Bad news is bad news

Lettre du vendredi 29 juillet 2022 rédigée par Eric Galiègue - VALQUANT.


Eric Galiègue
Depuis de nombreuses années, une expression a été communément utilisée pour expliquer la hausse du cours des actions malgré l’annonce d’une mauvaise nouvelle : « Bad news is good news ». En d’autres termes, les mauvaises nouvelles de l’économie réelle sont transformées en bonnes nouvelles pour la sphère financière. La dégradation de l’activité et la montée des risques dans le monde réel se traduit par une sur réaction monétaire qui fait monter le cours des actions. C’est l’année 2020 qui a donné l’exemple le plus impressionnant de ce phénomène : la « very bad news » d’un arrêt volontaire et total de l’économie, et d’un risque de catastrophe sanitaire, s’est traduit par une « very good news », une importante hausse des cours à Wall Street. Il est vrai que la réponse des autorités monétaires et gouvernementales a été particulièrement claire et efficace : les mesures de soutien à l’économie et de création de monnaie ont totalement annulé l’impact de la pandémie sur l’économie. Aujourd’hui, alors que le second semestre 2022 est bien entamé et que se profile 2023, nous considérons que cette règle ne fonctionne plus. Ce n’est manifestement pas ce que pense le marché, puisque Wall Street a fortement progressé au cours des deux dernières séances. La hausse du risque récessif, et la mauvaise nouvelle que constitue la hausse des taux de 75 pb annoncée par la Fed et surtout son discours agressif sur la lutte contre l’inflation n’ont pas entamé l’optimisme des investisseurs. Pourtant, une nouvelle hausse des taux de 75 pb est probable en septembre. Le risque récessif a beaucoup augmenté, et manifestement les investisseurs envisagent des conditions monétaires plus favorables, qui permettront une reprise du cours des actions.

Nous n’y croyons pas et considérons que désormais « bad news is bad news ». Nous le pensons pour 4 raisons.

1/Les banques centrales n’alimentent plus l’hyperliquidité. Il n’aura échappé à personne que les principales banques centrales de la planète ont commencé en 2022 un cycle de restriction monétaire. Seule la banque du Japon continue à mettre en œuvre une politique de « Quantitative Easing » pour contrôler les taux de marché à 10 ans. Cela permet des opérations de carry trade qui ont probablement largement financé le rebond des marchés en juillet. Mais globalement, la Fed depuis début juin et la BCE depuis début juillet ne sont plus en mode Quantitative Easing, ce qui a accompagné le phénomène de hausse des taux de marché.

2/Les obligations offrent désormais une alternative crédible aux actions. Le niveau atteint par les taux de marché, même après la baisse de 50 pb du mois coulé, sont désormais attractifs. Ces taux, rappelons-le, sont au plus haut depuis quasiment 10 ans. Leur normalisation, fonction de l’attitude des banques centrales, n’est probablement pas terminée.

3/L’inflation est devenue un vrai sujet, pour la première fois depuis très longtemps. Les ruptures d’approvisionnement et les pénuries induisent des nouveaux comportements d’achat préventifs qui sont la base de la « prophétie auto réalisante ». La situation de quasi plein emploi, aux USA comme en Europe, alimente la hausse des salaires. Le triptyque décarbonation, réindustrialisation et stress géopolitique est inflationniste. L’inflation « normative » est désormais autour de 4%, qui devient en quelques sorte un objectif pour les taux : voilà qui limite la conversion des « bad news » réelles en « good news » financières….

4/Les entreprises ne sont plus au paradis des profits. Les résultats publiés actuellement nous ont encore réservé de bonnes surprises pour de nombreuses entreprises. LVMH comme KERING, mais aussi Saint Gobain et Stellantis ont publié des résultats supérieurs aux attentes. L’effet $ y est probablement pour quelque chose, mais le contexte très favorable aux profits ne devrait pas durer. Entre la hausse des coûts des matières premières, la hausse des salaires et la baisse des volumes de production, les marges des entreprises devraient baisser. Si les analystes ne révisent pas en baisse 2022, ils le font pour 2023.

Au total, nous considérons que la dernière réaction haussière de Wall Street ne devrait pas durer. « Bad news is bad news ».



Recommandation investisseurs : nous sommes toujours en forte sous-pondération des actions pour un CAC 40 supérieur à 5 099 points.

Tendances sur les marchés de taux et de devises : Les taux des obligations d’Etat ont fortement baissé cette semaine des deux côtés de l’Atlantique. Le 10 ans US vaut 2,73%, le taux de l’OAT France 10 ans, 1,5%. L’€ a baissé de 0,7%.

Tendances récentes sur les matières premières : Le cours du pétrole a baissé, celui du cuivre a progressé.

Eric GALIEGUE
Analyste financier indépendant,

Président de VALQUANT EXPERTYSE SAS
Membre de l'AFITE
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Vendredi 29 Juillet 2022


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