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Quel Jedi contre Dark Pool ?

Je sais, le nom du vrai méchant de la saga Star Wars est Darth Vader, aka Anakin Skywalker … mais sa francisation est Dark Vador, d'où ce titre facétieux pour rebondir au sujet d'articles de la Tribune (1) en date du 21 et 30 octobre qui évoquent les inquiétudes des régulateurs face à l'évolution de la part de marché des dark pools, ces « bassins sombres » où s'échangent des titres dans une certaine opacité, qui est passée en Europe de 2,8 % à 5,84 % en 2 ans. L'idée des régulateurs est de capper à 4 % la part de marché quotidienne des échanges réalisés sur ces dark pools.


Rémy Mahoudeaux
Rémy Mahoudeaux
Laissez-moi chausser mes sabots pleins de paille de financier d'entreprise pas sophistiqué pour un fifrelin (2) avant de vous faire part des commentaires et questions sans doutes déplacés qui me sont inspirés par ces informations …

Une question de candide : les régulateurs ont-ils à se soucier des parts de marché respectives des bourses et systèmes alternatifs de cotation ? Ne doivent-ils pas se borner à constater (ou non) que leur fonctionnement répond aux lois et règles de place édictées ?

Un opérateur de marché procure un service marchand qui doit être ouvert à la concurrence. Soit. C'est le credo en vigueur qui a justifié de l'autorisation des dark pools (ou suivant la terminologie « système multilatéral de négociation »). Une bourse, ce n'est, après tout qu'un prestataire de service informatique qui apparie des ordres d'achats et de ventes d'un titre tout en fixant un prix pour ces transactions, et qui communique à l'ensemble du marché les données du carnet d'ordre. Mais du fait des désordres publics qu'une telle activité peut engendrer (évoquons ici le jeudi noir de 1929), il convient qu'elle soit réglementée, entre autre afin d'assurer une transparence suffisante envers tous les acteurs de ce marché. Pourquoi alors une bourse historique serait-elle dans l'obligation de publier en continu ce qu'un dark pool ne publie qu'après la clôture ? C'est, il me semble, une choquante asymétrie entre les prestataires de ce service de cotation. La vraie concurrence serait que chacun doive publier en temps réel les mêmes informations et avec le même niveau de détail.

Capper arbitrairement la part de marché des dark pools à 4 % par jour m'intrigue. Pourquoi 4 % ? Ce n'est, à mon avis, pas de la vraie concurrence que d'imposer à un groupe de prestataires de rester collectivement en deçà d'un seuil dépendant d'une activité globale et des volumes traités par les confrères. Cela suppose aussi des échanges d'information en temps réel pour calculer le dépassement de ce seuil, et encore la possibilité d'allumer et d'éteindre les dark pools peut-être plusieurs fois par jour en fonction de l'évolution de ce compteur de part de marché …

Je ne suis pas plus convaincu par la méthode australienne, soit l'obligation faite aux dark pools de n'effectuer de transaction que si le prix est supérieur à celui du marché organisé historique. Pourquoi introduire une telle contrainte ? Est-il logique qu'une seule et même chose prenne 2 valeurs différentes suivant qu'elle est échangée sur deux marchés différents ?

Dès lors qu'un émetteur a décidé de faire appel public à l'épargne et de se coter sur un marché organisé, il me semble logique qu'un engagement réciproque entre le « marché » et l'émetteur soit contractualisé puisque des contraintes sont induites de part et d'autres : il y a un client direct (l'entreprise émettrice), un prestataire (l'opérateur de marché) et des bénéficiaires induits : des investisseurs qui sont gratifiés d'un marché plus liquide et d'une infrastructure de place pour les règlements-livraisons. Est-il logique et pertinent qu'un système concurrent puisse offrir le même service aux investisseurs sans que l'émetteur n'ait à donner son avis ? Après tout pourquoi pas : l'entreprise n'est que le spectateur « passif » des transactions sur le marché secondaire, et si l'opérateur de marché qui n'est pas mandaté directement peut percevoir une rémunération suffisante chez ces investisseurs, libre à lui.

Comme le souligne l'article de la tribune, dès lors que les dark pools permettent de traiter des volumes de transactions qui sont cachés aux yeux des autres acteurs, il y a un risque de manipulation de marché, et les marchés ne peuvent plus se prétendre efficients. Une transaction de gré à gré aura certes le même effet : n'apparaître que tardivement et sans transiter par un carnet d'ordre connu du public, mais à aucun moment le marché ne peut prétendre à l'exclusivité de toutes les transactions sur un titre coté, et je n'imagine pas sur quel fondement juridique se baser pour interdire les transactions de gré à gré.

Dès lors, je pense que les Jedi-régulateurs feraient mieux d'uniformiser très strictement les obligations de tous les acteurs (bourses ou systèmes multilatéraux de négociation) de publier en continu et en temps réel toutes les données concourant à une réelle transparence/efficience des marchés et interdisant des asymétries. Sinon, le retour de sabre-laser sera une distorsion de la concurrence soit entre les opérateurs de marchés, soit entre les investisseurs eux-mêmes, ou encore il pourfendra l'entreprise dont le cours de l'action aurait été manipulé malgré elle du fait d'une persistance de cette asymétrie. www.latribun

(1) www.latribune.fr/entreprises-finance/banques-finance/industrie-financiere/20131018trib000791312/les-bourses-de-l-ombre-prosperent-en-europe.html et http://www.latribune.fr/journal/edition-du-3010/evenement/299360/les-dark-pools-ces-ovnis-qui-inquietent.html et http://www.latribune.fr/journal/edition-du-3010/evenement/299360/les-dark-pools-ces-ovnis-qui-inquietent.html
(2) ou Dataries ou Wupiupi ou Trugut ou Peggat qui sont les monnaies circulant dans la Galaxie, suivant Wikipedia



Vendredi 8 Novembre 2013




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