Corporate Finance, DeFi, Blockchain, Web3 News
Corporate Finance, DeFi, Blockchain News

L’Entreprise Face au défi de l’Accélération Sociale et Sociétale

Instantanéité, immédiateté, mobilité, vitesse d’exécution, sont devenues les moteur de la culture d’un nombre croissant d’entreprises lesquelles subissent de plein fouet les effets de l’accélération sociale et sociétale qui caractérise notre époque au plan de l’innovation industrielle, scientifique, technologique, ainsi que des rythmes de vie et de travail.


Constant Calvo
Constant Calvo
L’accélération sociale et sociétale n’est pas un phénomène nouveau, c’est un processus qui a commencé il y a deux cents ans. Selon les chercheurs, elle apparaît dès le milieu du XVIIIè siècle, se diffuse dès les premières années du XIXè siècle, se renforce vers le milieu de ce siècle avec des innovations majeures – parmi lesquelles le télégraphe, le téléphone, ou la radio - pour devenir au XXè siècle le moteur du développement économique et social. Au début du XXIè siècle, on assiste au triomphe du numérique qui donne un coup d’accélération sans précédent aux échanges et à la communication au point de changer notre perception spatio-temporelle et nos comportements.

Cette accélération du temps fait l’objet de l’attention des chercheurs ayant baptisé nos sociétés modernes du terme de « nanocraties » – celles dont la nanoseconde représente la valeur et le symbole. Elle se répand dans le monde entier, sur tous les continents, dans toutes les cultures, bouscule les individus et les sociétés traditionnelles, procédant ici à leur radicale transformation, là les engloutissant pour les passer par pertes et profits.

Les chercheurs s’interrogent sur les conséquences de cette accélération tous azimuts par laquelle les possibilités et promesses offertes par les innovations scientifiques, techniques et technologiques censées enrichir notre cadre de vie et augmenter notre jouissance de la vie, notre liberté, et notre autonomisation – soit notre capacité à prendre en charge notre existence personnelle - se traduisent paradoxalement pour beaucoup de nos contemporains en une nouvelle forme d’aliénation.

Ils s’interrogent sur la capacité des hommes et des femmes sinon à endiguer cette accélération de la vie sociale au sein de l’entreprise – ce qui parait une mission impossible – du moins à trouver une voie visant à concilier vie personnelle, vie familiale, et vie professionnelle. Car l’accélération des rythmes de la vie et du travail de nos nanocraties semblent annihiler l’espace entre le présent et le futur dans lequel se construisent les projets à moyen et surtout long termes. Serons-nous capables de maitriser l’accélération sans fin et sans limite des rythmes de vie et de travail ? Notre langage même est truffé de mots et d’expressions qui expriment la fuite du temps, la pénurie du temps, l’usure du temps, le sentiment de perte de temps.

Pour Hartmut Rosa « Accélération. Une critique sociale du temps », La Découverte, coll. « Théorie critique », 2010, les innovations techniques ont favorisé l’émergence de nouvelles possibilités afin d’augmenter nos rythmes de vie ; or, dans la mesure où les accélérations conjuguées des innovations techniques, du changement social, et du rythme de vie s’auto-alimentent, on constate que l’accélération du rythme de vie devient à son tour le moteur des innovations techniques.

Selon Hartmut Rosa l’histoire contemporaine doit être analysée comme celle d’une dialectique entre deux forces, les forces d’accélération et les forces de résistance qui s’opposent aux premières, représentées par les institutions et organisations traditionnelles et pérennes, lesquelles sont menacées de disparaître.

Cette dialectique historique n’est pas sans nous rappeler la problématique de la conduite du changement, où les résistances au changement qu’elles soient collectives (systèmes de valeurs propres à un groupe, ses normes et ses rites), individuelles (remise en cause, anxiété, sentiment de perte des repères) ou conjoncturelles et structurelles (conditions de travail, climat social, mode d’organisation), tentent de freiner l’entreprise lorsque celle-ci est confrontée à la nécessité vitale de se transformer, de se réinventer et de s’adapter aux mutations sociales, sociétales, et technologiques, et leurs conséquences sur les métiers, les emplois, et le management des compétences.

