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Les PIIGS, ces nouveaux eldorados des marchés financiers…

Les Etats de la périphérie européenne attirent de nouveau les investisseurs. Qui l'eut cru ? Il y a encore deux ans en effet, de nombreux observateurs anticipaient un scénario catastrophe de type « Grexit » (une combinaison des termes « Greece » et « Exit ») synonyme d'échec du projet d'union monétaire. Aujourd'hui pourtant, l'Italie, l'Espagne, le Portugal et même la Grèce sont devenus les nouveaux eldorados des marchés. Ce regain d'intérêt pour les pays d'Europe du sud est-il alors véritablement justifié ? Pas sûr…


Anthony Benhamou
Anthony Benhamou
Une contrée fabuleusement riche en signaux positifs

La tourmente actuelle dans les économies émergentes semble faire oublier les difficultés des pays d'Europe du sud. Mieux, ces derniers retrouvent progressivement une certaine crédibilité sur la scène internationale. Considérés hier encore comme des « cochons », leur contrainte financière tend aujourd'hui à se desserrer.

En témoigne ainsi la détente observée sur les marchés obligataires à dix ans au cours de ces dernières semaines. L'Irlande emprunte actuellement à 3,58%, l'Espagne à 3,55% et l'Italie à 3,67%. Le Portugal finance pour sa part sa dette à un taux de 4,85%, un plus bas depuis août 2010. Enfin, même la Grèce dont le taux excédait pourtant 30% en 2012 semble être devenue attractive à 7,40%

Cette détente des taux trouve son origine notamment dans l'évolution de l'appréciation du risque souverain par les agences de notation. Car à l'exception de la Grèce, les pays d'Europe du sud semblent enfin être montés dans le train de la reprise économique. Après avoir connu de sévères récessions, ils affichent en effet des taux de croissance positifs, parfois même supérieurs aux pays dits du nord de l'Europe.

Le 21 février dernier, l'agence Moody's relevait ainsi la note espagnole d'un cran de Baa3 à Baa2, l'accompagnant au passage d'une perspective positive (comprenez une possible amélioration de sa note dans les mois à venir). Le même jour, Fitch confirmait la note de l'Irlande à BBB+ assortie d'une perspective stable. Enfin quelques jours plus tôt, la perception du risque italien s'estompait également avec une révision par Moody's de sa perspective, de négatif à stable.

La volonté affichée par les gouvernements des pays d'Europe du sud de s'affranchir des plans d'aide internationaux participe en outre à la détente des taux souverains. L'Irlande est la première nation européenne à avoir amorcé le mouvement. Le 15 décembre dernier en effet, l'ancien tigre celtique s'est officiellement délivré de la tutelle financière de la troïka (FMI, BCE et Union européenne) pour effectuer un retour en fanfare sur les marchés.

Très vite, Madrid a emboité le pas à Dublin ; le 23 janvier 2014 en effet, l'Espagne est sortie de son plan de sauvetage pour ses banques qui avait été mis en place au printemps 2012 par la zone euro. Et c'est désormais au tour du Portugal d'afficher sa détermination quant au fait de retrouver une parfaite autonomie financière. Le pays escompte en effet une fin de tutelle de la part de ses créanciers au mois de mai prochain pour pouvoir retrouver un plein accès au marché sans filet de sécurité.

L'ensemble de ces éléments constitue bien évidement des signaux positifs pour les investisseurs internationaux. Vous rendez-vous compte du chemin parcouru ? Un sentiment de confiance s'installe progressivement sur les marchés qui veulent désormais croire en des jours meilleurs pour la zone euro et en particulier pour les PIIGS. Après le scepticisme, place à l'optimisme.

Même le très célèbre George Soros l'affirmait le 23 février dernier au journal allemand Der Spiegel ; « je veux croire à l'euro ». L'homme d'affaires a en effet annoncé que son fonds d'investissement étudiait sérieusement la possibilité de revenir en Europe pour « faire beaucoup d'argent assez rapidement ». Si l'Espagne, l'Irlande et le Portugal devraient être des zones privilégiées, Soros affirme également la possibilité d'opportunités en Grèce où « les conditions économiques se sont améliorées ».

