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La civilisation post-providence

La crise actuelle est d’abord d’ordre moral. Elle appelle à restaurer dans la société le principe de la responsabilité individuelle.


La civilisation post-providence
C’est un caractère historique de déjà-vu qu’a revêtu la 32e Université d’été de la nouvelle économie, réunissant récemment à Aix-en-Provence certains des penseurs libéraux les plus éminents d’Europe et d’outre-Atlantique : comme le rappelle son initiateur, l’économiste Jacques Garello, il s’agissait, en 1978 déjà, de surmonter les sophismes keynésiens et d’esquisser les alternatives. A l’heure où les programmes de «relance» des gouvernements prolongent et aggravent la crise, le monde semble avoir désappris les enseignements d’alors. Cela commence par l’échec inéluctable des politiques économiques interventionnistes.

Hôte d’honneur de l’Université d’été, Leszek Balcerowicz (Université de Varsovie), ancien ministre des Finances et ancien président de la Banque nationale de Pologne, souligne le paradoxe qu’il y a à blâmer les marchés financiers pour les déboires récents à la place des politiques monétaires et budgétaires catastrophiques des autorités: «Cela équivaut à attribuer la cause de la maladie au médecin qui établit le diagnostic.» La centralisation du pouvoir et la politisation de la société ont mené selon lui à l’instabilité actuelle.

Une analyse que partage l’économiste Pascal Salin (Université Paris-Dauphine): la réponse à la crise des gouvernements ne peut être le renforcement du centralisme européen ou de l’interventionnisme, mais la baisse des dépenses publiques et des impôts. En outre, les banques centrales ne devraient plus pouvoir manipuler à leur guise un indicateur aussi important que le taux d’intérêt, dont les distorsions incitent à des investissements non rentables ou trop risqués que le marché doit ensuite corriger.

Pourtant, les gouvernements semblent persister dans l’incohérence. Victoria Curzon Price (Université de Genève) observe à cet égard la montée du protectionnisme dans l’Union européenne pour tenter de sauver l’Etat-providence: les réglementations techniques ou environnementales se multiplient afin d’augmenter les coûts des produits en provenance de régions concurrentes. Or, la combinaison des charges sociales et du protectionnisme ne peut qu’entraver le retour à la prospérité.

Comment dès lors en sortir et éviter de passer des désillusions de l’Etat social en faillite au collectivisme xénophobe qui semble se dessiner dans plusieurs pays d’Europe ? Stephen Davies (Université de Buckingham) insiste sur le côté positif d’une diminution drastique de la taille de l’Etat: plutôt que de coupes dans les prestations, il s’agit plutôt d’accroître l’autonomie personnelle et les choix individuels et d’étendre de ce fait le rôle de la société civile et des marchés. Le défi est donc moins technique que moral.

Les libéraux ont d’ailleurs toujours mis en avant la vision humaniste de leur philosophie. «La dignité de l’être humain, la dimension éthique de la liberté dans la vie sociale sont plus parlantes que l’efficacité et la croissance économiques», relève Jacques Garello. Le pragmatisme à court terme a trop souvent négligé cette approche morale. Pour Mario Rizzo (Université de New York), il n’est donc pas surprenant que chaque groupe d’intérêts défende aujourd’hui son pré carré, au détriment d’une vue d’ensemble devant nécessairement mener à un redimensionnement de l’Etat.

Les philosophes libéraux identifient dans l’Etat-providence l’antithèse même d’une conduite morale. En effet, l’Etat social fonde son action sur la contrainte, il encourage la dépendance et de nouvelles formes d’inégalité et mène à l’atomisation de la société. Il conduit finalement à la stagnation économique. Il ne fait aucun doute, pour les économistes non plus, que la crise actuelle ne se résoudra pas avec un énième programme d’illusionnisme keynésien, mais uniquement en renouant avec l’éthique de la responsabilité individuelle.

PIERRE BESSARD
Lundi 5 septembre 2011
Numéro 157

L’Agefi, quotidien de l’Agence économique et financière à Genève
www.agefi.com

Jeudi 8 Septembre 2011




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