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Projet LAGARDE et délais de paiement : la caravane passe…

« Quand il ne reste plus que le pouvoir du verbe, l’efficacité du discours tient à la qualité de son contenu ».
Alain ETCHEGOYEN


Thierry Charles
Thierry Charles
Dès le mois de février 2006, le Ministre délégué à l’Industrie de l’époque Monsieur François LOOS avait installé un groupe de travail sur l’amélioration des délais et des conditions de paiement dans la sous-traitance. Composée de représentants d’entreprises et d’établissements financiers spécialisés comme la Coface, Oséo…, cette commission était chargée d’émettre des propositions concrètes d’ici le mois de juin 2006, en constatant que le poids des créances clients dans le bilan des entreprises françaises représente environ 25% en moyenne, pour 12% en Allemagne et 10% aux Etats-Unis.

Le paradoxe est que si les mauvaises relations entre clients et fournisseurs pénalisent les PME sous-traitantes, inexorablement les acteurs se sont habitués aux conditions actuelles sans chercher à remettre en causes ces pratiques.

Or il y a bien urgence dans la mesure où le tissu industriel de PME sous-traitantes est aujourd’hui financièrement fragilisé. Le constat est clair, selon le Groupe des Fédérations industrielles (GFI) : les sous-traitants de l’automobile ou de l’aéronautique sont coincés entre le fait de devoir payer rapidement leurs propres fournisseurs dans un délai de 30 jours (et moins notamment la matière première) alors qu’ils doivent attendre plus de 90 jours avant d’être réglés par leurs clients.

A ce stade de notre raisonnement, on peut néanmoins s’étonner des disparités au sein des filières dans la mesure où - après la loi GAYSSOT (1) -, le lobbying des transporteurs routiers a su porter ses fruits avec le vote de la modification de l’article L.441-6 Code de commerce (Loi nº 2006-10 du 5 janvier 2006 art. 26 Journal Officiel du 6 janvier 2006) :

« (…) Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée. Contrairement aux dispositions de l'alinéa précédent, pour le transport routier de marchandises, pour la location de véhicules avec ou sans conducteur, pour la commission de transport ainsi que pour les activités de transitaire, d'agent maritime et de fret aérien, de courtier de fret et de commissionnaire en douane, les délais de paiement convenus ne peuvent en aucun cas dépasser trente jours à compter de la date d'émission de la facture (…) ».

Well done ! D’ailleurs, le projet LAGARDE sur la modernisation de l’économie en cours de discussion devrait s’inspirer de la « simplicité » de la mesure et étendre ce principe à l’ensemble des relations commerciales, plutôt que d’imaginer des dérogations sources d’interprétations diverses et variées de la part des grands donneurs d’ordre (voir notamment les textes « apocryphes » et notamment la nécessité de devoir rédiger un « mode d’emploi » ( !) pour l’application de l’accord relatif à la réduction des délais de paiement dans la filière automobile du 24 janvier 2007).

Dans l’attente, nos grands donneurs d’ordre doivent se préoccuper au plus vite du sort de leurs sous-traitants qui travaillent, produisent, achètent chaque jour sans qu’aucune forme de pouvoir ne leur permette d’exprimer leurs contributions aux succès de ces entreprises : cela commence par les conditions et les délais de paiement, mais également par une réflexion globale sur les relations commerciales et leurs abus, voire par une politique volontariste d’essaimage, d’accompagnement à l’international et dans la R&D, etc.

Et à cet égard, le concept « d’entreprise étendue », particulièrement développé dans les secteurs de l’aéronautique, de la navale et de l’automobile, prend toute sa place. Dans ce contexte, les intérêts de l’ensemble sont étroitement liés, d’autant que la performance vis-à-vis des clients (voire des « stockholders ») en termes de coût, qualité, délai, innovation dépend de la performance de l’ensemble de la chaîne.

A défaut c’est tout le savoir-faire et la technologie des PME sous-traitantes européennes qui seraient en passe de disparaître à 30… ou 90 jours près !

1 Les dispositions de l'article L. 132-8 du code de commerce permettent au transporteur voiturier, lorsqu'il lui est impossible d'obtenir le paiement de ses prestations, de réclamer le paiement auprès de l'expéditeur ou du destinataire. Ces dispositions, issues de l'article 10 de la loi n° 98-69 du 6 février 1998 ont pour objet d'améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier (« La lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. Le voiturier a ainsi une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite »).

Thierry CHARLES
Docteur en droit
Directeur des Affaires Juridiques d’Allizé-Plasturgie
Membre du Comité des Relations Inter-industrielles de Sous-Traitance (CORIST) au sein de la Fédération de la Plasturgie

t.charles@allize-plasturgie.com

Mardi 13 Mai 2008




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