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Une nouvelle classe d’actifs accessible aux épargnants : les entrepreneurs à fort potentiel !

Par Emmanuel GAUDE, associé chez Starquest Capital et Matthieu LANGEARD, associé chez Human Equity


Comment s’est faite votre rencontre ?

EG : Starquest Capital est positionnée sur le segment du « early development », c'est-à-dire du financement des PME à un stade de maturité encore faible, juste après l’amorçage, à un moment crucial où il faut passer de la bonne idée, du bon produit, au développement structuré. C’est généralement à ce moment que se révèlent les capacités, et les limites, de l’entrepreneur. Il est donc crucial d’en avoir une juste appréciation ! En capital-investissement le « facteur humain » fait 70% du succès de l’investissement. De toute évidence il existe différentes formes d’intelligence, et nous ne souhaitons pas nous limiter au syndrome typiquement français du 1er de la classe. Nous sommes convaincus que le talent, la fibre entrepreneuriale, concerne une population beaucoup plus large que celle qui s’est usé les pantalons et tailleurs sur les bancs des meilleures écoles. Nous voulons donner une chance à tout le monde. Mais comment apprécier de manière « rationnelle » et tendant à l’objectivité les vraies motivations de l’entrepreneur. Comment mesurer l’immatériel, cet actif intangible qu’est le talent du dirigeant ?

Bien sûr, nous savons valoriser et vérifier un parcours professionnel, un CV, bref, le passé. Nous pouvons ressentir s’il y a un bon « feeling » avec notre interlocuteur mais il nous est difficile d’aller au-delà. C’est pourquoi nous nous sommes mis en quête d’une aide extérieure pour accéder à une véritable qualification du potentiel entrepreneurial et des risques liés au dirigeant. Comme souvent, c’est par le biais des rencontres que nous avons déniché une pépite : un réseau de consultants ayant des outils RH adaptés au contexte de l’investisseur. Cette équipe d’une vingtaine de consultants basés à Londres, Paris et New York met notamment en œuvre une approche d’entrepreneurship intelligence développée par un français, Matthieu Langeard, suite à 15 ans d’une double pratique en investissement et en sciences humaines. Matthieu a mis au point (et testé) une méthode d’entretien et des indicateurs de valorisation des entrepreneurs lors d’un protocole de recherche réalisé au sein de l’équipe « Talents » d’AXA Investment Managers. C’est cette méthodologie de screening des entrepreneurs que nous utilisons aujourd’hui. L’idée fondamentale est de mieux connaître pour mieux accompagner. Bien sur, il ne s’agit que d’un outil d’aide à la décision car dans le champ de l’humain rien n’est fiable à 100%, et heureusement !

Alors Matthieu, parlez-nous de vos recherches et de la méthodologie prometteuse que vous en avez tirée.

ML : En plus de mon activité de conseil, pour stimuler mon travail de recherche et développement, et donner à cette aventure une dimension collective - détecter le potentiel entrepreneurial d’un porteur de projet est un peu le « graal » dans le monde économique ! - j’ai créé en 2009 un think-tank, « Finance for Entrepreneurs », dont la mission est de concevoir, valider et promouvoir des indicateurs de valorisation des entrepreneurs. L’objectif est que le facteur humain soit pleinement reconnu en capital-investissement. Il est donc question de la valorisation du capital-humain et plus précisément du capital-entrepreneur ! Ce laboratoire de recherche fait travailler bénévolement une trentaine de professionnels : entrepreneurs, capital-investisseurs, consultants RH et chercheurs. Chacun peut ensuite les mettre en œuvre dans sa pratique professionnelle. En ce qui me concerne, pour appréhender l’intangible, le potentiel entrepreneurial d’un dirigeant, je me suis focalisé sur le « cœur du réacteur ». En effet, les résultats des grandes études réalisées sur les qualités qu’ont en commun les meilleurs développeurs de start up se retrouvent dans le profil d’entrepreneurs de premier plan au niveau international : un tempérament de pionnier n’ayant pas peur de déplacer les règles, du leadership et beaucoup de créativité.

