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Hara Kiri des fonds Luxembourgeois

Charles Muller, directeur général adjoint de l'Alfi (Association Luxembourgeoise des Fonds d’Investissements), a donné récemment une interview pour rassurer (« C. Muller, Alfi : ‘Luxembourg et France offrent la même protection’ »News-managers, 20 Janvier 2009) dans le contexte de l’affaire Madoff et de l’l'adoption du passeport européen des sociétés de gestion.


Jérôme Turquey
Jérôme Turquey
Quelques passages valent la peine d’être commentés car ils sont révélateurs d’une juridiction en déroute faute d’avoir fait son aggiornamento vers l’éthique des affaires au milieu des années 2000.

1.

« L’objectif est maintenant de faire de ce passeport une opportunité. Et cela pourra éventuellement passer par une réforme du cadre légal pour les sociétés de gestion ou par un aménagement des règles fiscales… Lorsque nous aurons décidé, nous présenterons nos propositions au gouvernement. »

« Lorsque nous aurons décidé » : qui décide au Luxembourg ? C’est le secteur financier, qui est un pouvoir qui fait pression sur l’Exécutif, le Législatif et le Judiciaire. L’analyse des débats parlementaires des dernières années montre que les professionnels imposent leurs vues. Il suffit d’analyser les atermoiements pour introduire la responsabilité pénale des personnes morales ou transposer les directives anti-blanchiment.

2.

« Je voudrais donc rappeler qu’au Luxembourg, comme en France, il y a d’abord les responsabilités prévues par la directive européenne, que nous avons transposée.
Ensuite, en France, il y a la responsabilité de restitution des actifs. Elle est inscrite dans le Code civil. Or, il se trouve que notre code civil est le même que le français. Donc non seulement, nous avons les obligations de la loi européenne, mais aussi l’obligation de restitution. Et cette obligation de restitution est aussi valable quand il y a délégation. (…) la loi est claire au Luxembourg»

La transposition des directives est pragmatique aux dires mêmes des leaders de la place.
La ligne de défense du pays ces derniers jours (déclaration de L. Frieden, déclarations de C. Muller...) consistant à répéter qu’un "dépositaire luxembourgeois avait une obligation de conservation, de surveillance, de contrôle et de restitution des actifs du fonds" (L. Frieden cité par Paperjam le 16 janvier 2009), "la loi est claire au Luxembourg" (C. Muller à News-Managers) est contreproductive et s’apparente à la méthode Coué, qui n’est pas une méthode de management ou de gouvernance.
A aucun moment, ils ne citent aucun texte/article précis. Et pour cause. A force de finasser dans la rédaction des textes sous la pression du secteur financier, comme en matière de prévention du blanchiment, la règle devient discutable et contournable i.e. prag-ma-ti-que.
C. Muller cite le Code Civil. Il s’agit sans doute implicitement l'article 1915 du Code Civil qui dispose que "Le dépôt, en général, est un acte par lequel on reçoit la chose d'autrui, à la charge de la garder et de la restituer en nature" : si cet article était appliqué à la lettre pour le business des fonds, cela voudrait dire que si l'investisseur investit X EUR dans un fonds, l'investisseur peut réclamer ses X EUR en retour même si la VNI (Valeur Nette d’Inventaire) baisse
Si cela est le cas, alors que le marché est baissier on ne peut que recommander aux investisseurs ayant investi dans les fonds luxembourgeois dont certain ont bien baissé de réclamer le remboursement des sommes investies : sur le fondement de l'article 1915 du Code Civil dont l’AFLI par son représentant a dit qu’il est applicable aux fonds au Luxembourg.

3.

« En plus, dans le grand-duché, le dépositaire doit avoir le statut de banque. Cela lui donne une assise financière et le soumet davantage au risque de réputation ; D’ailleurs, dans le cadre d’une harmonisation européenne de la réglementation pour les dépositaires, à laquelle nous sommes favorables, nous souhaitons que les dépositaires soient obligés d’avoir le statut de banque.

A quoi cela sert t’il d’imposer que le dépositaire soit une banque, si comme au Luxembourg, il peut déléguer à un tiers n’ayant qu’une obligation de « surveillance » entendue comme la conviction dès le départ et pendant toute la durée du contrat que les tiers auprès desquels les actifs de l'opc sont en dépôt, sont honorables et compétents, et bénéficient d'un crédit suffisant (Cf. la Circulaire IML 91/75 telle que modifiée par la Circulaire CSSF 05/177, qui est toujours en vigueur et concerne la Révision et refonte des règles auxquelles sont soumis les organismes luxembourgeois qui relèvent de la loi du 30 mars 1988 relative aux organismes de placement collectif ("opc").
Ladite circulaire d’ailleurs ne parle à aucun moment pour le dépositaire de restituer ou de restitution, alors même qu’au Luxembourg sont honorables et compétentes et bénéficient de crédit des personnes morales et physiques dont le comportement est non conforme aux bonnes pratiques de management et gouvernance.

4.

« Mais jamais ce chiffre [de 5 à 7 milliards d’euros d’exposition des fonds luxembourgeois à Madoff] n’a été évoqué. Ce qui est sûr, c’est qu’il ne vient ni de la CSSF, ni de l’Alfi. »

En insistant que le chiffre ne vient ni de la CSSF, ni de l’Alfi, le représentant de l’ALFI montre la contrariété que le chiffre ait circulé. Il ne dément pas le chiffre.

5.

« Les avoirs sous gestion de l’industrie sont descendus de près de 2.100 milliards d’euros en octobre 2007 à 1.600 milliards en novembre 2008. »

Cela représente une baisse de 24%. En continuant ainsi à prendre l’investisseur pour un imbécile, nul doute que cette tendance va se poursuivre.

Alors que le Président Obama, adversaire des abus des centres offshore et de leurs professionnels (banquiers, avocats, auditeurs…) « pragmatiques » vient d’être investi, il convient de définir un référentiel éthique pour les places financières et séparer le bon grain de l’ivraie pour l’investisseur.

Ses critères pourraient être :
  • Crédibilité des affirmations éthiques
  • Moyens de détection et de sanction des dysfonctionnements
  • Crédibilité des sanctions
  • Transparence
  • Indépendance réelle des auditeurs
  • Respect de l'investisseur

Jérôme Turquey Jérôme Turquey
Auditeur-conseil indépendant en éthique des affaires et risque de réputation
Chargé de cours en Master de Sciences criminelles sur les paradis financiers
j.turquey@wanadoo.fr
http://ethiquedesplaces.blogspirit.com


Jeudi 22 Janvier 2009




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