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Faillite d’entreprise en temps de crise : fatalité ou mal profond ?

Si certains pays d’Europe, comme la France, connaissent une amélioration sur le front des faillites, d’autres, comme la Belgique, ont connu le mois dernier un nouveau nombre record de défaillances. Ainsi, pour cette dernière, pas moins de 905 entreprises ont dû mettre la clé sous la porte. Cela représente une augmentation de 6,8 % par rapport à la même période en 2009, pourtant année record.


Pourtant on est en droit de se poser la question de savoir si ces chiffres sont dus à la faiblesse du contexte économique actuel, ou s’ils résultent d’un mal plus profond.

La réponse est nuancée.
Certes la situation économique actuelle est particulièrement défavorable aux entrepreneurs. La confiance des patrons en l’économie peine à revenir et les consommateurs sont inquiets pour leur avenir professionnel et donc personnel. Dans le même temps, les banques rechignent à rouvrir les vannes du crédit, oubliant que beaucoup d’entre elles ne doivent leur survie qu’à l’intervention de l’Etat.
Dans ce contexte particulièrement maussade, l’équation est simple pour l’entrepreneur :
Pas de clients – pas d’argent qui rentre – épuisement des réserves propres – cessation de paiement.

Pourtant, en analysant d’une part les causes de faillites(1) , et d’autre part le comportement des entrepreneurs au quotidien, on peut clairement identifier 5 facteurs intervenant dans le processus de défaillance :

1. La mauvaise gestion : cette notion regroupe non seulement la mauvaise gestion quotidienne (au niveau administratif), mais également, et c’est plus grave, le manque de vision stratégique de l’entreprise. Trop d’entrepreneurs partent à l’aventure sans connaître les paramètres intervenant dans leur marché. Ils se contentent d’être réactifs face aux évènements et comptent sur la chance pour en sortir en cas de problème. On est parfois surpris du nombre d’entre eux qui n’ont aucune vision claire de leur activité d’ici 3 à 5 ans.
Pire, ceux qui ont un objectif clair sont parfois incapables de dire quels sont les moyens qu’ils vont devoir mettre en œuvre pour l’atteindre. Ce manque de vision peut à lui seul expliquer un certain nombre de défaillances, mais certainement pas toutes, car le danger vient parfois de là où on ne l’attend pas.

2. Dès la mise en route du projet, des vices peuvent survenir. On pointera ici les business plans mal ficelés, et surtout les mauvais conseils de «spécialistes». Lorsqu’un indépendant consulte un professionnel (comptable, avocat, banquier…), ce dernier doit prendre le temps de placer son client au milieu d’un tout. Ce tout sera composé non seulement de l’activité (existante ou à créer), mais également des contextes privés et professionnels dans lesquels il va évoluer.
Cette approche permettra à l’indépendant à la fois d’avoir une vision claire de son activité à court, moyen et long terme, mais également d’être protégé en cas de défaillance, voire de faillite malheureuse. Combien de drames se sont ainsi joués, simplement parce que l’entrepreneur s’est retrouvé seul et mal protégé lors d’un coup dur (crise économique, clients défaillants, maladie…).
Un curateur a dit un jour : «un entrepreneur entouré d’un bon avocat et d’un bon comptable n’a rien à craindre». Combien d’entrepreneurs peuvent-ils affirmer être correctement conseillés ?

3. Un autre élément qui ressort de plus en plus actuellement est le manque de connaissance, voir de respect, de la clientèle. Plusieurs entrepreneurs, évoluant dans des secteurs différents, me disaient récemment qu’il était de plus en plus difficile d’obtenir des devis, parfois importants, dans des délais acceptables (si tant est qu’ils les reçoivent un jour). Alors, manque d’intérêt de la part des fournisseurs ? Pas si sûr.
Les mailings, postaux ou électroniques, ont rarement été aussi nombreux et les réunions d’affaires et autres salons se multiplient souvent avec succès.
Il faudrait donc revenir à l’essence même des affaires : le client.
Qui est-il ? Que veut-il ? Que peut-on lui proposer ? A quelles conditions ?
Sans en arriver à des services sur mesure, rapidement ingérables au-delà d’un certain nombre de contacts, la culture du client doit se repositionner dans l’entreprise comme la base de toute stratégie. En d’autres termes le matraquage publicitaire à outrance a-t-il encore réellement de l’effet dans le contexte actuel ?
Toutefois, deux dérives seront à éviter lors d’un repositionnement:
- prendre de nouveaux clients sans se soucier de la solidité financière de ceux-ci (des précautions parfois élémentaires peuvent être prises tant pour les clients particuliers que pour les entreprises) ;
- viser sans cesse l’accroissement du portefeuille clients, sans avoir la certitude de pouvoir faire face à un afflux soudain de commandes. Rien n’est plus dévastateur en termes de notoriété que d’inspirer confiance à un client et de le décevoir.