Au delà de cet inventaire bien balisé, ces qualités pointent une configuration intérieure bien connue en sciences humaines : une estime de soi forte et ouverte aux autres, autrement dit du narcissisme positif. Cette configuration clé n’est pas donnée à la naissance mais fabriquée par l’entrepreneur via la traversée de crises et des rencontres clés. L’accès à la gratitude - reconnaître que l’on ne s’est pas fait tout seul – est un marqueur de cette maturité de l’ego. Pour tendre à saisir l’immatériel, objectiver la subjectivité, et prendre en compte la diversité et la complexité des personnes (seul gage d’efficacité), la recherche française en sciences humaines a réalisé des avancées majeures. Ce mouvement, dit postmoderne, est très connu dans les pays anglo-saxons sous le nom de french theory. Notre approche utilise plusieurs outils méthodologiques issus de ce mouvement comme la notion de transversalité : le maniement d’indicateurs enrichis par plusieurs champs des sciences humaines et qui balayent plusieurs régions de la personnalité de l’entrepreneur. Ces critères fonctionnent comme autant de fusées éclairantes qui tendent à donner une relative visibilité concernant la configuration intérieure que nous recherchons et préservent la diversité et la complexité des personnes.

L’évaluation est-elle objective ?

ML : La fonction de consultant RH consiste à se servir de sa subjectivité comme outil de rencontre et d’analyse tendant à l’objectivité. Nous souhaitons faire connaissance d'un sujet : l'entrepreneur. Il est donc nécessaire de l'aborder nous même en tant que sujet et non avec des objets (questionnaires, grilles d’analyse, outils de profiling,...). Nous avons besoin qu’il se déplie, bouge, évolue dans la relation pour découvrir sa façon de fonctionner et sentir ses motivations véritables. Ensuite seulement vient le temps de l’analyse et même du scoring. Tout cela nécessite du praticien des connaissances, du savoir faire et du savoir être. Les consultants de Human Equity sont nécessairement formés et très expérimentés dans ces trois domaines. Ils ont par ailleurs une connaissance approfondie du contexte d’investissement, le plus souvent grâce à leur double parcours en finance et en sciences humaines.

Selon vous quels sont les indicateurs du potentiel entrepreneurial ?

ML : Premier exemple d’indicateur, la convergence entre la trajectoire de vie et le projet. Nous interrogeons l’entrepreneur sur les moments et rencontres clés de sa vie ce qui permet trois niveaux d’analyse (approche biographique).
1/ Le dirigeant a-t-il identifié des moments et des rencontres clés dans son histoire de vie ? Si c’est « morne plaine » je ne peux pas faire mon travail… et ce n’est pas forcément bon signe…
2/ A-t-il une bonne capacité de mise en récit de ces moments et rencontres clés, peut-il délivrer une histoire de vie dynamique ? La capacité de mise en récit de l’entrepreneur est cruciale pour s’assurer de la continuité en période de crise. Un nouvel entrant, une nouvelle technologie sur son marché ? Après un moment de désorientation, comment va-t-il pouvoir recoller les morceaux pour bâtir une nouvelle histoire qui servira de guide à l’action, pour lui et pour son équipe ? Il est bien sûr question ici de leadership.
3/ Ce récit de vie intègre-t-il une dimension forte d’estime de soi ? Est-il profondément engagé et acteur de sa vie (héros) ? Il est question ici de charisme. L’accès à la dimension « mythologique » de la vie se distingue de la mégalomanie car il intègre le sens du collectif : le dirigeant est visiblement concerné/transcendé – à un degré ou un autre – par autre chose que sa propre personne.
4/ Dernier niveau d’analyse à partir de cette simple question : quel est le niveau de convergence entre sa trajectoire de vie et son projet car c’est alors que ce produit l’étincelle entrepreneuriale et c’est elle qui génère la motivation nécessaire à ce parcours du combattant : l’entrepreneur pourra tomber sept fois, et se relever huit, son enthousiasme intact !
Autre exemple de critère transversal qui pointe la même configuration intérieure recherchée : l’écosystème personnel et la transmission d’écosystème. « Quelles conditions de vie sont favorables à votre énergie ? » Biorythme, environnement géographique, relationnel… l’entrepreneur a-t-il identifié l’écosystème qui lui convient, facteur de durabilité ? Et aussi : « Qu’est-ce que vous savez que vous transmettez à votre équipe de cet écosystème personnel, sous forme de culture d’entreprise, de culture d’équipe ? » La réponse à cette question éclaire la façon dont le dirigeant se relie aux autres, et sa capacité de transmission, de management des personnes. Nous avons dix indicateurs de ce type. Certains sont plus évidents comme le rapport au jeu - « Qu’est-ce qui vous amuse dans votre parcours professionnel ? » - ou la génération et transformation d’idées - « Pourriez-vous me donner des exemples d’idées que vous avez eues dans votre vie et que vous avez réalisées ? » Pour neutraliser le syndrome du beau parleur (fiabiliser le recueil de données) et surtout approfondir la rencontre en faisant expliciter à l’entrepreneur des affirmations trop vagues, je me suis formé à une stratégie d’interview novatrice : l’Entretien d’explicitation.

