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L’Europe face au défi de la stagnation économique "structurelle" - 2 juin 2015

L’histoire du Continent européen depuis deux siècles a alterné les phases de croissance économique et de récession. La fin des guerres napoléoniennes et la défaite de Waterloo ont permis de renouer avec un essor économique qui avait été mis à mal, à la fois par le « Blocus Continental », les destructions causées par les combats et les pertes humaines provoquées par dix ans de conflit.


Bernard Marois
Bernard Marois
Le dix-neuvième siècle, (pour être précis, la période 1815-1914) a été marqué par une économie européenne florissante et dominatrice : moins de guerres ; une industrialisation qui s’est répandue jusqu’en Russie ; la stabilité monétaire et le développement du libéralisme, surtout après 1860, accompagné d’une libéralisation des échanges, ont facilité une croissance supérieure en moyenne à 1 %, en ligne avec une démographie favorable, compte-tenu de la baisse de la mortalité. Certes, les inégalités sociales restaient fortes, mais la création des syndicats, puis l’apparition de partis « socialistes » à travers toute l’Europe ont progressivement amené une amélioration de la « condition ouvrière », ainsi que l’émergence de « classes moyennes » susceptibles de financer l’expansion grâce à leur épargne.

La deuxième période, 1914-1945, correspond à la fois à l’effondrement des puissances européennes au niveau mondial, à la suite des deux « guerres civiles » du vingtième siècle. Les morts (20 millions pour la première guerre mondiale ; 30 millions pour la seconde) ont saigné « à blanc », le continent, Russie (ou U.R.S.S.) comprise. Le dossier des « réparations » dues par les vaincus de 1918, la reconstruction des régions dévastées par la guerre n’ont pas permis de « réunifier » le continent, qui, par ailleurs, a souffert avec retard de la crise de 1929 aux Etats-Unis. De ce fait, les années 1919-1939 ont conjugué inflation galopante (Allemagne de 1923), déflation destructrice d’emplois (toute l’Europe à partir de 1931), instabilité monétaire marquée par des dévaluations à répétition, dans une Europe moins peuplée en 1939 qu’au début du siècle. Le pire était à venir, avec l’éclatement de la seconde guerre mondiale en 1939 et son cortège de désastres humains et économiques.

On comprend que la troisième période, 1945-1975 ait été qualifiée de « Trente Glorieuses » dans les principaux pays européens de l’Ouest (cela est beaucoup moins vrai en ce qui concerne l’Europe orientale, victime des prédations du voisin soviétique). Grâce au plan Marshall, la reconstruction a permis de dégager des taux de croissance « exceptionnels » (4 % - 5 % du PIB). La croissance démographique est restée forte pendant cette période et la construction européenne (la C.E.C.A. puis la création de la C.E.E.) a permis d’éviter les erreurs de l’après-guerre précédente, tout en dotant l’Europe d’un nouveau dynamisme.

On peut alors identifier une quatrième période, qui s’étend de 1976 à 2008, pendant laquelle l’Europe a connu, d’une part, des événements heureux, tels que la constitution de l’Union Européenne qui englobe aujourd’hui 28 Etats, ou la chute du « Mur de Berlin » suivie de la « réunification » du Continent et, d’autre part, des péripéties négatives, (ainsi, le quadruplement des prix du pétrole, l’éclatement du système monétaire européen, le S.M.E. ou les débats houleux portant sur le traité de Maastricht ou la Constitution Européenne). Enfin, certaines décisions restent sources de discordes, telle que la création de l’euro ou l’élargissement de l’Union. Pendant cette période, le taux de croissance a ralenti progressivement, passant de 4 % à 1,5 %, alors que la démographie a commencé à se détériorer, le nombre moyen d’enfants par couple tombant en dessous de 2, pour de nombreux pays (Allemagne, Espagne, Italie…).

Nous sommes rentrés dans la cinquième période depuis la crise financière des « subprimes » de 2007/2008, qui s’est poursuivie par les soubresauts liés à l’endettement excessif d’un certain nombre de pays européens. Cette crise « souveraine » s’est particulièrement fait sentir lors de « l’épisode grec » (toujours d’actualité) qui a, par ailleurs, mis en danger l’euro lui-même. La crise financière a provoqué une récession économique dont l’Union Européenne a du mal à sortir : peu de pays ont retrouvé leur niveau d’avant 2008. Après lissage sur 7 ans (2008-2014) on peut considérer que la croissance moyenne est donc nulle.

Cependant, 2015a permis d’entrevoir un « frémissement», dû en grande partie à « l’alignement des planètes », c’est-à-dire, la baisse du prix du pétrole jointe à la baisse des taux d’intérêt réels et, pour la zone euro, la chute de la monnaie commune face au dollar. On prévoit donc une croissance globale de 1,6 % en 2015, avec des écarts importants : la Grande Bretagne, hors zone euro, pourrait connaître un essor voisin de 3 %, contre 1,8 % pour l’Allemagne ou 2,5 % pour l’Espagne et 1,2 % pour la France.

Et au-delà ? Rappelons d’abord que la croissance économique, en temps normal (c’est-à-dire hors période de reconstruction) est fonction de 2 variables principales : la démographie qui détermine la taille du marché national et l’innovation qui permet de s’imposer sur les marchés internationaux (à condition que les produits vendus soient suffisamment compétitifs). Sur le premier point, l’Europe est mal partie : le continent connaît une décroissance démographique, à peine ralentie par l’immigration (subie, plutôt que choisie) ; c’est un phénomène qui menace de s’amplifier, compte tenu de l’aspect cumulatif de la baisse de la natalité. En ce qui concerne l’innovation, l’Europe conserve des positions fortes dans certains secteurs (aéronautique, spatial, nucléaire, médical, infrastructures…), mais la conservation de ces avantages compétitifs exigent des investissements accrus, dont le financement peut poser problème (faiblesse du « private equity » ; marges bénéficiaires insuffisantes des entreprises dans certains pays, dont la France ; frilosité des banques soumises à des contraintes règlementaires de plus en plus sévères). En outre, « l’alignement des planètes » n’est pas éternel ! Les taux réels ne peuvent que remonter (ils sont à des plus bas historiques) ; le prix du pétrole pourrait également s’apprécier si les risques géopolitiques (Moyen-Orient, Ukraine) se concrétisent. Quant à l’euro, sa baisse accélérée amène les investisseurs internationaux à s’intéresser à nos entreprises (par exemple, les Chinois, les Qataris et, bien sûr, les Américains bénéficiant d’un dollar fort) et, se faisant, en achetant des euros, sont susceptibles de le faire remonter.

Par conséquent, à moyen terme, l’Europe apparaît « fragilisée». Son avenir dépendra de la façon dont elle gèrera sa démographie, pour arrêter l’hémorragie dont elle souffre (mise en place de politiques natalistes ou/et choix difficiles en matière d’immigration) et de ses efforts pour conserver une industrie compétitive au niveau mondial, tout en réformant ses structures, y compris au niveau « fédéral » (avenir de l’euro ; place du Royaume-Uni…).


Mercredi 17 Juin 2015




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