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Les enjeux énergétiques en France

Point de vue d'une société d'ingénierie, ASSYSTEM.


Les enjeux énergétiques en France
INTRODUCTION : L’ÉNERGIE DEMAIN

Les récentes catastrophes telles que la marée noire dans le golfe du Mexique en 2010, l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima en 2011, ou encore l’énorme fuite de gaz en mer du Nord en 2012, sont venues rappeler que le monde de l’énergie est incertain, risqué, complexe, et que les industriels doivent viser le « risque zéro », alors même que la demande d’énergie ne cesse de croître, en particulier pour permettre le développement économique des pays émergents. Le développement des énergies renouvelables fait également face à des difficultés significatives, qu’il s’agisse de leur compétitivité, de leur intégration dans les réseaux notamment électriques, ou de la délocalisation en Asie d’une partie des usines de fabrication.

D’un autre côté, l’avenir énergétique est extrêmement prometteur, sous le double effet du développement de l’innovation et d’une prise de conscience des opinions publiques et des décideurs politiques et économiques de la nécessité de changer de modèle et d’avoir la plus grande vigilance sur les retombées environnementales des grands projets. Dans ce contexte, tout pousse à un renforcement des normes de sécurité et de sûreté ; en Occident bien sûr, mais aussi dans les pays émergents, où les gouvernements ne peuvent ignorer l’opinion publique. Aucun secteur de l’énergie n’a encore effectué tout son cycle de vie, de la conception et la construction jusqu’au démantèlement des infrastructures. Pas plus le nucléaire que le pétrole, et encore moins l’éolien. Nous sommes en présence de modèles économiques et industriels qui ne sont pas totalement validés.

Ainsi, sur la base de l’expérience américaine, on estime à 400 millions de dollars le coût de démantèlement d’un réacteur nucléaire. Qu’en sera-t-il en 2020-2030 ? Par ailleurs, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime que d’ici à 2040, il faudra déconstruire 500 plates-formes de mer du Nord et fermer 8 000 puits en fin de vie. Sait-on dans quel environnement financier, réglementaire et technique se dérouleront ces opérations lourdes? Comment réaliserons-nous les importants développements technologiques et industriels nécessaires pour réduire les coûts des énergies renouvelables, seuls à même de leur permettre de continuer à se développer significativement dans la durée ?

Dans ce contexte, les sociétés d’ingénierie indépendantes sont en mesure d’apporter une contribution unique, grâce à leur expérience variée dans la maîtrise de la complexité inhérente aux grands projets énergétiques de leurs divers clients. L’enjeu : la conception d’un nouveau modèle énergétique plus complexe certes, mais aussi plus performant sur le plan économique et écologique.

LE DÉFI DE LA COMPLEXITÉ

La complexité est inhérente au secteur de l’énergie (pétrole, gaz, charbon propre, nucléaire, éolien offshore), a fortiori dans une période de transition énergétique. Par leur taille et la durée des travaux, l’importance des capitaux engagés (de l’ordre de 6 milliards d’euros pour un réacteur EPR, presqu’autant pour une unité de production et de stockage de pétrole en mer), l’importance des innovations technologiques à mettre en oeuvre, la multiplicité des acteurs et les règles de respect de l’environnement, la réalisation des projets relève d’une véritable approche systémique.

Automobile, aéronautique, énergie : plus aucun secteur n’échappe au défi de la complexité. A titre d’exemple, un nouveau secteur complexe a pris son essor en Europe : l’éolien maritime. Trois consortia ont répondu à l’appel d’offres gouvernemental pour l’installation de 5 parcs éoliens offshore d’une puissance totale de 3 gigawatts (GW); 4 sites (2 GW) ont été retenus. Contrairement à l’éolien onshore, ce secteur est à haute intensité technologique et capitalistique. Or chaque industriel sera focalisé sur son segment d’activité et ses coûts.

