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Sous-traitance : Jean-Claude Volot au rapport !

« Comment ne pas vouloir ce que veut l’ordre des choses ? »
NDLA
« Une stratégie industrielle ne peut en effet pas se réduire à une stratégie d'achat, elle-même réduite à la compression des prix. Il faut également bâtir dans notre pays des filières, des écosystèmes, qui permettront les vrais gains de productivité. Les grands groupes doivent se sentir une responsabilité dans l'animation des filières industrielles dont ils sont les leaders ».
Jean-Claude Volot, Médiateur des relations inter-entreprises et de la sous-traitance


Thierry Charles
Thierry Charles
« Médiateur de la sous-traitance: des sanctions et une loi cadre », titrait dès le 31 août « l’Usine nouvelle ». Les « Echos » prenait le relais dès le lendemain dans un article sous forme de point de vue : « Sous-traitance : l’indispensable réforme », où l’auteur de cette chronique précisait : « il faut veiller à la mise en place d’un nouveau cadre législatif permettant un rééquilibrage véritable des relations entre donneurs d’ordre et sous-traitants ». (1)

Le médiateur de la sous-traitance, Jean-Claude Volot, remettait en effet le 30 août 2010 son rapport sur « le dispositif juridique concernant les relations interentreprises et la sous-traitance », cette livrée de servitude. (2)

Par lettre du 22 juin dernier, il lui avait été demandé par le Ministre chargé de l’Industrie, Christian Estrosi et le Secrétaire d’Etat, chargé du commerce, de l’artisanat, des PME, du tourisme, des services et de la Consommation, Hervé Novelli, d'examiner les pratiques de la sous-traitance au regard des règles du droit et d’étudier l'opportunité d'engager une modification de la législation qui lui est applicable. (3)

En synthèse, le médiateur recommande dans ses conclusions de ne pas réformer la loi de 1975 « qui donne toute satisfaction au secteur du BTP, pour lequel elle a été conçue à l'origine », (et qui ne concerne les autres secteurs d'activité qu'à la marge), ce dont s’est immédiatement félicitée la fédération du BTP, attachée à la loi du 31 décembre 1975.

Dans un article du « Moniteur », en date du 31.08.2010, la FFB estime que « Jean-Claude Volot a bien compris la spécificité de notre secteur. Même si tout n'est pas rose dans nos relations de sous-traitance, les textes existant fonctionnent plutôt bien, et il paraît judicieux de réserver les évolutions de la réglementation aux entreprises industrielles.» (4)

Toutefois, le rapport préconise de mieux faire appliquer les textes et constatant que l'arsenal juridique existant prohibe déjà la plupart des mauvaises pratiques rapportées par les sous-traitants, le médiateur de la sous-traitance propose au gouvernement une démarche en plusieurs étapes.

Tout d’abord, il s’agirait de compléter le dispositif actuel par des sanctions appropriées. En effet, le document passe en revue l’ensemble du dispositif législatif en vigueur en matière de sous-traitance (code civil, loi de 1975, articles L. 441-6 et L. 442-6 du code de commerce, loi Gayssot, etc.) ainsi que son application et recense de manière non exhaustive, trente-cinq pratiques abusives stigmatisées notamment par la Commission d’Examen des Pratiques Commerciales (CEPC° qui sont autant d’entorses aux lois existantes.

A cet égard, Jean-Claude Volot ne manque pas de pointer du doigt la défaillance de l'Etat, qui n'a pas su ou voulu utiliser les moyens d'action dont il dispose, alors que les sous-traitants croient encore trop souvent à la réalité de leur faute pour pouvoir agir : « (…) avant de légiférer, il faut commencer par faire appliquer la loi, telle qu'elle existe aujourd'hui, même si un certain nombre d'articles demandent à l'évidence à être modifiés, complétés ou précisés ».

Ensuite, le rapporteur propose une nouvelle loi cadre, sur le modèle de la loi italienne du 18 juin 1998 sur la sous-traitance, qui « définisse les relations interentreprises industrielle et fixe les grandes orientations pour lutter contre les mauvaises pratiques dans ce domaine », une loi qui fixe les grandes orientations comme l’obligation d'établir un contrat écrit, une présomption d'acceptation des sous-traitants connus du donneur d'ordres, le respect des droits de propriété intellectuelle, ou encore l’interdiction de clauses répertoriées comme abusives, etc. (5)

Ce nouveau dispositif permettrait selon Jean-Claude Volot, « de rendre le droit applicable aux relations interentreprises industrielles plus visible et plus lisible » et surtout d’éviter de répondre au cas par cas à de simples préoccupations sectorielles : un jour le bâtiment, le lendemain les transports routiers, le secteur du luxe, ou encore la grande distribution, etc.

