
Docteur en droit


t.charles@allize-plasturgie.com

1 - Thierry Charles, Les Nouvelles perspectives de la souveraineté, Edit. L’Harmattan, juin 2015.
2 - François Rigaux, D’un nouvel ordre économique international à l’autre, Souveraineté étatique et marchés internationaux à la fin de 20ème siècle, Edit Litex, 2000 – Volume 20.
3 - Eric Loquin, Où en est la lex mercatoria ? Souveraineté étatique et marchés internationaux à la fin de 20ème siècle, Edit Litex, 2000 – Volume 20.
4 - Joseph Stiglitz, Pourquoi il faut soutenir la Banque asiatique d'investissement, Les Echos, 8 mai 2015.
5 - « Désordre dans les monnaies - L'impossible stabilité du système monétaire international ? » - Auteur[s] : Le cercle Turgot, Jean-Louis Chambon, François Meunier – Edit. Eyrolles, mars 2015.
6 - Barbara Delcourt, Le principe de souveraineté à l’épreuve des nouvelles formes d’administration internationale de territoires, Pyramides, 9 | 2005, 87-110. Selon Jackson, la persitance de la souveraineté s’explique par le fait que « like any basic human institution, sovereignty is an arrangement that is particularly conducive to upholding certain values that are considered to be of fundamental importance: international order among states, membership and participation in the society of states, co-existence of political systems, legal equality of states, political freedom of states, and pluralism or respect for the diversity of ways of life of different groups of people », R. Jackson, « Sovereignty in World politics : a Glance at the Conceptual and Historical Landscape », in R. Jackson [ed.], Sovereignty at the Millennium, Oxford, Blackwell Pub., 1999.


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Vendredi 5 Juin 2015




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