Selon Milad Doueihi « Pour un humanisme numérique », Seuil, 2011, on a tendance à surévaluer l’importance des risques liées à l’accélération des échanges et de la communication générée par la révolution numérique, et de la tyrannie supposée de l’immédiat et de l’instantané.

« Une série d’analyses et d’essai nous met en garde contre un absolutisme montant, agencé par les outils et la temporalité qu’ils semblent imposer : celle de l’instantanéité, de l’immédiateté et surtout de l’accélération du rythme de notre vie quotidienne, de nos décisions et de nos réflexions. Cette mise en relief de la temporalité de la vie moderne, sous l’emprise des outils numériques et de leur sociabilité, ne fait que traduire un malaise, un souci et, en fin de compte, une peur habitée par la nostalgie. Malaise face à un changement presque sans précédent, qui touche à tous les aspects de nos vies, individuels et collectifs ; souci exprimant un désarroi au nom de l’humain ancrée dans des pratiques culturelles, lettrées et savantes (elles-mêmes héritières du XIXè siècle et de ses valeurs) et dans des formes d’expression fragilisées par la culture numérique, devant le spectacle d’un chaos, sans critères ni repères ; et surtout, dit-on, peur d’une convergence entre homme et machine, entre les humains et le réseau, à une échelle sans pareille. Si ces réactions nous semblent exagérées, elles témoignent néanmoins de la réalité d’un changement radical de notre vécu quotidien comme dans notre culture. »

Les directions d’entreprise et celles des ressources humaines en particulier constatent que leurs cadres, collaborateurs et salariés qui subissent l’impact de cette accélération sociale et sociétale, s’interrogent sur le sens de leur travail et celui de leur vie personnelle et familiale, développent des pathologies liées au stress et aux risques psychosociaux, et que l’absentéisme et le désengagement d’une partie non négligeable de leurs personnels et de leurs talents s’accroissent de façon critique.

Chacun renvoyant dans la confusion la responsabilité de ce malaise, de cette peur, et de ces pathologies rampantes à l’Autre, à tout et n’importe quoi – au politique, à la direction, au management, aux actionnaires, à la structure de l’organisation, à la concurrence effrénée, aux technologies de l’information et de la communication, aux progrès scientifiques, à la mondialisation – alors que leurs origines sont systémiques.

A coup sûr, l’accélération sociale et sociétale, ses conséquences, ses risques, et la manière dont nous saurons y faire face, représentent l’un des plus grands défis de notre époque. Pour Milad Doueihi l’originalité du numérique « dérive en grande partie de la spatialité naissante qu’elle met en œuvre ». Selon le philosophe, la culture numérique marque le sacre d’une civilisation « hybride ». Il ne s’agit pas d’opposer l’ancien monde et le moderne.

« L’humanisme numérique est au contraire le résultat d’une convergence entre notre héritage culturel complexe et une technique devenue un lieu de sociabilité sans précédent. D’une convergence qui, au lieu de simplement renouer l’antique et l’actuel, redistribue les concepts, les catégories et les objets, comme les comportements et les pratiques qui leur sont associées, dans un environnement nouveau. »

Ni naïf ni béatement optimiste, Milad Doueihi est au plus point conscient des immenses potentialités que recèle la révolution numérique, mais aussi des risques qu’elle pourrait engendrer. « L’humanisme numérique est l’affirmation que la technique actuelle, dans sa dimension globale, est une culture, dans le sens où elle met en place un nouveau contexte, à l’échelle mondiale, et parce que le numérique,malgré une forte composante technique qu’il faut toujours interroger et sans cesse surveiller (car elle est l’agent d’une volonté économique), est devenu une civilisation qui se distingue par la manière dont elle modifie nos regards sur les objets, les relations et les valeurs, et qui se caractérise par les nouvelles perspectives qu’elle introduit dans le champ de l’activité humaine. »


Constant Calvo, Directeur associé ADHERE RH
http://blog.adhere-rh.com

Vendredi 30 Août 2013




OFFRES D'EMPLOI


OFFRES DE STAGES


NOMINATIONS


DERNIERES ACTUALITES


POPULAIRES