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La dette grecque au bord du gouffre

Les finances publiques grecques sont en mauvaise posture. Bien que la récession mondiale n’ait pas trop ébranlé l’économie grecque, celle-ci présente le déficit budgétaire le plus élevé de toute la zone euro et un ratio dette publique/PIB supérieur à 100%.


La crédibilité même de la Grèce a été mise à mal lorsque le nouveau gouvernement a annoncé l’année dernière que le déficit budgétaire était encore plus grave que les chiffres l’indiquaient. Et ce ne fut malheureusement pas la première fois. Les marchés obligataires grecs ont bu la tasse, provoquant dans une certaine mesure une onde de choc dans la zone euro. Cette semaine, la Commission européenne a approuvé le plan du gouvernement grec prévoyant la réduction du déficit à 2,8% en 2012. S’agit-il du dernier acte d’une « tragédie grecque » ?

Contexte économique

Depuis que la Grèce a adopté la monnaie unique en 2001, son économie a affiché une belle tenue. Alors que la croissance annuelle de la zone euro s’est chiffrée à 1,5% en moyenne, celle de la Grèce s’est élevée à 3,5%. L’inflation n’a pas été excessive et le chômage n’a cessé de reculer. Même la récession mondiale a eu un impact modéré sur l’économie grecque. Alors que la zone euro a dégringolé de 4,7% entre son plus haut et son plus bas, l’économie grecque n’a cédé que 1,7% jusqu’au troisième trimestre 2009.

La Grèce a en effet bénéficié d’importantes baisses de taux d’intérêt dans sa course à l’adoption de la monnaie unique, d’un soutien structurel de l’Union européenne et d’un transport maritime florissant qui a surfé sur la vague d’un commerce mondial en pleine ébullition.

Les politiques budgétaires lui ont également été favorables. Le gouvernement a aligné les déficits, creusant ainsi la dette publique sans interruption. Lorsque la bulle du crédit a éclaté, les marchés obligataires des différents États membres de la zone euro ne présentaient pratiquement pas d’écarts. Au début de l’année 2005, le spread entre les obligations d’État allemandes et grecques n’était en effet que de 9 points de base.

Et la crise financière frappa...

Ensuite, la crise du crédit a touché de plein fouet les marchés obligataires grecs. Début 2009, les spreads ont « explosé » pour atteindre presque 300 points de base, les investisseurs fuyant toutes les obligations à l’exception des obligations d’État jugées les plus sûrs. Les spreads se sont resserrés au cours de l’année 2009 à mesure de l’éloignement de la crise financière et l’économie mondiale a entamé son redressement. Cependant, lorsque le gouvernement fraîchement élu a annoncé en octobre que le déficit budgétaire ne correspondait pas à 3,7% du PIB, comme le gouvernement précédent l’avait prévu pour 2009, mais se rapprochait des 12%, les spreads sont repartis à la hausse.

Les craintes du marché quant à un éventuel défaut de paiement d’un émetteur souverain ont atteint leur paroxysme en décembre lorsque la société nationale Dubai World a sollicité un rééchelonnement de sa dette de 26 milliards de dollars américains. Peu après, les agences de notation ont abaissé la note des dettes souveraines grecque et espagnole, l’Espagne et le Portugal étant parallèlement placés sous surveillance négative. Les marchés ont accueilli avec scepticisme le plan du gouvernement grec visant la réduction du déficit à 3% du PIB d’ici à 2012, estimant que ce plan repose en partie sur des hypothèses optimistes.

Le mois dernier, une obligation d’État a été largement sursouscrite lors de son adjudication, attirant des offres de 25 milliards d’euros. La vente finale de 8 milliards d’euros a été octroyée à un prix élevé. Le coupon a été fixé à 6,1%, soit 290 points de base de plus que le taux des obligations allemandes à 10 ans et 30 points de base de plus que le rendement des obligations grecques sur le marché à ce moment-là. Le succès relatif de cette vente a partiellement apaisé les marchés. Les acteurs du marché ont interprété la forte hausse du coût du financement comme une détérioration effective des perspectives budgétaires. En outre, l’ampleur des efforts requis pour vendre de la dette – qui représente une partie de l’enveloppe de 53 milliards d’euros couvrant les besoins de financement cette année – a fait replonger le marché obligataire.

