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La Fed et la BCE à l'unisson, mais pour quels résultats ?

« Pendant une période de temps considérable ». Tel est le principal message adressé par la Présidente de la réserve fédérale américaine Janet Yellen lors du dernier FOMC en matière d'évolution des taux directeurs de la Fed. Autrement dit, après avoir annoncé une première hausse du taux objectif des federal funds pour la mi-2015, les dirigeants monétaires américains ne semblent plus sûrs de rien.


Marc Touati
Marc Touati
Pourtant, avec une croissance annualisée de 4,2 % au deuxième trimestre 2014, un taux de chômage de 6,1 % en août, mais aussi des indicateurs des directeurs d'achat sur des sommets en septembre et une inflation proche des 2 %, la Fed aurait pu commencer à préparer la planète à un prochain resserrement monétaire.

Celui-ci n'est d'ailleurs pas seulement justifié par la bonne tenue de l'activité, mais aussi par la nécessité de reconstituer une marge de manœuvre suffisante à utiliser en cas de fort ralentissement économique. En effet, la durée normale d'un cycle de croissance (récession-reprise-croissance-récession) oscille entre 30 et 40 trimestres outre-Atlantique. Or, le cycle actuel est déjà « âgé » de 26 trimestres. Cela signifie donc que la prochaine récession américaine aura lieu d'ici quatre à quatorze trimestres. Or, si d'ici là, les taux de la Fed n'ont pas été remontés, celle-ci ne disposera d'aucune marge de manœuvre pour relancer la machine.

Il est donc indispensable que la Fed resserre son étreinte monétaire en 2015 pour commercer son travail de « reconstruction ». Il en va également de sa crédibilité et de celle de sa Présidente. Car, même s'il est toujours plus agréable d'être une « colombe » qu'un « faucon », c'est-à-dire de privilégier la rechercher du plein-emploi face à la lutte contre l'inflation, une politique monétaire trop accommodante peut aussi engendrer une « trappe à liquidités », c'est-à-dire accroître excessivement l'épargne au détriment de la consommation et de l'investissement, ce qui finira par susciter une bulle financière.

C'est notamment ce qu'avait créé Alan Greenspan dans les années 2003-2005, avant d'obliger son successeur Ben Bernanke à augmenter trop fortement le taux objectif des federal funds et de faire éclater la bulle des subprimes.

Si nous n'en sommes pas encore là, il serait donc opportun d'éviter ce type d'erreur, en resserrant en douceur l'étreinte monétaire de la Fed, plutôt que d'obliger cette dernière à agir dans l'urgence et à engager les Etats-Unis et la planète dans une nouvelle crise économico-financière.

Toujours est-il que, même si la Fed prend son temps pour agir et ne souhaite prendre aucun risque, elle augmentera ses taux directeurs avant que la BCE ne le fasse.

En effet, comme ne cesse de le confirmer Mario Draghi et les dirigeants monétaires eurolandais, le taux refi restera également sur des planchers historiques pendant une période considérable.

La grande différence qui persiste entre les deux côtés de l'Atlantique réside néanmoins dans les écarts de croissance qui demeurent particulièrement élevés. Et pour cause : si la progression annuelle du PIB américain devrait dépasser les 2,1 % cette année et les 3 % en 2015, celle du PIB eurolandais avoisinera 0,7 % cette année et au mieux 1 % l'an prochain. Pis, alors que les derniers indicateurs avancés annoncent une accélération de l'activité outre-Atlantique, ceux de la zone euro indiquent une rechute qui a d'ailleurs déjà commencé.

Autrement dit, si la Fed pourra aisément augmenter ses taux directeurs l'an prochain pour accompagner la reprise, la BCE ne sera pas en mesure de le faire avant 2016, si tout va bien.

La seule bonne nouvelle de ces différences de croissance et de politique monétaire réside dans la poursuite inévitable de la baisse de l'euro face au dollar. La devise européenne devrait effectivement se rapprocher des 1,15 dollar pour un euro d'ici l'été 2015, permettant enfin à la croissance eurolandaise de dépasser durablement et significativement la barre des 1 %... en 2016. Mieux vaut tard que jamais.

La question reste néanmoins de savoir si cette reprise sera durable. Et, sur ce point, rien n'est moins sûr. En effet, en 2016, la croissance américaine, mais également celle de la planète, entrera dans une phase logique de ralentissement, qui ne manquera évidemment pas d'affecter négativement la croissance eurolandaise.

C'est bien là le drame de l'économie de la zone euro : lorsque son homologue américaine croît fortement, elle la suit avec un retard conséquent et à un rythme de croissance moindre. A l'inverse, lorsque l'économie des Etats-Unis faiblit, elle ne tarde pas à suivre ses pas, voire à régresser davantage. Cela s'observe depuis le début des années 1990. Pour une raison simple : alors que les Etats-Unis ont engagé de profondes réformes dans les années 1980, qui leur ont notamment permis de profiter à plein de la révolution des NTIC dans les années 1990 et jusqu'en 2001, les pays européens sont restés dans l'archaïsme et ont refusé de moderniser en profondeur leurs structures économiques.

Certes, les Allemands ont enfin réagi au début des années 2000 et les pays d'Europe du Sud l'ont également fait depuis 2010. Seule la France manque encore à l'appel. Et vu les récentes déclarations de François Hollande, elle n'est pas près de rattraper son retard. Dommage pour nous et pour la construction d'une Europe forte, à même de concurrencer les Etats-Unis. Car si la politique monétaire peut aider, elle reste une condition nécessaire mais non suffisante pour retrouver le chemin de la croissance forte et durable.

Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).

www.acdefi.com


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Lundi 22 Septembre 2014




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