Ce défi repose aussi sur la nécessité de concilier les exigences des donneurs d’ordre et les contraintes des industriels, en maîtrisant les délais et les coûts et en offrant le meilleur des technologies dans un cadre raisonné. Il s’agit également d’apporter des réponses fiables et concrètes aux exigences de maîtrise des risques de tous, depuis le grand public jusqu’aux industriels et pouvoirs publics.

Un nouveau stade de complexité est franchi depuis que gouvernements, élus et groupes de services aux collectivités ont décidé de promouvoir – au nom du développement durable – une approche et un traitement plus global des grands enjeux urbains (énergie propre, gestion raisonnée de l’eau, valorisation et recyclage des déchets, transports collectifs et propres...). De grandes entreprises comme Veolia Environnement, Suez Environnement, EDF, GDF Suez ou la Caisse des dépôts et consignations y travaillent.

Une économie plus circulaire que linéaire, où l’approche est globale, appelle inévitablement un renfort en matière d’ingénierie. Assystem observe avec intérêt le soutien de l’Union européenne au développement d’une vingtaine de «villes intelligentes» à l’horizon 2020. Notamment pour que le Vieux Continent ne soit pas distancé dans les nouvelles technologies de l’énergie et des réseaux par la Chine et le Moyen-Orient, qui développent aussi de telles «éco-cités» (Masdar City...).

Ces villes vont atteindre des sommets de complexité. De grands groupes fournisseurs des électriciens (Siemens, Schneider Electric, ABB...) sont sur les rangs pour fournir équipements et solutions. Mais personne n’est encore capable de choisir entre ces technologies différentes, ni de les intégrer dans ces «smart cities”.

Qui mieux que les sociétés d’ingénierie peuvent jouer ce rôle d’architecte technologique de nos cités et de nos territoires, au service des donneurs d’ordre, qu’il s’agisse de collectivités locales ou d’industriels ?

SURETE : LA FORCE DU COLLECTIF

En matière de sûreté industrielle, aucun compromis n’est acceptable. Deux accidents majeurs sont venus rappeler, ces dernières années, que les risques humains et environnementaux sont inhérents au monde de l’énergie : l’explosion de la plateforme Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique en avril 2010 et la destruction de la centrale nucléaire japonaise de Fukushima en mars 2011. Ces désastres, comme l’explosion de la plate-forme Piper Alpha en 1988 ou celle du réacteur nº 4 de Tchernobyl en 1986, ont entrainé une révision drastique et un renforcement sévère des normes de sécurité-sûreté sous la pression des gouvernements et des opinions publiques.

Les accidents de Three Mile Island et de Tchernobyl étaient dus à des erreurs de pilotage, celui de Fukushima à une agression extérieure, un tsunami, ce qui va entrainer des modifications profondes dans la gestion du risque. Ainsi, au-delà du renforcement des lignes de défense des 58 réacteurs français, auquel d’ailleurs Assystem participe, EDF, sur décision de l’Autorité de Sûreté du Nucléaire, est en train de constituer la Force d’action rapide nucléaire (FARN), qui doit être capable de reprendre en moins de 24 heures le pilotage d’un réacteur hors de contrôle. Fukushima a poussé les spécialistes de l’ingénierie à inscrire leur réflexion dans le cadre plus large de la diffusion des technologies nucléaires. S’il n’existe pas d’autorité supranationale capable d’interdire à un pays signataire du Traité de non-prolifération (TNP) de se doter d’une centrale nucléaire, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et le groupe des 45 pays fournisseurs de technologies nucléaires veillent à ce que celles-ci ne se diffusent pas sans un strict contrôle, dans des pays capables de développer une véritable culture sûreté, dans un contexte réglementaire solide.

Le nucléaire est sans conteste la filière industrielle qui a poussé les normes de sûreté le plus loin. Lorsque l’un des opérateurs est confronté à une situation à risque, c’est toute la filière au niveau mondial qui se mobilise pour contribuer à la résolution du problème. C’est dans cette approche collaborative que se trouve la grande force du secteur en matière de sûreté. L’expérience acquise dans le nucléaire doit permettre de développer encore davantage une vision transversale du risque qui profite à d’autres secteurs industriels. Car la problématique du risque n’est pas propre au nucléaire. La sûreté des opérations est par exemple une composante de plus en plus critique du secteur Oil & Gas.