Dans les deux cas, une stratégie clairement définie, soutenue par quelques outils efficaces, permettra d’affronter une période morose et de la traverser en limitant le risque de casse au maximum.

4. La personnalité même de l’entrepreneur. Il est récurrent de trouver, dans les greffes des Tribunaux de commerce, des indépendants venant déposer le bilan de leur entreprise en pensant avoir tout fait pour la sauver. Pourtant, à l’analyse du dossier, on constate que dans près de 50% des cas, l’entreprise aurait pu être sauvée si son gérant avait fait appel à un professionnel des entreprises en difficulté plus rapidement. Pour rappel, les premiers symptômes d’une faillite « normale » (donc sans fraude sous jacente), peuvent apparaître près d’un an à l’avance.
Hélas, l’individu a encore trop souvent le réflexe malheureux de taire ses problèmes et d’espérer, comme expliqué plus haut, le petit brin de chance qui le tirera d’affaire. Or tout le monde sait que la chance est l’aide qu’attendent les inconscients…
Des centres pour entreprises en difficulté fournissent pourtant pistes et conseils juridiques ou financiers, mais ils sont encore largement sous-utilisés. De plus, des professionnels du droit ou du chiffre proposent des panoplies de services relativement peu coûteux destinés aux entreprises de toutes tailles. Reste à ces dernières de faire le premier pas lorsque les premiers nuages apparaissent.

5. Le dernier élément est externe à l’entreprise, car il réside dans les législations, parfois désordonnées ou incohérentes, mises en œuvre par l’Etat.
Ainsi, l’excusabilité quasi automatique des faillis, permet à des indépendants ayant de graves lacunes en matière de gestion, de redémarrer de nouvelles activités sans soucis et sans trop se soucier des créanciers lésés.
Les procédures de réorganisations judiciaires créent elles aussi une grande insécurité juridique chez ces mêmes créanciers. Pourtant, le but est louable : geler le passif des entreprises en difficultés pendant un laps de temps défini, afin de leur permettre de se restructurer au mieux. Malheureusement, l’image donnée à cette procédure dans les médias ne fait que renforcer la méfiance envers ces entreprises pourtant demandeuses du « coup de main » nécessaire.

Ces deux exemples font partie d’une série de lois certes généreuses, mais qui participent à la frilosité des banques et des bailleurs de fonds de tous ordres.

L’avenir est-il pour autant si sombre ?
La réponse est heureusement non. Même si, crise oblige, le nombre de créations d’entreprises a connu une chute en 2009 (-10,35 %) par rapport à 2008, la tendance est repartie à la hausse en 2010 (+ 4,85 % par rapport à la même période en 2009). Dans le même temps, les formations aux techniques de management et à l’entreprenariat font le plein tandis que les pouvoirs publics mettent régulièrement en œuvre de nouvelles politiques d’incitation à l’entreprenariat.
Un seul bémol dans ce paysage : les lourdeurs administratives de toutes sortes ont connu elles aussi un développement constant, et les professionnels du chiffre (comptables ou experts comptables externes) en sont arrivés à sélectionner qualitativement leurs clients.
En d’autres termes, les clients ayant des dossiers « tranquilles » et réglant les honoraires sans discuter sont souvent traités en priorité…
Pire, il a été rapporté à plusieurs reprises que des bureaux de comptabilité se dessaisissaient de dossiers dès l’apparition des premiers symptômes de difficultés dans le chef de leur client, suivant ainsi une recommandation de leur institut de tutelle.
Dans un tel contexte, il est plus que temps que ces organismes se rendent compte que les entrepreneurs ont des attentes de plus en plus vastes, et que la déontologie devrait être élargie (sans excès) afin de répondre au mieux aux attentes d’un marché de plus en plus complexe.

1. Het bedrijf in moeilijkheden voorbij, Eric VandenBroele en collaboration avec les étudiants de Lessius Departement Handelswetenschappen, mars 2008. Etude disponible uniquement en néerlandais sur le site www.graydon.be.

Jeudi 4 Novembre 2010




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