En pratique, cette recommandation nécessiterait la désignation ou la mise en place de structures de régulations, qui pourraient s’inscrire dans le cadre de la politique de filières voulue par le gouvernement.

Il conviendrait également, à l’instar des professions du BTP qui ont su, selon le médiateur, «s'organiser pour établir en leur sein des relations apaisées et régler en interne et par la voie de la conciliation la plupart des conflits qui peuvent naître entre leurs adhérents », de développer les bonnes pratiques au sein des branches professionnelles. (6)

Il faut selon lui « faire monter en puissance la médiation interentreprises industrielles et de la sous-traitance, en la dotant de pouvoirs, et inciter les branches professionnelles à développer une médiation interne. La médiation offre en effet l'énorme avantage de laisser la relation client-fournisseur dans le cadre contractuel et de ne pas la porter immédiatement au niveau contentieux. (…) Il faut aussi veiller à ce que les chartes de bonnes pratiques, qui se sont multipliées, ne restent pas incantatoires mais connaissent une réelle mise en œuvre ».

L’Etat souhaite multiplier à l’avenir les structures de médiation qui servent ainsi d’aiguillon envers des entreprises qui restent cependant encore très partagées sur ce mode d’intervention, (7) échaudées par l’inertie de ces instances notamment dans le secteur automobile qui a créé le Centre de médiation de la filière automobile.

Il appartient désormais au gouvernement de définir les solutions qui lui paraissent les plus opportunes. Dans un communiqué de presse, Christian Estrosi et Hervé Novelli ont d’ailleurs déclaré « accueillir favorablement les propositions du rapport Volot ». (8)

Une « large consultation » est d’ores et déjà engagée avec les acteurs industriels et les organisations professionnelles et syndicales, sur les suites concrètes à donner aux conclusions et recommandations du rapport.

Les arbitrages devront être rendus d'ici la fin octobre 2010. La bataille s’annonce difficile, mais à défaut d’actions concrètes, le temps viendra pour les sous-traitants d’abandonner le terrain pour des démêlés d’une politique industrielle dont ils ne se sentiront plus solidaires.

(1) Lire « Sous-traitance : l’indispensable réforme », Thierry Charles, Les Echos, 1er.09.2010, p.15.

(2) Voir http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/104000462/

(3) Il a ainsi procédé à une large consultation des organismes professionnels intéressés, et notamment l’auteur de cette chronique en tant que représentant de la Fédération de la Plasturgie. Il a pu constater que les parties en présence étaient « loin d'avoir un avis uniforme sur la question », ce qui augure déjà des débats à venir.

(4) Voir http://www.lemoniteur.fr/161-marches-prives/article/actualite/767286-remise-du-rapport-volot-sur-la-sous-traitance-la-loi-de-1975-serait-preservee

(5) Sont également évoqués une évolution nécessaire de la clause de réserve de propriété et le problème spécifique des approvisionnements en matière premières qui a alimenté le débat de l’été 2010. Lire « Des puces au nylon, les pénuries ponctuelles se multiplient dans l'industrie », Les Echos, 15/06/2010.

(6) A titre d’exemples : rédaction et diffusion de contrats type de sous-traitance ou de chartes de comportement, actions de sensibilisation et de formation, mise en place de structures de médiation, etc.


(7) Lire « Crédit, tourisme, consommation : l’Etat médiateur s’agrandit », Les Echos, 11.08.2010.

(8) Lire communiqué http://www.economie.gouv.fr/discours-presse/discours-communiques_finances.php?type=communique&id=4530&rub=1


Thierry CHARLES
Docteur en droit
Directeur des Affaires Juridiques d’Allizé-Plasturgie
Membre du Comité des Relations Inter-industrielles de Sous-Traitance (CORIST) au sein de la Fédération de la Plasturgie
et du Centre National de la Sous-Traitance (CENAST)
t.charles@allize-plasturgie.com

Dimanche 5 Septembre 2010




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