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Juste valeur : nouvelle norme IFRS 13 pour les entreprises au 1er janvier 2013

Point de vue d'un conseil financier.


Yann Magnan
Yann Magnan
Qu'entend-on par le concept de "juste valeur" ? Quelles évolutions la norme IFRS 13 apporte-t-elle ?

Le concept de juste valeur (ou Fair Value en anglais) a été introduit par différentes normes, et repose sur une mesure de la valeur fondée sur le marché et non sur une approche spécifique à une entité. La norme IFRS 13 Evaluation de la juste valeur, publiée en mai 2011 et entrant en vigueur pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2013, définit la juste valeur comme « le prix qui serait reçu pour la vente d’un actif ou payé pour le transfert d’un passif lors d’une transaction normale entre des intervenants du marché à la date d’évaluation ».

Amaury Wernert
Amaury Wernert
Dans un contexte de diversité et parfois même d’incohérence des dispositions préexistantes dans les diverses normes faisant référence à la juste valeur (IAS 36 Dépréciation d’actif, IFRS 9 Instruments financiers, IAS 40 Immeubles de placement, etc.), IFRS 13 constitue un ensemble unique de dispositions relatives à la définition et à la mesure de la juste valeur, en s’appliquant lorsqu’une autre norme IFRS impose ou permet des évaluations à la juste valeur (à l’exception toutefois des normes IFRS 2 Paiement fondé sur des actions et IAS 17 Contrats de location). Cette nouvelle norme vient donc préciser et compléter les dispositions existantes, et en premier lieu la définition même de la juste valeur.

En effet, jusqu’à l’apparition de la norme IFRS 13, la juste valeur était définie comme « le montant pour lequel un actif pourrait être échangé, ou un passif éteint, entre des parties bien informées et consentantes dans le cadre d'une transaction effectuée dans des conditions de concurrence normale ». Seulement, cette définition restait vague à plusieurs titres :
- La notion d’ « échange » ne permettait pas de préciser s’il s’agissait d’un prix d’achat ou d’un prix de vente ;
- Il n’était pas précisé qui étaient ces « parties bien informées et consentantes », la référence au marché n’étant dès lors pas explicite ;
- Cette définition ne précisait pas non plus le moment où cette transaction théorique surviendrait.

La nouvelle définition de la juste valeur introduite par IFRS 13 permet de combler ces lacunes, en introduisant les notions de « vente d’un actif » et de « transfert d’un passif », en précisant qu’il s’agit d’une transaction entre des « intervenants de marché » et en mentionnant qu’il s’agit du prix « à la date d’évaluation ». On notera qu’une implication directe de cette nouvelle définition est qu’il s’agit donc d’estimer une valeur de sortie à la date d’évaluation de l’actif ou du passif considéré.

Par ailleurs, IFRS 13 apporte un certain nombre de précisions et de dispositions spécifiques. Nous retiendrons essentiellement quatre ensembles de dispositions :
- Les dispositions relatives au marché de référence servant à l’évaluation de la juste valeur. IFRS 13 introduit la notion de marché principal comme marché de référence, et à défaut de marché le plus avantageux ;
- La généralisation du concept d’utilisation optimale (highest and best use en anglais) pour les actifs non financiers, pouvant différer significativement de la valeur d’utilité dans certains cas ;
- Un ensemble de dispositions relatives aux données d’entrée des techniques d’évaluation, et notamment une hiérarchisation explicite à travers trois niveaux ;
- Un certain nombre d’informations supplémentaires à mentionner en annexe des états financiers, principalement au regard des techniques d’évaluation utilisées et, lorsque la juste valeur se fonde sur des données non observables, de la sensibilité des états financiers aux hypothèses d’évaluation retenues.

Au final, IFRS 13 synthétise et harmonise l’essentiel des dispositions relatives à la juste valeur existantes, tout en apportant un ensemble de précisions et de mesures complémentaires destinées à favoriser la transparence des états financiers.

Quelles sont les principales techniques permettant d’évaluer la juste valeur ? Certaines méthodes doivent-elles être préférées à d’autres ?

IFRS 13 stipule que les techniques d’évaluation utilisées doivent être compatibles avec une ou plusieurs des trois approches suivantes : l’approche de marché, l’approche par le résultat (actualisation des flux de trésorerie) et l’approche par les coûts.

Par ailleurs, IFRS 13 hiérarchise explicitement les justes valeurs selon les données d’entrées des techniques d’évaluation utilisées :
- Les données d’entrée de niveau 1, au plus haut de la hiérarchie, correspondent aux cours sur des marchés actifs pour des actifs ou des passifs identiques, sans aucun ajustement ;
- Les données d’entrée de niveau 2 sont des données concernant l’actif ou le passif, autres que les cours du marché inclus dans les données d’entrée de niveau 1, observables directement ou indirectement et pouvant nécessiter la prise en compte d’ajustements ;
- Les données de niveau 3 comprennent les autres données, par définition non observables.

