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La loi sur le renseignement va-t-elle tuer la French Tech ?

On ne pouvait pas faire pire. Non seulement la nouvelle loi sur le renseignement menace d'étouffer nos libertés, mais elle risque de porter un coup fatal à l'économie numérique française.


Alain Dolium
Alain Dolium
Car pour préserver la liberté de surfer de leurs clients, les hébergeurs français n'hésitent plus à menacer ouvertement de se délocaliser à l'étranger. Jusqu'à présent, le gouvernement a pris la menace à la légère. C'est une grave erreur. Qui trahit une profonde incompréhension des enjeux du secteur.

Pourquoi ? Parce que les algorithmes d'analyse automatique de la « menace terroriste », inspirés des méthodes de la NSA, vont d'abord faire fuir les clients étrangers des opérateurs français. Ce qui pourrait faire perdre à ces derniers jusqu'à 40% de leur clientèle. Les investisseurs étrangers sauront, en effet, que s'ils s'installent sur le territoire français, ou même s'ils s'équipent auprès d'entreprises françaises, ils seront susceptibles d'être espionnés. Or qui voudrait payer pour être espionné? Les pertes potentielles pour la French Tech risquent, de ce point de vue, d'être bien supérieures aux subventions que le gouvernement actuel, dans sa schizophrénie, attribue au secteur numérique.

Plus largement, une société étrangère en développement dans un secteur innovant pourra légitimement s'interroger sur son implantation en France. Comment protéger ses secrets industriels, quand le gouvernement français est susceptible de vous espionner en direct ?

"Qui n'a rien à se reprocher, n'a rien à craindre". C'est le seul vrai argument du gouvernement pour défendre la nouvelle loi sur le renseignement. Le seul problème de cette affirmation, en dehors de ses accents totalitaires, c'est qu'elle est... Totalement fausse.

Quand vous surfez sur le web, l'hébergeur recueille des informations sur vous, sur vos choix de navigation, sur vos recherches. Mais ces données demeurent, pour le moment, anonymes. Le projet du gouvernement consiste, au contraire, à transformer les hébergeurs en espions. A les contraindre à fouiller dans vos données médicales, dans vos dossiers voyageurs, dans vos fichiers clients, dans vos courriers électroniques, dans vos albums photos de vacances, pour y trouver des preuves d'activités suspectes. Il s'agit, cette fois-ci, de collecter des données nominatives.

Les hébergeurs ont parfaitement compris cette logique. Refusant de jouer le rôle de délateur ou de "voleur de données" qu'on attend de lui, OVH, l'un des plus grands acteurs du numérique français avec pas moins de 700 salariés, a prévenu qu'il quitterait la France si le gouvernement n'amendait pas son projet. Et avec lui la plupart des membres du Syntec Numérique, comme Gandi - dont la croissance dépasse 30% par an - qui ont menacé de délocaliser leurs data centers et leurs emplois. Il faut rappeler qu'un scénario similaire s'est déjà produit par le passé : aux Etats-Unis, dans la foulée du Patriot Act. Quand de grandes entreprises américaines ont carrément déménagé en Europe pour fuir les grandes oreilles de la NSA.

Dissuadant groupes étrangers de s'installer sur notre territoire, la nouvelle loi sur le renseignement risque aussi de pousser des entreprises françaises de la French Tech au départ. Sous couvert de sécurité, le gouvernement français industrialise l'espionnage, au détriment de l'économie numérique. Le jeu en vaut-il la chandelle ?

Alain Dolium
Président fondateur du Centre Numérique

Les médias du groupe Finyear


Vendredi 5 Juin 2015




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