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Comment les recruteurs en finance se préparent à l’après-crise ?

eFinancialCareers.fr, le premier site d’offres d’emploi spécialisé dans les secteurs de la banque et de la finance, a organisé le 6 octobre 2009 sa deuxième table ronde pour savoir comment les recruteurs en finance se préparaient à l’après-crise.


Voici le compte-rendu des échanges entre les participants présents ce jour là :
Jean-Paul Brette, Directeur du département Banque-Finance-Assurance chez Hudson
Xavier Fontquerni-Ribé, Directeur des Ressources Humaines de HSBC Private Bank France
Jean-François Monteil, Président du cabinet de chasseur de têtes Alexandre Hughes France

Introduction
Le cabinet de conseil en recrutement et en ressources humaines Hudson a mené au printemps 2009 une étude auprès de 500 DRH dans plus de 30 pays pour les interroger sur leurs priorités en temps de crise. « Ce peut être une bonne introduction pour ce débat dans la mesure ou cela peut déjà nous donner des indications sur leurs préoccupations dans l’après-crise », explique Jean-Paul Brette qui dirige la practice Financial Services.

Une certaine homogénéité se dégage dans les réponses sur les préoccupations et les actions. On y apprend que leurs comportements ont changés, qu’ils ont appris des crises précédentes. « La réponse des DRH aux crises précédentes (y compris celle de 2002) était le "downsizing" (réduction des effectifs) alors qu’aujourd’hui on parle de "rightsizing" (recalibrage), ce qui n’est pas tout à fait la même sémantique », poursuit Jean-Paul Brette. En effet, les entreprises sont conscientes que les cycles économiques sont de plus en plus courts et qu’il ne faut pas rater les reprises pour pouvoir bénéficier pleinement des périodes de croissance. « Dans ce cadre, leur objectif est également de fidéliser leurs hauts potentiels pour ne pas rater le train de la reprise économique ».

Si le constat et l’objectif sont identiques, le traitement peut prendre des formes différentes entre les pays anglo-saxons et les pays d’Europe continentale. « Dans ces derniers, la place donnée au développement à travers la formation est plus importante », précise Jean-Paul Brette.

« Stop & Go » ?
Depuis fin 2008, le marché du recrutement dans la banque se caractérise par sa prudence. La crise perceptible dès la fin du 3ème trimestre 2008 a eu un impact sur les budgets 2009 avec souvent à la clé des politiques de « stop and go » - intermittence entre gel et relance des embauches – au niveau des recrutements ainsi qu’une très forte volonté de maîtrise des coûts liés au recrutement.

« Les politiques RH sont complètement différente d’un pays à l’autre », explique Xavier Fontquerni-Ribé, DRH de HSBC Private Bank France, filiale 100 % du groupe HSBC qui compte 325 000 salariés répartis sur 9500 implantations dans 86 pays et territoires. « En France, nous avons absolument voulu éviter le stop and go qui consiste à recruter massivement, puis à arrêter, pour enfin, recommencer les recrutements. Nous avons surtout essayé de recruter et de gérer les carrières différemment. Et pour cause : notre Groupe s’est fixé comme objectif de devenir ‘le meilleur employeur’ ». Il ne s’agit pas simplement de recruter en même temps que tout le monde et d’arrêter quand tout le monde arrête. « Nous travaillons beaucoup plus sur les carrières des collaborateurs, en leur proposant notamment, des projets de carrière sur le long terme. C’est pourquoi si nos recrutements ont été moins importants cette année, nous avons recruté des profils beaucoup plus juniors, qui nous rejoignaient sur notre modèle de banque internationale offrant la capacité de travailler au sein d’une structure matricielle ». Quelle que soit la fonction occupée, le jeune salarié affiche un raisonnement « Groupe » plutôt que seulement « poste à Paris ».

« Si ça redémarre vraiment, dans les équipes qui étaient en sous-effectifs, il faut pouvoir tourner avec de la compétence immédiatement opérationnelle, explique pour sa part Jean-François Monteil, directeur du cabinet de chasseurs de têtes Alexander Hughes France et qui couvre depuis Paris la zone EMEA au niveau mondial. Il faux veiller à ne pas recruter trop tôt ni à être le dernier à recruter : c’est une équation difficile à résoudre, avec un impact sur le prix à payer. Si la course aux talents surgit après le paiement des bonus en mars prochain, cela risque d’être difficile. D’où la nécessite de revaloriser les rémunérations fixes, pour ne pas avoir à verser de bonus garantis, même si quelques « bulge brackets » continuent de pratiquer des bonus garantis ». Enfin, selon lui, il faut relativiser ce qui se passe en France, notamment dans la BFI. « Il n’y a pas eu de charrettes de licenciements de 20.000 personnes comme à la City où quand tout va bien 340.000 y travaillent, mais que ce chiffre tombe à 320.000 quand ça va moins bien et à 290.000 quand tout va mal ! ».