Les techniques d’évaluation de la juste valeur devront donc maximiser l’utilisation de données d’entrée observables pertinentes, et minimiser le recours aux données d’entrée non observables. Dans la pratique, la ou les approche(s) retenue(s) dépendront à la fois des données d’entrée observables disponibles et de la nature de l’actif ou du passif considéré.

Cette hiérarchisation des justes valeurs introduite par IFRS 13 renforce ainsi la prévalence des données de marché sur les autres données d’entrée, bien que celle-ci existait déjà implicitement dans certaines normes existantes (notamment IAS 39 Instruments financiers : comptabilisation et évaluation).

Quelles sont les nouvelles exigences requises pour les entreprises ?

IFRS 13 introduit tout d’abord de nouvelles exigences en termes de modalités d’évaluation de juste valeur. Outre la hiérarchisation des justes valeurs suivant les données d’entrées utilisées, les évolutions significatives concernent notamment les actifs financiers. On peut citer par exemple la généralisation de l’interdiction des décotes de bloc, l’utilisation du prix dans l’écart acheteur-vendeur qui reflète le mieux la juste valeur dans les circonstances ou encore les restrictions apportées à la valorisation de portefeuilles sur la base de la position nette.

La nouvelle norme généralise également le concept d’utilisation optimale pour tous les actifs non financiers, ce qui pourra avoir dans certains cas un impact significatif et imposera une réflexion à l’entreprise, notamment en ce qui concerne les actifs immobiliers ou d’éventuels actifs défensifs. En outre, dans le cas où l’utilisation par l’entreprise diffère de l’utilisation optimale, ce fait ainsi que les raisons l’expliquant doivent être mentionnés dans les états financiers.

Enfin, IFRS 13 impose de nouvelles exigences d’information pour chaque catégorie d’actifs et de passifs évalués à la juste valeur. On peut noter parmi les plus significatives les obligations de mentionner le niveau auquel chaque juste valeur est classée dans la hiérarchie (niveau 1, 2 ou 3), une description des techniques d’évaluation et des données d’entrée utilisées, ou encore un ensemble d’informations spécifiques pour les justes valeurs de niveau 3 tels qu’une description détaillée du processus d’évaluation suivi, une analyse de sensibilité aux données d’entrée non observables retenues, un rapprochement entre les soldes d’ouverture et de clôture, ainsi que l’impact sur le résultat net ou les autres éléments du résultat global de l’entreprise.

Quelles sont les conséquences pour les entreprises ? Dans quelle mesure cette nouvelle norme va-t-elle impacter les états financiers et la préparation du Rapport Annuel ?

En pratique, les conséquences seront très variables en fonction des entreprises et des actifs ou passifs évalués à la juste valeur. Pour beaucoup d’entreprises, IFRS 13 n’entraînera finalement pas d’évolution majeure dans la mesure où la plupart des techniques d’évaluation couramment utilisées, mises en œuvre dans les règles de l’art, sont en fait déjà conformes à IFRS 13. Dans ce cas, le principal impact se trouvera généralement limité à l’information supplémentaire à fournir dans le Rapport Annuel, si l’entreprise ne la mentionnait pas déjà. En outre, un point important est que cette obligation d’information supplémentaire ne s’applique pas aux tests de dépréciation réalisés sous IAS 36.

En revanche, certaines entreprises seront plus largement impactées par la norme. Les institutions financières pourront par exemple constater des impacts significatifs suite à l’application des nouvelles dispositions sur les décotes de bloc, l’utilisation du prix dans l’écart acheteur-vendeur qui reflète le mieux la juste valeur dans les circonstances ou encore les restrictions apportées à la valorisation de portefeuilles sur la base de la position nette.

Dans tous les cas, les entreprises ayant recours à des estimations en juste valeur devront procéder à une revue de leurs pratiques habituelles en la matière afin d’identifier d’éventuelles divergences avec la nouvelle norme. Le recours à un cabinet d’évaluation spécialisé permet également de bénéficier d’estimations de justes valeurs en tous points conformes aux dispositions de la nouvelle norme : cette démarche parait d’autant plus pertinente que l’on peut désormais s’attendre à une attention toute particulière des commissaires aux comptes quant aux actifs et passifs évalués à la juste valeur.

Yann Magnan et Amaury Wernert
Duff & Phelps

Vendredi 14 Décembre 2012




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