Dans un monde où la production et la consommation énergétique sont au coeur des débats, et où l’on est en train de construire un nouveau modèle plus performant et plus respectueux de l’environnement, les enseignements de l’industrie nucléaire devraient s’avérer de plus en plus précieux.

EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE : "L’ÉNERGIE INTELLIGENTE"

Le monde doit désormais résoudre une équation complexe : produire toujours plus de biens et de services tout en consommant le moins d’énergie possible pour retarder l’épuisement des ressources fossiles et limiter le réchauffement climatique. Efficacité et sobriété sont devenues, à des degrés divers, les maître-mots des hommes politiques, des pétroliers, des électriciens, des industriels et des mouvements de défense de l’environnement. La « chasse au gaspillage » initiée après le premier choc pétrolier de 1973 trouve aujourd’hui une nouvelle résonnance ; l’urgence est réelle, pour les pays développés comme pour les pays émergents.

On ne part pas de rien. Entre 1981 et 2010, l’intensité énergétique (quantité d’énergie pour produire 1 point de PIB) a baissé de 20 % dans le monde. La baisse atteint même 65% en Chine, qui est pourtant pénalisée par un habitat et une industrie très vétustes. Preuve que le monde de l’industrie, du tertiaire et des transports est plus efficace et plus sobre. Dans son «paquet Énergie-Climat» de 2008, l’Union européenne s’est fixé un objectif ambitieux : améliorer de 20 % cette efficacité d’ici à 2020. Cette démarche a plusieurs vertus : réduire la facture des consommateurs, freiner la hausse des prix en limitant la demande, faire reculer la dépendance vis-à-vis des pays producteurs, sécuriser les réseaux électriques et protéger l’environnement.

D’énormes gisements d’économies d’énergie peuvent encore être exploités. Tout le monde en convient : l’amélioration dans les bâtiments (résidentiels et tertiaire) est absolument prioritaire. Ils représentent, en effet, 42 % de la demande totale d’énergie (20% pour les transports et autant pour l’industrie). Dans ce secteur, l’enjeu est donc moins d’éduquer le consommateur que d’améliorer son habitat. Dès lors que celui-ci est correctement conçu et équipé, il en résulte une baisse de 30 % de la consommation.

La marge d’amélioration est d’ailleurs considérable, puisque la consommation annuelle moyenne d’un bâtiment en France est de 400 kW/h par m² et que la norme sera de 50 kW/h à partir de 2013 pour les nouvelles constructions. Mais avec 30 millions de logements existants (et 300 000 logements neufs par an), il faudrait un siècle et des sommes colossales pour régler le problème.

Une révolution silencieuse est pourtant en marche. Le monde est en train de changer de modèle énergétique. Le modèle existant, construit autour de la production de grandes centrales injectant d’énormes quantités d’électricité sur le réseau de lignes à haute tension, est en mutation ; un nouveau modèle plus flexible, plus décentralisé et de plus en plus porté par l’usage que font les consommateurs de l’énergie, se met en place. L’efficacité énergétique est un élément clé de cette mutation.

Nous sommes en effet entrés dans l’ère de “l’énergie intelligente”. Il faut mettre de l’intelligence dans les infrastructures et dans les réseaux, pour optimiser à la fois la consommation et la production d’énergie en installant dans les constructions des capteurs et compteurs communicants, puis en connectant ces bâtiments à des sources d’énergie délocalisées grâce à des réseaux non moins intelligents (smart grids). Il faut par ailleurs mettre le consommateur en position de maîtriser sa consommation en toute connaissance de cause : plus qu’une problématique de sensibilisation, c’est là encore une question à laquelle seule une R&D innovante, tournée vers la valeurs d’usage, peut répondre. Les projets en cours sont nombreux et devraient voir le jour rapidement.

