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Croissance française en 2013 : chute libre...

Comment revenir sur ses promesses tenues avec obstination sans perdre la face et rester crédible ? Tel est l'exercice périlleux auquel vont devoir se livrer François Hollande et le gouvernement Ayrault.


Marc Touati
Marc Touati
Le spectacle d'acrobatie digne du cirque Pinder a déjà commencé. Dès la publication des comptes nationaux du quatrième trimestre 2013, jeudi 14 février, les lasagnes au cheval ont vampirisé la scène médiatique, si bien que l'entrée de la France en récession dès le premier trimestre 2012 et la forte baisse du PIB hexagonal au quatrième trimestre sont quasiment passés inaperçues.

Seulement voilà, on ne peut pas cacher la vérité éternellement. Ainsi, depuis quelques jours, les dirigeants politiques français, depuis le Président jusqu'aux ministres et députés, en passant par le chef du gouvernement, enchaînent les petites phrases et les nouvelles prévisions de croissance. Autour de 0,2 % à 0,3 % selon Laurent Fabius, pas de chiffrage précis pour MM. Hollande et Ayrault qui se bornent à souligner qu'il ne sert à rien de maintenir des objectifs de croissance intenables. Effectivement. Mais, alors pourquoi s'être entêté à maintenir une prévision de 0,8 % pendant des mois alors que cette dernière n'était déjà plus crédible depuis la mi-2012 ?

La palme de l'acrobatie revient néanmoins à Michel Sapin qui, tout en se contorsionnant pour essayer d'annoncer que l'activité économique et l'emploi resteraient plus que moribonds en 2013, n'a pas hésité à souligner que la croissance allait nettement redémarrer au second semestre. Une déclaration digne de « La vérité si je mens 4 ». Seulement voilà, à force d'utiliser les mêmes filons, cela commence à devenir lassant.

Il faut reconnaître que le Ministre de l'Emploi est encore plus gêné aux entournures que ses collègues du gouvernement. Et pour cause : le Président Hollande s'est engagé à inverser la courbe du chômage dès l'automne 2013. Or, si pour de trop nombreux Français, l'évolution de la croissance reste très superficielle et très éloignée de leurs préoccupations du quotidien, celle du chômage est beaucoup plus concrète.

D'ores et déjà, avec un taux de chômage global de 10,6 % et de 27 % pour les moins de 25 ans, il est possible de dire que presque toutes les familles françaises sont concernées de près ou de loin par ce fléau.

Et, malheureusement, dans la mesure où l'emploi et le chômage sont des variables retardées de l'activité, il faut être clair : tant que la croissance ne sera pas revenue significativement et durablement, le nombre de sans-emploi continuera d'augmenter. En fait, pour stabiliser le chômage, la croissance doit atteindre au moins 1,5 % et, pour le faire baisser, elle doit dépasser les 2 %.

Or, au cours des prochains trimestres, nous serons très loin de ces résultats. Et pour cause : la variation annuelle moyenne du PIB français en 2013 ne sera pas de 0,3 %, ni même 0 %, mais d'au mieux - 0,3 %. Après s'être contorsionnés pour réussir à abaisser leurs prévisions de 0,8 % à 0,3 %, les dirigeants politiques français vont donc devoir repartir à l'école du cirque, pour admettre que l'année 2013 sera marquée par une baisse du PIB français.

Bien sûr, de nouveaux contre-feux seront allumés : intensification des combats au Mali, réactivation du débat sur le mariage pour tous et la PMA ou encore découverte de bâtonnets de cabillaud contenant du poulet… Plus ce sera gros, plus cela fera oublier la gravité de la récession.

Pour autant, ne l'oublions pas, s'il est relativement facile de manipuler l'opinion, il est plus difficile de duper les investisseurs internationaux. Or, ces derniers détiennent près de 70 % de la dette publique française. En tant que créanciers de l'Etat français, ils attendent donc des garanties et des gages de sérieux de la part de ce dernier.

Et, malheureusement, plus le temps passe, plus la crédibilité de l'Etat français fond comme neige au soleil. Tout d'abord, en dépit des efforts d'équilibriste pour laisser croire que le dérapage du déficit public est « normal », ce dernier sera très loin de l'objectif gouvernemental. Il devrait avoisiner les 4 % en 2013, contre 3 % annoncé par MM. Hollande, Ayrault, Moscovici et tutti quanti depuis des mois.

Dès lors, après avoir acheté sans compter des obligations du Trésor français, nos créanciers risquent de s'avérer beaucoup moins conciliants. Mécaniquement, les taux d'intérêt de ces obligations se tendront, au moins vers les 4 %, ce qui ne manquera pas d'aggraver la récession et d'augmenter le chômage. Les déficits publics progresseront et la France plongera dans un cercle pernicieux détestable.

Une vague de défiance nationale et internationale s'engagera alors, réduisant encore la piètre crédibilité économique de l'Hexagone. La récente lettre du PDG de Titan à M. Montebourg sur l'affaire Goodyear montre d'ailleurs que cette attaque en règle contre la France a déjà commencé. En effet, si, pour nous Français, ce courrier incendiaire est presque insultant, il montre dans quel état de ras-le-bol se trouvent de plus en plus de dirigeants d'entreprises, qu'ils soient étrangers mais aussi français. Il ne sert donc à rien de dénigrer le PDG de Titan, mais il faut plutôt essayer de savoir pourquoi il en est arrivé à une telle extrémité.

Une chose est sûre : à force de vouloir laisser croire qu'elle peut faire ce qu'elle veut en toute impunité, tout en prenant des mesures qui nuisent à notre compétitivité et à notre crédibilité, la France va vraiment se retrouver toute seule.

Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).

www.acdefi.com


Vendredi 22 Février 2013




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