Chez Starquest Capital, avez-vous déjà expérimenté cette approche de management assessment et comment cela a-t-il été perçu par les entrepreneurs, n’est-ce pas une méthode trop inquisitrice ?

EG : Nous avons réalisé plusieurs investissements pour lesquels nous avons utilisé cette approche de due diligence RH. Bien sur, nous étions un peu inquiets de l’accueil que réserveraient nos entrepreneurs à cette approche. Pour qu’elle soit efficace, il fallait qu’ils jouent le jeu et ne considèrent pas cette étape comme un gadget… ou une psychanalyse ! Car c’est tout sauf cela. Nous ne souhaitons pas savoir pour qui ils votent ou s’ils ont eu une enfance malheureuse ! Par contre nous cherchons à valider que le projet entrepreneurial est profondément ancré dans la colonne vertébrale de l’entrepreneur, qu’il est la résultante d’un parcours et de rencontres fortes. Bref, qu’il ne s’agit pas d’un projet purement opportuniste. Nous recherchons des ego forts et ouverts aux autres. Une réelle capacité à gérer le succès comme les échecs. Pour reprendre une image de Matthieu, dans la famille des flibustiers, nous préférons le « corsaire » au « pirate », car s’ils sont tous les deux créatifs, audacieux et charismatiques, l’un reste fidèle au Roi (les actionnaires) et pas l’autre !!

Matthieu, avez-vous des astuces pour mettre à l’aise les entrepreneurs ?