Frémissements dans certains métiers
« Globalement, la profession du recrutement et de la chasse de tête est à moins 40 % en 2008. On espère finir l’année à moins 30 %, preuve d’un léger frémissement», explique Jean-François Monteil, pour qui « tout dépend de la ligne métier ». Voici son analyse secteur par secteur :

Le marché de la vente obligataire sur les marchés de capitaux (fixed income) est porteur. Comme il y a moins d’acteurs, des banques pensent qu’il y a moyen de se refaire des marges, notamment dans les pays anglo-saxons, où un établissement comme Goldman Sachs est allé débaucher les meilleurs. Pour sa part, UBS a multiplié par 1,5 le salaire fixe de ses Managing Directors en fixed income afin de ne pas avoir à garantir les bonus.

Concernant les grandes opérations de fusions et acquisitions, c’était calme jusqu’à cet été, où tout était en suspend. Il n’y a pas toujours pas abondance de deals M&A mais il y en a suffisamment assez pour recréer une activité. Toute une chaîne se met d’ailleurs en place : des équipes de M&A sont en train de se reconstituer, de même que les départements transaction services dans les cabinets conseils.

Le conseil en restructuration continue d’embaucher. Dans le Public Finance, il y a toujours besoin de financement pour les collectivités publiques du fait du nombre élevé de projets d’infrastructures. On observe par ailleurs un rattrapage au niveau des commodities ou des dérivés actions.

En Private banking, les banques recherchent de bons commerciaux pour se différencier d’une très forte concurrence. Enfin, dans le primaire actions, certains se disent que si la Bourse est moins mauvaise peut-être ils pourront faire davantage d’introductions (IPO). Il faut juste que ça passe le stade de la décision. On espère que ça va déboucher...

« Toutes ces niches (ou sous-niches) concourent en tout cas à ce que la situation soit moins pire qu’il y a quelques mois. Ce n’est pas à proprement parler une relance, mais une légère embellie », conclut Jean-François Monteil.

Quid des jeunes diplômés
L’industrie bancaire est une industrie de main d’œuvre qui traditionnellement a vocation à beaucoup recruter. « Sur ces recrutements près des trois quarts sont des jeunes diplômés, et les trois quarts d’entre eux vont en banque de détail. Telle est la réalité du marché », commente Jean-Paul Brette. Quand tout va bien, les banques, qui ont l’obligation de se tourner fortement vers cette population de jeunes diplômés sont en concurrence avec d’autres industries (notamment l’audit et le conseil en stratégie sur le segment haut de gamme). Il y a encore deux ans, certaines banques dépensaient beaucoup d’argent et d’énergie pour faire des opérations de recrutement de jeunes diplômés.

« Avec la crise, tout ceci est terminé. Il y a certes toujours un marché du recrutement des jeunes diplômés mais moins important qu’avant », fait remarquer Jean-Paul Brette. Finie l’époque où les banques exploraient des "gisements de compétences méconnus" en se tournant vers des diplômes universitaires moins en lien direct avec la sphère financière. Même les jeunes diplômés qui sortent des grandes écoles de commerce, pourtant les mieux armés, ne reçoivent plus à la sortie de leurs études qu’une seule proposition d’emploi contre plusieurs précédemment.

Enfin, les stages sont plus difficiles à obtenir, les accords d’obtention de stage étant parfois délivrés au dernier moment. « Aujourd’hui, le processus de recrutement des stagiaires est devenu identique à celui des jeunes diplômés en CDI : entretiens psychologiques, tests de personnalité et d’intelligence, plusieurs entretiens avec les opérationnels. Avec à la clé un meilleur taux de transformation des stagiaires en CDI », note Jean-Paul Brette.

« Chez HSBC Private Banking France, nous avons fortement réduit le nombre de stagiaires au profit de l’alternance. Chez nous, le processus de recrutement reste simple, avec un entretien RH tous les deux mois. Nous sommes clairement dans une logique de vivier », précise Xavier Fontquerni-Ribé.

Ce qui change pour les RH
Syntec Conseil en Recrutement, le syndicat professionnel de notre métier, a fait mener début mai 2009 par l’IFOP une étude sur les intentions des DRH des entreprises françaises en matière de recrutements. Il apparaît clairement que la priorité est donnée à la mobilité interne pour les profils confirmés. Ce n’est qu’ensuite que les entreprises se tournent vers l’extérieur.

« On commence cependant à voir apparaître une approche anglo-saxonne qui est en train de se développer: l’outsourcing partiel ou total », explique Jean-Paul Brette. Certaines entreprises ont ainsi fait le choix d’externaliser le recrutement de populations pouvant aller des jeunes diplômés jusqu’aux cadres avec 5 ans expérience. Elles conservent la maîtrise d’ouvrage (en l’occurrence la politique de recrutement) mais délèguent la maîtrise d’œuvre.

