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La dette et l'éthique

Encore un mardi soir passé aux Bernardins … le titre de la conférence était « Endettement privé, endettement public, quelle éthique ? », et les intervenants Patrick Athus (Natixis), Jean-Paul Betbèze (Crédit Agricole), François Villeroy de Galhau (BNP Paribas) et Michel Gabrysiak (Fondation Finance) sous la houlette de Christian de Cacqueray. Le sujet était sans doute trop dense pour être traité en 52' seulement, mais il a pour le moins été abordé et voici quelques remarques qui, de mon point de vue, qui n'engage que moi, méritent de trouver une résonance.


Rémy Mahoudeaux
Rémy Mahoudeaux
La dette et l'éthique sont-ils aussi compatibles que l'eau et le feu ? Quand Jean-Paul Betbèze présente la dette comme l'instrument de libération de notre génération dont l'ardoise sera payée par les générations de jeunes et celles encore à naître, accoler ces deux termes semble incohérent, voire honteux. Payée … ou pas. Il est clair qu'un défaut de paiement des générations dites futures, soit par l'expatriation, soit par simple refus d'abonder à des « solidarités » trop coûteuses est toujours possible.

Patrick Arthus rappelait que la finance consiste à orienter une épargne qui n'est ni au bon endroit, ni sous la bonne forme, en financements conformes aux besoins à financer. C'est donc forcément compliqué et sophistiqué, d'où le temps qu'il faut laisser à l'innovation financière pour que les courbes d'apprentissage soient descendues, et évacués les problèmes de digestion de ces innovations.

Il y a bien sûr le discours convenu et consensuel sur le distinguo entre la dette « vertueuse », celle qui ne fait pas défaut et permet la réalisation de projets, et la dette « nocive » parce que créée par un abus de crédit. Oui, il n'est pas indécent de considérer que l'octroi d'un crédit est fonction de la capacité de remboursement de l'emprunteur... ce métier s'appelle la banque. Ce que Jean-Paul Betbèze présentait d'une façon que j'ai apprécié : si ce que je veux est supérieur à ce que je peux, la dette est une solution dans la mesure où existent et une co-responsabilité entre emprunteur et prêteur, et des contrôles suffisants pour éviter des situations critiques.

François Villeroy de Galhau et Patrick Arthus s'accordent sur le constat que la régulation ne s'attaque malheureusement qu'au problème de la crise précédente et pas à celui de la prochaine … Certes c'est possible, mais j'ai peur de déceler en message subliminal le couplet de la main invisible du marché et de la vertu de l'autorégulation. En y réfléchissant, j'ai envie de rétorquer que (a) il n'est pas interdit de penser que de nouveaux « abus de crédits » seront commis, générant des bulles, et (b) qu'ils pourraient être déguisés en produits financiers sains. Par ailleurs, des financiers sans scrupules proposeront et vendront des produits à faible risque et à forte rentabilité … sur le papier : brefs, des schémas de Ponzi. Si les régulations anciennes ou nouvelles pouvaient déjà abaisser et la fréquence d'occurrence, et l'impact de ces sinistres, ce serait déjà bien ! D'ailleurs, une loi ou un règlement n'est pas un substitut de la morale, elle ne la remplace pas nous assène Jean-Paul Betbèze. J'abonde de toutes les touches de mon clavier : tous les règlements, contraintes, normes, lois, ne sauraient être suffisants puisqu'ils peuvent être détournés dès lors que la morale est en faillite.

Surprenant dans ce cadre « catho » des Bernardins : Une « apologie » en règle de l'usure, certes circonscrite au micro-crédit dont le coût élevé de distribution et la probabilité élevée de défaut doivent être couverts, mais qui financent des projets à très forte rentabilité compte tenu de la modicité des sommes investies. Je crois d'ailleurs me souvenir que Mohamed Yunus (1) défendait lui aussi des taux élevés dans l'un de ses livres.

Sur la sortie éventuelle de crise, Michel Gabrysiak indique que nous ne travaillons pas assez pour nous payer de la croissance et rembourser nos dettes. Patrick Arthus dénonce le poids du corporatisme dans notre pays (j'approuve), et François Villeroy de Galhau rappelle qu'entre mesures conjoncturelles, efficaces à court terme mais néfastes à long terme, et mesures structurelles, douloureuses aux échéances proches et plus payantes au-delà, l'arbitrage devrait être évident. Mais il ne l'est pas chez nous.

Un petit regret : Jean-Paul Betbèze nous a parlé du silence des entreprises. J'aurais bien aimé qu'il développe un peu sur ce sujet.

(1) Fondateur de la Grameen Bank et « inventeur » du micro crédit. Prix Nobel de la Paix 2006.


Vendredi 16 Novembre 2012




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