ML : Les entrepreneurs sont plutôt contents de parler d’eux et l’essentiel est fait par l’équipe d’investissement dans la façon de présenter entretien d’assessment. Human Equity est attentif à ce que ses outils ne servent pas un degré supplémentaire d’instrumentalisation des hommes. L’éthique évidente avec laquelle Emmanuel Gaudé et Arnaud Delattre font leur métier est primordiale pour nous. C’est le meilleur garant d’une perception juste par l’entrepreneur de notre approche. L’équipe d’investissement de Starquest Capital a la conviction que le talent de l’entrepreneur fait l’essentiel de la réussite d’un projet. Les dirigeants peuvent l’entendre ! D’autant plus que cet audit RH avant investissement, tout le monde y pense, mais peu de fonds osent le faire.
La démarche de Starquest Capital est donc perçue comme légitime et différenciante : « enfin une équipe qui ne fait pas que dire que le facteur humain et important mais qui en tire les conséquence et sait s’entourer… » nous disent les entrepreneurs. D’autant plus qu’Emmanuel et Arnaud ne sont pas du tout dans une logique d’évaluation dure des entrepreneurs. Ils veulent mieux les connaître pour mieux les accompagner. Autre argument de poids qui facilite l’adhésion des entrepreneurs c’est la nécessité de mettre dans la boucle un consultant RH dès le départ pour qu’en cas de crise de confiance il puisse intervenir rapidement et en ayant déjà une bonne connaissance du contexte. Du point de vue de la méthodologie d’entretien aussi le respect et la confiance sont au centre. Je me présente de façon très personnelle en confiant à l’entrepreneur quelques moments clés de ma vie, en lien avec cette approche.
L’objectif est de nous sortir rapidement du formalise « corporate » pour faciliter la rencontre sur le plan humain. Au bout d’une heure et demie d’entretien je fais un feedback en transparence à l’entrepreneur. Je lui dis tout : pourquoi je lui ai posé ces questions, ce que j’ai trouvé dans ses réponses et là où je manque encore de visibilité. C’est d’abord une question de respect : je sors de la position d’observateur et je me mouille ! C’est aussi une invitation à réagir et compléter. Il s’implique dans l’évaluation et la production d’information change d’angle. C’est quasiment un deuxième entretien. Cette méthodologie nécessite une expérience très confirmée de la relation d’aide et de l’accompagnement individuel car le choix du vocabulaire est crucial pour que le dirigeant puisse s’approprier ce qui est évoqué sans le rejeter ou être blessé. C’est une approche humaniste qui met le développement personnel au centre et aucune limite possible de l’entrepreneur n’est évoquée sans l’articulation dynamique et positive qui va avec.

Emmanuel, comment évaluez-vous cette nouvelle brique de compétence ?

EG : En fait, nous sommes extrêmement satisfaits et ce, pour plusieurs raisons :

- Les entrepreneurs ont joué le jeu et ont tous été ravis de l’avoir fait. Ils confirment l’utilité d’une meilleure connaissance de leurs qualités mais également de leurs points à surveiller, et surtout de l’articulation dynamique entre les deux. Matthieu ne réalise pas seulement une photo des points forts et des faiblesses, il souligne les lignes de force et la cohérence globale. L’appréciation est dynamique et pointe clairement les axes de développement personnel. Sa profonde connaissance des ressorts entrepreneuriaux a impressionné nos dirigeants et les a informés sur cette fonction professionnelle très particulière.

- L’apport de cette méthode dans notre processus de sélection a trouvé sa place et s’inscrit pleinement dans notre volonté de mieux connaitre nos entrepreneurs pour mieux les accompagner et ainsi de créer un lien plus fort.

- Nous nous sommes aperçu que l’outil est bien plus riche que nous le pensions au départ. Nous recherchions un outil d’aide à la décision et au final nous avons trouvé des ressources de pilotage de la relation avec l’entrepreneur sur toute la durée de notre investissement. Matthieu nous a permis d’établir une feuille de route avec un certain nombre de points à surveiller - la gestion des conflits pour l’un, la capacité à déléguer pour l’autre,… - ainsi que tout un ensemble d’outils RH qui nous permettent de gagner du temps, de la confiance et donc de créer de la valeur ajouté.

Comment envisagez-vous 2010 ?

EG : Nous allons continuer à systématiser cette approche sur l’ensemble de nos investissements. Avec Matthieu et son équipe à Paris, nous avons trouvé un partenaire créateur de valeur. Au delà de 2010, notre ambition est de créer un écosystème autour de notre portefeuille d’entrepreneurs, et pas seulement dans le domaine RH, afin de sécuriser et stimuler leur développement.

ML : Nous allons proposer à Starquest Capital de faire un pas de plus dans la matérialisation de leurs convictions et d’inscrire dans leur pacte d’actionnaire un budget annuel de conseil RH sous forme de pourcentage de l’investissement que l’entrepreneur devra utiliser. En effet, les dirigeants sont trop souvent captés à 200% par le « day-to-day » et ils ont tendance à oublier eux-mêmes que le développement du capital-entrepreneur de leur société est le premier facteur clé de son succès !

Dimanche 30 Mai 2010




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