Dans ce contexte, l’avenir appartient aux champions de l’innovation qui sauront imaginer et mettre en oeuvre des systèmes de gestion énergétique toujours plus intelligents.

ÉNERGIES RENOUVELABLES : LA FRANCE DANS LE VENT

Le choix de la France du «tout nucléaire » (75 % de l’électricité) a suivi le premier choc pétrolier (1973). Unique au monde, ce choix a longtemps relégué soleil, vent et biomasse au second plan. La France est aujourd’hui en train de rattraper son retard, avec une nouvelle impulsion donnée depuis 2007 pour le développement des énergies renouvelables. Le pays s’est notamment lancé avec volontarisme dans l’éolien en mer. C’est là une nécessité si l’on considère qu’à terme, les énergies fossiles ne pourront ni ne devront satisfaire nos besoins en termes de consommation énergétique. Le fameux « mix énergétique » est donc en train de prendre corps.

Avec le Grenelle de l’environnement de 2007, la France s’est en effet engagée auprès de l’Union européenne à porter la part des renouvelables à 23 % de sa consommation d’énergie finale en 2020. A cet horizon, le France prévoit d’installer des parcs éoliens en mer du Nord, dans la Manche et dans l’Atlantique, avec pour objectif une puissance totale 6 gigawatts (GW). Les deux consortia portant les premiers projets (EDF-Alstom et Iberdrola-Areva) ont tout à gagner d’une externalisation des compétences d’ingénierie dans toute la filière: usines d’éolienne, installation des parcs, exploitation-maintenance et démantèlement. Le programme français va entraîner l’implantation de six usines au Havre, à Cherbourg et à Saint-Nazaire, le renforcement d’un tissu déjà fort de 180 PME-PMI travaillant pour l’éolien et la création de 10 000 emplois. Cette filière industrielle naissante fournira les équipements des parcs français, mais aussi ceux des gigantesques fermes prévues au large des côtes britanniques.

Le développement de l’éolien offshore nécessite plus de compétences en ingénierie qu’aucune autre énergie renouvelable : les défis de conception sont nombreux et seules les sociétés spécialisées dans les infrastructures complexes sont en mesure d’y apporter des réponses qui concilient les intérêts de toutes les parties prenantes. Les énergies renouvelables, notamment l’éolien offshore, seront créatrices de valeur en France. Mais elles requièrent une expérience nourrie de compétences spécifiques et exigeantes en matière d’ingénierie des infrastructures complexes, de production et distribution énergétique, ainsi que la prise en compte des contraintes environnementales.

Ainsi, pour des investissements aussi lourds – 20 milliards d’euros au total pour 6 GW en France, 100 milliards pour 35 GW au Royaume-Uni –, il est crucial de se prémunir contre une dérive des coûts et du calendrier. Il y a donc une nécessité absolue de constituer des équipes intégrées réunissant tous les partenaires et de mettre en place une planification rigoureuse et un suivi précis des travaux pour détecter les retards, et y remédier, et pour gérer les différences culturelles entre PME et grands groupes. Une telle organisation permet d’éviter des contentieux comme celui de 477 millions de dollars qui a opposé le consortium exploitant germano-écossais RWE-Scottish & Southern Energy au « contractor » américain Fluor sur le projet britannique de Greater Gabbard.

Enfin, pour que l’éolien offshore comme les énergies renouvelables dans leur ensemble puissent continuer à se développer significativement dans la durée, d’importants développements technologiques et industriels seront nécessaires pour réduire leurs coûts. Dès lors que ces obstacles sont identifiés et maîtrisés, rien ne s’oppose à ce que la France prenne une place majeure sur l’échiquier mondial des énergies renouvelables.