Enfin, les recrutements externes sont rares mais doivent être encore plus couronnés de succès. « Les entreprises ne se contentent pas d’évaluer les savoir faire techniques et sont très demandeuses d’assessment centers pour les recrutements de cadres stratégiques, qui permettent de bien mesurer les compétences comportementales nécessaires pour réussir dans des environnements évolutifs », note le Directeur du département Banque-Finance-Assurance chez Hudson.

HSBC France, qui emploie 11 700 personnes présentes sur tous les métiers de la banque, a recruté 500 personnes pour le réseau et 216 pour la BFI. Pour sa part, HSBC Private Banking France a procédé à 50 recrutements l’an dernier, sur un effectif total de 300 personnes basées à Paris, Bordeaux, Marseille et Lyon. « Dès que l’on poste une annonce, le volume de retour est beaucoup plus important. Nous essuyons très peu de refus, que ce soit pour un poste en alternance, un CDD ou un CDI. Nous travaillons sur le long terme : nous ne profitons pas de cette situation et de ses effets d’aubaine mais nous recrutons sur les mêmes bases de salaires qu’avant et avec des niveaux d’exigence qui restent identiques avec une projection qui est bien réelle, explique Xavier Fontquerni-Ribé. Nous faisons jouer la mobilité interne au niveau international, si bien qu’en externe, notre niveau d’exigence est encore plus élevé : nous recherchons des candidats avec un corps de compétences très précis et élevé, qui vont pouvoir évoluer dans l’ensemble du Groupe, et pas seulement la banque privée ».

(Re)motiver les cadres
Il y a cinq ans le concept « the best place to work » - ce sentiment d’être fier d’appartenir à l’entreprise - n’existait pas. « Aujourd’hui, la population qui ne raisonne que sur le plan quantitatif s’est considérablement réduite. Les candidats qui bougent le font avant tout pour des projets qualitatifs, explique Jean-François Monteil. C’est d’autant plus vrai que la hausse des salaires n’est pas d’actualité, même s’il est vrai que certaines fonctions sont mieux rémunérées que dans le passé (contrôle, risques, compliance...). J’ai même vu des exemples de candidats prêts à accepter une diminution de salaire ».

Xavier Fontquerni-Ribé s’exprime à son tour sur le sujet : « A la DRH, nous passons désormais beaucoup plus de temps à travailler sur l’optimisation des compétences des collaborateurs. La fonction est devenue plus riche. Nous avons ensemble tous beaucoup réfléchi à notre stratégie. Des éléments du business plan, de la structuration et de l’organisation ont été améliorés. Notre discours stratégique est dès lors beaucoup plus clair quand nous devons répondre aux questions des candidats. Nous tâchons de leur expliquer le mieux possible la stratégie de notre ligne métier, et aussi du positionnement de la banque privée en France et dans le monde ».

En plus de redimensionner les effectifs (ce qui passe bien sûr par des réductions d’effectifs, des réorganisations internes), les DRH font désormais tout pour essayer de fidéliser et de récompenser les talents. « Pour ce faire, elles doivent en permanence allier le collectif et l’individuel », fait remarquer Jean-Paul Brette. BNP Paribas a ainsi annoncé qu’une prime d'un montant équivalent serait versée à l’ensemble des collaborateurs début 2010. De telles mesures permettent de ressouder l’ensemble des collaborateurs autour d’un traitement collectif identique.
« C’est d’autant plus important qu’en matière de rémunérations, la tendance est à la stagnation sur les rémunérations fixes, avec des baisses à la marge pour ceux qui n’ont pas d’autre choix que de changer et doivent en conséquence s’adapter au marché, poursuit Jean-Paul Brette. Mais des jeunes diplômés jusqu’aux cadres supérieurs, la Banque n'est pas un monde où l’on demande aux gens de baisser leur salaire de 25 % ».

Conclusion
« Notre équipe Banque-Finance-Assurance a plutôt bien traversé la crise : nous sommes 6 consultants sur Paris et nous intervenons sur le recrutement de cadres experts et managers ainsi que sur les cadres de direction. Notre Groupe n’anticipe aucune reprise au niveau mondial sur le marché de l’emploi intermédié avant 2011 », explique Jean-Paul Brette.

Bien sûr, cette vision mondiale cache des réalités différentes en fonction des pays. « C’est déjà bien reparti en Asie. Aux Etats-Unis, on déplore toujours des destructions d’emploi. Au Royaume-Uni, ça va un peu mieux, et en Europe continentale, le niveau d’activité enregistre une très légère hausse (de l’ordre de 5 %) depuis quelques semaines. Mais par rapport à 2007 ou au premier semestre 2008, le marché reste bien en retrait… ».

Dimanche 18 Octobre 2009



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