À quoi doit-on s’attendre ?

Le premier message est qu’il existerait une porte de sortie. Le taux actuel de 6,6% des obligations grecques à 10 ans est comparable à celui observé au début de ce siècle mais reste largement inférieur au pic de plus 11% atteint en 1997. Le taux des obligations grecques à deux ans se situe à presqu’un point de pourcentage sous les niveaux atteints au début du siècle. Selon la société d’analyse économique indépendante Capital Economics, les paiements des intérêts par le gouvernement grec ont légèrement dépassé les 11% du PIB en 1994. Ils se chiffrent actuellement à environ 5% du PIB. Selon l’un des scénarios les plus pessimistes où l’endettement grimpe à 140% du PIB et le taux d’intérêt de cette dette monte à 8%, la charge totale des intérêts passerait à 9% du PIB. Au milieu des années ‘90, la Grèce s’apprêtait à vivre une ère de forte croissance. Aujourd’hui, le pays souffre d’un manque de compétitivité.

La Grèce pourrait traverser cette période difficile en prenant les mesures budgétaires qui s’imposent. Après tout, le pays est toujours en mesure d’emprunter. Pour réussir seule, la Grèce devra rapidement regagner la confiance des marchés. Un volume important d’obligations viendra à échéance dans quelques mois. La Grèce devra alors convaincre les investisseurs que ses obligations sont sûres. Retrouver une crédibilité ne sera pas chose aisée, mais l’approbation par la Commission européenne du plan grec de réduction du déficit constitue un premier pas dans la bonne direction. La Commission a qualifié le plan d’ambitieux mais réaliste. Elle surveillera l’état d’avancement du projet dès le premier jour. Si les objectifs intermédiaires ne sont pas atteints, elle demandera au gouvernement grec de prendre des mesures supplémentaires. Il va sans dire que la pression sur la Grèce est énorme.

Si la crédibilité n’est pas restaurée et si les investisseurs se braquent contre de nouvelles émissions obligataires, la nécessité d’une « solution européenne » se fera plus pressante. José Manuel Barroso, le président de la Commission européenne, a déclaré à ce sujet : « Il apparaît clairement que les politiques économiques ne sont pas uniquement une question d’intérêt national mais aussi une question d’intérêt européen. » Une telle solution pourrait prendre la forme de décaissements accélérés de fonds structurels par l’Union européenne ou d’accords de prêt bilatéraux avec d’autres États membres de la zone euro.

Une intervention du FMI ou un défaut de paiement pur et simple sont des scénarios moins plausibles. D’une part, solliciter l’aide du FMI écornerait sensiblement l’image de l’Union européenne. D’autre part, le défaut de paiement pourrait s’étendre rapidement comme une trainée de poudre à d’autres pays de la zone euro. Les taux des obligations portugaises et espagnoles, en particulier, ont augmenté, et ce mouvement n’est pas terminé. Par conséquent, en cas de défaut de paiement de la Grèce, nous pourrions assister à une « grève des acheteurs » obligataires visant d’autres pays. Évidemment, une telle évolution serait préjudiciable pour la zone euro et sa monnaie.

Conclusion

Bien que le travail d’assainissement des finances publiques s’annonce herculéen, nous pensons que le risque de défaut de paiement est faible. Ce scénario aurait un impact désastreux pour la zone euro dans son ensemble. Toutefois, il reste à voir si le plan actuel de réduction du déficit portera ses fruits. Même si les prévisions de croissance retenues dans le plan sont plutôt optimistes, l’économie grecque souffrira probablement des restrictions budgétaires. Une aide externe sous la forme de fonds structurels européens ou des accords de prêt bilatéraux avec d’autres États membres pourraient s’avérer nécessaires à un moment donné. La barque grecque sera probablement amenée à affronter des vents contraires violents ces prochaines années sur le plan budgétaire. L’époque où l’économie grecque surperformait celle de la zone euro semble dès lors révolue. Les marchés ne suivront pas seulement la Grèce : ils braqueront également leurs projecteurs sur d’autres maillons faibles de la zone euro. Dans ce contexte, des plans de restriction budgétaire ambitieux seront nécessaires pour rassurer les marchés d’obligations.

Par Joost van Leenders, Stratégiste allocation d'actifs.
www.fortisinvestments.com

Jeudi 11 Février 2010




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