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Les gouvernements et les Banques centrales ont tué le long terme

Avec l’austérité on construit le ralentissement économique et le chômage. Et pour les responsables la tendance est au déjugement.


Les gouvernements et les Banques centrales ont tué le long terme
Nous avons dans une de nos précédentes chroniques évalué le potentiel technique de hausse de l’indice S&P 500 à 1235. Vendredi 14, on a fini à 1224,58. Cela fait deux semaines que l’on clôture sur une hausse. Il nous faut donc reprendre l’ouvrage là où nous l’avons laissé et, pour être utile, analyser la situation ainsi créée. Comme à l’accoutumée, un retour en arrière s’impose.

Cela fait 2 semaines que l’on clôture sur une hausse. La semaine du 7, on est monté de 2,1 % sous la conduite du Nasdaq. La reprise enregistrée à partir du 4 a donné un franc coup d’arrêt à la tendance qui menaçait de devenir baissière. On était, au moment du déclenchement de la reprise, sur un seuil technique de soutien qu’il valait mieux ne pas casser. Le 4 octobre, on a eu ce que l’on appelle un keyreversal , configuration très explicite de retournement de marché en cours de séance. Certains attribuent ce retournement aux nouvelles sur le front de la crise des subprimes européens. Nous préférons rester dans le domaine technique et souligner le fait que sur les chaînes des TV spécialisées américaines un gourou technique très suivi a diagnostiqué le point bas, le turning point, et que sa réputation est telle que cela a déclenché une vague de rachats du découvert. Et Dieu sait si le découvert était important et nerveux. Ce gourou est suivi par les plus grands du Smart Money, comme George Soros par exemple.

A noter que dans ce retournement, les technologiques ont été leaders, les bancaires étaient à la traîne mais stabilisées. Le Dollar Index était encore ferme au-dessus des 78. En revanche, les bonds étaient déjà très faibles. On peut dire que sans être déjà en ordre de marche le complexe du risk-on se mettait en position, se préparait. La semaine au 14 a été euphorique. Le S&P 500 a fait un bond de 6%, le Russell de 8,6%, le Nasdaq de 7,7%. Les banques ont été co-leaders avec une avance de 7%. Tout le complexe du risk-on s’est mis en branle au fur et à mesure du développement du mouvement et du jeu des corrélations, hausse du CRB, rebond de l’or et du pétrole, chute aggravée des bonds, chute du Dollar Index 76,61.

Nous vous vous rappelons la règle du jeu du risk-on: la baisse du dollar est considérée comme le facteur déclenchant, permissif, car elle indique l’abondance des liquidités, ces liquidités recherchent des performances sur les actions, les marchés de credit high yield, sur les commodities, sur l’énergie, l’or etc. En contrepartie, on vend les refuges, les véhicules de flight to quality comme les fonds d’Etat. Avec ce mouvement, le marché des actions qui était sur le point de donner un signal très négatif il y deux semaines, et même un signal de trou, ce même marché d’actions donne au contraire un signal positif, un signal commercial Les salesmen partout aux Etats-Unis font le forcing: «vous ne voudriez pas rater cela !»

Le S&P 500 est donc sur le point de donner une confirmation haussière majeure, mais le Nasdaq lui est en avance, précurseur, il a déjà donné son verdict, il a passé son propre test positivement. Or le Nasdaq est considéré comme un précurseur fiable en matière de préférence pour le risque. Assez convaincant. En sens inverse, le Dow Jones global est lourd, à la traîne, il n’est même pas encore sur sa zone de test, il patauge. C’est la faute aux émergents, leur baisse est stoppée, mais ils n’ont pas encore convaincu. Voici quelques remarques :

- Les volumes de transactions sont faibles, normalement insuffisants pour soutenir la hausse, mais depuis le début de la crise les volumes laissent toujours à désirer
- L’extension du mouvement est médiocre, même si elle va s’améliorant. Seuls 40% des titres qui composent l’indice ont donné un signal haussier. Les hausses sont sûres quand on est dans la zone où 50 à 75 % des titres participent.
- Au moment du déclenchement de la reprise, les ventes à découvert aussi bien sur les actions que sur l’euro étaient à des sommets. Sur les 2 véhicules phares du riskoff, on était donc dans une extrême position de vulnérabilité. On a vu non seulement la hausse exceptionnelle des actions, mais aussi, notez-le, la hausse tout autant brutale et exceptionnelle de l’euro, c’est dire symétriquement la baisse du dollar.

