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(5/20) Le grand écart (20 propositions)

Je suis toujours en mode réaction sur la nouvelle édition des 20 propositions pour réformer le capitalisme, dirigée par Cécile Renouard et Gaël Giraud. Je ne peux qu'être d'accord sur le diagnostic qu'établit Frédéric Baule (1) au chapitre 5 : l'écart entre les rémunérations les plus faibles et les plus fortes dans l'entreprise d'aujourd'hui est d'une inéquitable amplitude. Ni le salarié, ni son salaire ne doivent être une variable d'ajustement pour le seul profit des actionnaires. J'abonde aussi dans son sens quand il disqualifie la loi comme frein aux abus. Mais je ne peux pas souscrire à toutes ses préconisations. Je commentent ici celles qui m'interpellent le plus, à la lueur d'une actualité récente un peu touffue. Je cite :


Rémy Mahoudeaux
Rémy Mahoudeaux
i[« Dans l'entreprise [...]
2) privilégier la distribution d'actions gratuites au plus grand nombre possible de salariés pour en rémunérer la performance ;
3) rendre publics les montants globaux distribués au titre de la performance de l'entreprise, ainsi que la part attribuée respectivement aux dix bénéficiaires les plus importants et aux dix les plus modestes ;
[...] »]i

Les actions gratuites, je n'aime pas cela. C'est carrément une très mauvaise affaire pour l'entreprise : elle émet de nouveaux droits sur elle sans la contrepartie cash ou actif qu'en financier pragmatique j'aime que l'entreprise perçoive. De plus, quelle est la perception de la valeur d'une action qui vous a été donnée ? Par contre les stock-options sont un compromis intelligent qui gomme l'asymétrie socio-économique entre le salarié et l'actionnaire pour une efficace/efficiente association entre salarié et entreprise : l'étendue du patrimoine du salarié ne lui permettant pas (modulo certaines exceptions) de l'immobiliser ni de risquer de le perdre, il bénéficie du prix de la date d'attribution, et du crédit gratuit entre l'attribution et l'exercice, et enfin du droit de renoncer à exercer si l'intérêt n'y est pas in fine. Et je suis intrinsèquement favorable à des attributions d'options à tous les salariés, de façon systématique. Mais je trouve aussi légitime et équitable que l’ascension dans la hiérarchie permette de constater l'octroi de quotités croissantes de ces options, pour mieux rémunérer un couple (compétences ; responsabilités) plus rare : Il est plus efficace et pertinent d'aligner les intérêts des cadres et des dirigeants avec ceux de l'entreprise et ses actionnaires que ceux des ouvriers et employés.

Rendre public les montants globaux et ceux des tranches extrêmes : je serai beaucoup plus agressif, s'il ne tenait qu'à moi. Publier nominativement chaque année pour chaque individu les rémunérations en détaillant les parts fixes et variables, ainsi que la nature et la valeur des avantages en nature et les attributions de titres à leur valeur lors de l'émission. Ainsi, la direction aurait sur sa tête l'épée de Damoclès de l'émoi que provoquerait la rémunération objectivement et abusivement injuste. Mais c'est culturellement inacceptable dans notre société, et une trop grande publicité aurait peu-être comme effet pervers de générer chez les impétrants des efforts de benchmarking pas toujours honnêtes et in fine contre-productifs.

Le débat récent s'est focalisé sur la non-approbation par une assemblée générale des conditions d'indemnisation du départ d'un dirigeant, sans grande portée sinon symbolique. J'ai entendu à ce sujet les interventions d'Elie Cohen (2) et de Colette de Neuville (3) sur France Info les 31 Avril et 1er Juin. Je ne pense pas qu'il soit opportun de faire voter une assemblée générale sur la rémunération d'un dirigeant exécutif. C'est le travail essentiel du conseil d'administration de choisir, nommer, contrôler et sanctionner les exécutifs, et donc de les rémunérer. Ne les privons pas de cette tâche et de cette responsabilité. Par contre l'assemblée pourrait inscrire dans les statuts de l'entreprise un multiple maximum entre la rémunération complète du dirigeant ou du salarié le mieux payé et celle du salarié le moins rémunéré au sein des sociétés du groupe situées dans le même pays (il ne serait pas judicieux de mettre sur une seule échelle des salaires de pays trop dissemblables). Enfin l'idée de faire siéger au comité des rémunérations un ou des administrateurs salariés me semble bonne, pour les raisons énoncées au paragraphe précédent.

Mais malgré toutes ces réflexions et ces ébauches de solutions, rien ne remplacera la nécessaire triple introspection de celui qui décide, seul ou collectivement, de la rémunération : Suis-je juste ? Suis-je efficace ? Suis-je efficient ? Des questions qui rendent humble.

(1) Frederic Baule Bio : www.linkedin.com/pub/frederic-baule/40/784/264
(2) Elie Cohen Bio : fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89lie_Cohen_%28%C3%A9conomiste%29
(3) Colette de Neuville Bio : fr.wikipedia.org/wiki/Colette_Neuville

Rémy Mahoudeaux
Managing Director, RemSyx
Mail : boss(at)remsyx(dot)com
 
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Bonne lecture !

Mercredi 13 Juin 2012




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