LA PLACE DU NUCLÉAIRE DANS LE MIX ÉNERGÉTIQUE

Le nucléaire reste incontestablement une pièce maîtresse du mix énergétique. L’accident de Fukushima ne peut raisonnablement signer l’arrêt d’une filière qui fournit 14 % de l’électricité mondiale tout en émettant peu de CO2 au cours de son cycle de vie. Car c’est bien là un de ses principaux atouts : être une énergie clé dans la lutte contre le réchauffement climatique. Aujourd’hui, environ 435 réacteurs sont en fonctionnement dans le monde et une soixantaine est en cours de construction, tandis qu’une trentaine de pays sont en réflexion sur le déploiement d’un programme nucléaire civil.

Si l’investissement de départ pour le développement d’un parc nucléaire reste très élevé, l’énergie nucléaire dispose au moins de deux atouts majeurs. D’une part, le nucléaire garantit une plus grande indépendance énergétique aux pays opérateurs qui ne sont ainsi pas ou peu dépendants des énergies fossiles. D’autre part, le prix du kilowatt/heure produit par une centrale nucléaire est à la fois compétitif par rapport aux autres moyens de production d’électricité (cf. le rapport rendu public par la Cour des Comptes début 2012) et stable, du fait de la part relativement faible que le coût de la matière première, l’uranium, représente dans le coût global de production (on estime aujourd’hui cette part à environ 5 %). L’opérateur garde ainsi la main sur la productivité de l’outil.

Fukushima a néanmoins soulevé des questions fondamentales pour l’avenir du nucléaire, questions qui portent sur le terrain de la responsabilité des acteurs. La sûreté est ainsi au coeur des préoccupations des intervenants de ce secteur. Le développement du nucléaire va se poursuivre mais il sera concentré sur des pays relativement stables, disposant de la capacité de développer une réglementation et une culture industrielle solides.

Au-delà de l’amélioration constante de la sûreté des nouveaux réacteurs comme des réacteurs existants, un autre objectif concentre toute l’attention et les efforts d’innovation notamment de la part des ingénieurs spécialisés en infrastructures complexes : celui de progresser dans la gestion du cycle de vie du nucléaire.

Bien que certains projets de démantèlement aient déjà été menés à terme ou soient en cours, ceux-ci peuvent être optimisés pour l’avenir et demeurent des enjeux en matière de gestion de projets à grande échelle et de maintien des compétences nécessaires.

D’autre part, la question du traitement des déchets à haute activité et vie longue est plus que jamais au coeur des débats ; sa résolution dans des conditions optimales de sécurité et de protection environnementales pourrait contribuer au renouveau d’une filière plus que jamais convaincue que le nucléaire, en l’état actuel des besoins énergétiques et des compétences technologiques, reste une solution d’avenir extrêmement fiable.

Dans un contexte d’augmentation continue du besoin en électricité partout dans le monde, ce n’est qu’au prix d’investissements continus en recherche et développement, en sollicitant les compétences en ingénierie au meilleur niveau, que la filière nucléaire pourra se donner un nouvel avenir.

GAZ ET PÉTROLE : LA NOUVELLE FRONTIÈRE

Les débats sur la “fin du pétrole” et la limitation des gaz à effet de serre ont tendance à « enterrer » un peu trop vite les énergies fossiles (charbon, gaz et pétrole). Si celles-ci se raréfient, se renchérissent et contribuent massivement au réchauffement climatique, elles sont encore irremplaçables et resteront pendant plusieurs décennies le «sang» de l’économie. Si l’on regarde les différentes projections sur le mix énergétique mondial, on constate qu’elles convergent pour indiquer qu’en 2050, le charbon représentera 34 % de l’énergie primaire et le pétrole encore 27 % (contre 38 % aujourd’hui). Tout simplement parce que les besoins en énergie seront multipliés par deux durant cette période, tirés par la demande des pays émergents.

Dans la production d’électricité, le gaz prendra une part croissante pour atteindre 28 % et le charbon ne descendra pas en dessous de 50%. Le pétrole ne servira plus à alimenter les centrales électriques, mais il restera indispensable dans les transports. A moins que les industriels aient d’ici là inventé une batterie révolutionnaire – puissante, légère et peu coûteuse – pour équiper les voitures électriques.