Attention, le chemin vers une véritable normalisation est encore long

Alors qu'un vent d'euphorie souffle sur les Etats d'Europe du sud, certains observateurs évoquent déjà la notion de miracle des périphériques. Il faut dire en effet que les marchés aiment trouver de nouvelles thématiques d'investissement. Et la tourmente des émergents a propulsé les PIIGS sur le devant de la scène.

Un concours de circonstance ? Certainement. Car si en apparence les périphériques offrent des opportunités, il est pour l'heure prématuré, voire déplacé, d'évoquer un quelconque miracle. La reprise que connaissent les Etats du sud de l'Europe demeure en effet logique (les PIIGS sont descendus tellement bas qu'un rebond technique s'imposait), balbutiante et surtout menacée.

Car les taux de chômage atteignent des niveaux records. A titre d'illustration, en novembre dernier la Grèce comptait 28% de chômeurs, l'Espagne 26,7%, le Portugal 15,5% et l'Irlande et l'Italie un peu plus de 12%.

Or le fléau du chômage de masse constitue un risque économique important en ce sens qu'il freine durablement la demande intérieure des pays. Les ménages perdent en effet du pouvoir d'achat et doivent faire face à une contrainte budgétaire ultra serrée. Les entreprises sont quant à elles confrontées à une sévère contrainte sur leurs débouchés et entrent dans des processus de désinvestissements.

Dès lors, la hausse du chômage s'auto-entretien et engendre un ajustement à la baisse des prix qui, conjugué à un jeu d'anticipations miroirs, est susceptible de faire basculer les périphériques européens dans la déflation. Il convient d'ailleurs de noter que la Grèce est déjà dans une telle situation.

Le chômage de masse fait en outre peser un risque social non négligeable. Les populations sentent bien en effet que les choses sont en train de changer. Toutefois, elles n'ont pas l'impression de bénéficier concrètement de la reprise économique alors même qu'elles se sont livrées à de douloureux efforts, souvent d'ailleurs reconnus et salués.

Or, à l'heure où certains pays se délivrent de leurs chaînes (ou sont sur le point de le faire), l'austérité se poursuit tandis que le sentiment eurosceptique progresse. Car la crise de la dette n'est hélas pas terminée. L'assainissement des finances publiques doit en effet se poursuivre tant l'endettement des Etats est élevé. Le ratio dette publique sur PIB atteint par exemple 171% en Grèce, 133% en Italie, 129% au Portugal, 125% en Irlande et 94% en Espagne.

Force est donc de conclure que si les Etats du sud de l'Europe rencontrent encore des difficultés, ils se trouvent néanmoins sur le bon sentier. Et ce point constitue une excellente nouvelle au regard de la situation de 2012. Progressivement en effet, ils tendent à se laver du pêché originel et retrouvent du crédit sur le plan international, bien aidé il est vrai par l'action de Mario Draghi à la BCE.

Les marchés sont optimistes et ils ont, en partie seulement, raison. Car il faut rester prudent. Le chemin vers la normalisation est en effet encore long et semé d'embuches. Que se passerait-il par exemple si le mécanisme de l'OMT était jugé inconstitutionnel par la cour de justice de l'Union européenne ? Un « rien » semble effectivement pouvoir faire basculer un équilibre encore très fragile…

Achevé de rédiger le 26 février 2014

Anthony Benhamou

Anthony Benhamou est un économiste diplômé de l’université de Paris Dauphine. Il a notamment exercé pendant 3 années en tant que consultant auprès de grandes entreprises internationales. Maître de conférences à Sciences-Po Paris et tuteur enseignant à l’université de Paris Dauphine, il rédige par ailleurs avec Marc Touati de nombreuses chroniques économiques et financières pour le cabinet ACDEFI.

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Mardi 4 Mars 2014




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