Nous proposons l’interprétation suivante: dans un marché mûr pour une reprise technique, reprise souhaitable et souhaitée, les développements européens ont affolé les vendeurs sur l’euro/dollar, ils se sont rachetés en panique. Non seulement les développements de la semaine ont fragilisé leurs positions, mais en plus, ils ont été victimes de l’espoir engendré par un calendrier de réunions clefs et des déclarations sinon fermes et cohérentes du moins tonitruantes. On allait voir ce que l’on allait voir. Et donc on a vu. La mécanique peut être schématisée ainsi: il s’agit d’un enchaînement comme les aiment les algorithmes qui gouvernent les marchés: euro fort, dollar faible, hausse des actions, hausse des commodities, du pétrole, du high yield, baisse des bonds, anticipation de reprise économique avec regain d’inflation. Les problèmes des banques vont être moins graves.

Par ce schéma, les marchés montent mais aussi ils parlent. Ils disent ce qu’ils doivent dire comme de bons perroquets des services de relations publiques et de communication des gouvernements et Banques centrales. Les marchés montent parce que l’on a trouvé la solution à tous les problèmes et l’on a trouvé la solution à tous les problèmes puisque les marchés montent.

Plus sérieusement, bien que nous soyons sérieux dans notre description des enchaînements, nous avons eu une conjonction d’éléments positifs :

- marchés murs pour une reprise
- bonnes nouvelles des sociétés en particulier les technologiques
- calendrier de réunions internationales très serré pour parler de la crise
- bonne gestion de la communication et des perceptions par les responsables, il faut le souligner car c’est un fait nouveau en Europe.

Nous pensons que l’on est encore allé plus loin que ce que nous décrivons habituellement comme mode de gestion de la crise ; la transformation des vessies en lanternes. Les responsables, non seulement sont capables de faire prendre les vessies pour des lanternes, mais en plus ils franchissent une étape. Ils sont maintenant capables d’inverser la séquence des causes et des effets. Regardez bien. Dans le vieux temps, les causes engendraient et donc précédaient les effets, ici les effets, c’est à dire la hausse des marchés, la reprise du risk-on, produit les causes, ou ce qui est censé constituer les causes, les solutions à la crise, la reprise économique. Nous sommes en plein dans le monde magique des démiurges qui ont réussi à transformer tout le monde en croyant. A partir des effets, on remonte et on valide les causes.

Nous ferons remarquer que le phénomène permissif de tout cela, ou plutôt les 2 phénomènes permissifs de tout cela sont :

1 Le fait que les responsables ont réussi à faire en sorte que le long terme n’existe plus, on a obligé les opérateurs et investisseurs à ne penser qu’à court terme. Et comme les Pouvoirs ont des masses de manoeuvre énormes et qu’ils peuvent infliger des pertes considérables, plus personne n’ose leur tenir tête. La masse de manoeuvre des marchés est bien plus grande que celle des responsables mais cette masse de manoeuvre n’est pas une véritable puissance de feu, ils ne peuvent combattre et s’opposer car ils doivent rendre des comptes au jour le jour, au mois le mois, battre leurs benchmarks ou sortir des profits dans leurs books. Nous pensons que ceci est fondamental et que ceci explique pleinement le comportement des marchés, leur inefficacité réelle, leur volatilité, bref leur dysfonctionnement contraire à leur vocation économique et sociale.