Un signe ne trompe pas : les compagnies, privées ou nationales, continuent d’investir massivement dans l’exploration-production pétrolière et gazière. 600 milliards de dollars par an d’ici à 2020 y seront consacrés ; Total à lui seul y consacrera 20 milliards chaque année. Un prix du baril sans doute au-dessus de 110 dollars en moyenne sur la décennie assurera la rentabilité de productions de plus en plus difficiles et coûteuses. Il n’est pas étonnant que les banques prêtent au secteur Oil&Gas alors qu’elles se montrent de plus en plus frileuses pour financer les grands projets nucléaires.

Néanmoins, l’ère du pétrole qu’on «ramasse en se baissant » est révolue. Comme pour le nucléaire, les coûts de la sûreté vont s’accroître. Plusieurs facteurs expliquent ce accroissement des coûts : d’une part, l’opinion publique fait pression à juste titre pour un renforcement de la sécurité, afin de ne pas voir se renouveler des catastrophes telles que la marée noire causée par BP dans le golfe du Mexique en 2010. D’autre part, en raison de la nécessité d’exploiter de nouveaux gisements, la production de brut exige un recours toujours plus grand à des équipements de haute technologie (sismique 3D, matériaux résistant aux hautes pressions et aux grandes chaleurs...) et à des plateformes géantes FPSO (1), FLNG (2).

Il s’agit d’aller chercher les ressources par 3 000 à 7 000 mètres de fonds sous-marins, de les extraire de puits qu’il faut moderniser, de traiter les sables bitumineux du Canada et les huiles lourdes du Venezuela. La présence de ces pétroles dits «non-conventionnels» a permis de tripler les réserves prouvées (3) (à 3 000 milliards de barils). De nouveaux pays pétrolier apparaissent, notamment en Afrique de l’Est. Le “pic pétrolier qu’on pensait atteint vers 2015 – 2020 a été repoussé à une date ultérieure.

On ne peut parler de l’avenir du secteur gazier sans mentionner le potentiel des gaz de schiste. En effet, partout où cette technologie s’est développée, elle a profondément redessiné l’avenir industriel du pays. Ainsi, aux États-Unis, en fournissant aux industriels l’accès à un gaz très compétitif, elle a permis le redéveloppement de l’industrie pétrochimique et la création d’emplois industriels. Si leur exploitation est bien maîtrisée, les gaz de schiste constituent une formidable opportunité pour les pays qui les développeront. La France, qui fait d’ailleurs partie des pays les mieux dotés en réserves de gaz, pourrait trouver dans l’exploitation de ses gisements un moyen efficace d’alléger son déficit commercial dans une balance fortement grevée par l’importation d’hydrocarbures. L’ingénierie est prête à participer aux débats et aux expérimentations pour permettre des exploitations dans le respect de l’environnement, qu’il s’agisse par exemple de la gestion des ressources en eau ou de l’absence de pollution des nappes
phréatiques.

L’enjeu pour les industriels est donc de taille : continuer à exploiter les ressources naturelles en investissant massivement dans des technologies qui vont permettre de mieux respecter l’environnement, et préparer l’avenir en développant les énergies renouvelables qui prendront en charge une part croissante des besoins énergétiques mondiaux.

(1) FPSO : Unité flottante de production, stockage et de déchargement (Floating Production Storage and Offloading). Les plateformes FPSO présentent l’avantage de ne pas nécessiter d’infrastructures fixes et donc d’être redéployables.

(2) FLNG : Unité flottante de gaz naturel liquéfié (Floating Liquefied Natural Gas). Ce type de plateformes en est encore au stade de la conception, les premières devant voir le jour d’ici 2017. Elles permettront l’exploitation de réserves de gaz offshore.

(3) Les réserves prouvées sont les quantités d'hydrocarbures, de charbon qui, selon les informations géologiques et techniques disponibles, ont une forte probabilité (>90%) d'être récupérées dans le futur, à partir des gisements connus et dans les conditions technico-économiques existantes (source : INSEE).

Mercredi 3 Octobre 2012




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