2 Le fait que les responsables en réalité ne le sont pas. Ils jouent avec l’argent des autres, des citoyens, avec leur protection sociale, avec l’avenir de leurs enfants etc. Ils font des paris avec les ressources, les économies, le travail des autres, des tiers, c’est le tiers payant généralisé et même institutionnalisé. Ils se réclament de Milton Friedman, mais ils font exactement ce que Friedman stigmatise, ils jouent avec les ressources des autres et ne supportent pas la responsabilité de leurs pertes et de leurs errements. C’est pour cela que, d’une certaine manière, nous aimons les positions allemandes, ils sont allés moins loin que les autres dans la dérive, tout comme Jean-Claude Trichet est allé moins loin dans la dérive que Ben Bernanke.

Les responsables ont réussi à tuer le long terme, mais aussi à tuer la mémoire.

Qui se souvient qu’en 2008 ils ne juraient que par les déficits keynésiens alors qu’on leur disait: attention aux dettes, elles s’accumulent.

Qui se souvient qu’en 2009, ils voulaient pousser les banques à faire des prêts, à relancer le crédit, à augmenter leurs bilans, à repousser au maximum et même plus les limites des ratios de liquidité et de solvabilité.

Qui a choisi comme voie de soidisant sortie de crise de faire plus, encore plus de tout ce qui avait été fait avant et avait provoqué la crise ?

Qui fait remarquer que maintenant on fait exactement le contraire de tout, on se déjuge après un gaspillage gigantesque et une fragilisation accrue du système ?

Maintenant, on prône l’austérité, c’est à dire que l’on construit le ralentissement économique et le chômage.

Maintenant, on prône la recapitalisation des banques, l’augmentation des ratios de fonds propres, le dégraissage des bilans, le deleveraging; bref tout le contraire des années 2008/2009.

Gribouille n’aurait pas fait mieux

Dire aux banques, vous devez améliorer votre sécurité, votre solvabilité, c’est les pousser à réduire leurs bilans, à vendre des assets, à en faire baisser les prix, c’est les inciter à réduire leur offre de prêts et à la limiter aux plus rentables et solvables. Prôner la recapitalisation des banques, c’est pousser au crime déflationniste, obliger au deleveraging. Il y a un lien que tout le monde connaît entre taux de croissance économique, taux de croissance de la masse de dettes contenue dans le système et le total des bilans bancaires. Forcer les banques à recapitaliser dans les circonstances présentes de marché et de conjoncture, c’est ajouter à l’austérité budgétaire, l’austérité financière. Mais cela n’est pas fini et le sujet de la mauvaise gestion n’est pas épuisé.

Vous ne l’avez pas remarqué, mais pendant trois ans, on a tout fait pour faire baisser les taux longs, y compris des Quantitative Easing et des operationsTWIST et en trois semaines avec les errements, les taux du 10 ans sont montés de 1,85% a 2,25% aux Etats- Unis La hausse a été la même en Allemagne. La hausse a été plus forte en France car il s’y ajoute une dégradation de l’appréciation sur sa solvabilité et un élargissement record des spreads couplé à une hausse des CDS. Ce qui, soit dit en passant, contredit et est incohérent avec la reprise de l’euro. Hausse des taux à long terme, tout le contraire de ce dont les grands pays ont besoin, Gribouille n’aurait pas fait mieux. Pour lutter contre la crise du subprime européen qui renchérit les taux… on fait monter les taux du core, du coeur !

On peut s’interroger sur la cause de ce renchérissement des taux. Nous proposons ceci : c’est la conséquence de la pression sur les banques à deleverager.

Cela n’est pas assuré, mais cela est cohérent avec la hausse de l’euro, on vend des actifs étrangers, américains et émergents, et on rapatrie. Phénomène signalé, il faut le reconnaître, par le FMI en fin de semaine. Le FMI évoque le risque d’un crédit crunch chez les émergents, en particulier en Asie.

Cela fait du crédit global en moins et cela fait une reprise de la monnaie européenne. Est-ce que cela va dans la bonne direction ? On peut en douter.

L’Agefi, quotidien de l’Agence économique et financière à Genève
www.agefi.com

Jeudi 20 Octobre 2011




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