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Comme un vol de pigeons hors du bourbier fiscal (1)

Cela promet d'être décousu, mais je me lance ! Jean Rognetta, des Echos, a recyclé en partie une présentation de son livre coécrit avec Julie Jamot et Frédéric Tardy « La république des réseaux - Périls et promesses de la révolution numérique » (2) en permettant à des cyber-volatiles subversifs notoires – les Pigeons – d'intervenir en la personne de Fabien Cohen et Ruben Nataf (3).


Rémy Mahoudeaux
Rémy Mahoudeaux
C'est une opportune illustration de son propos, une preuve par neuf mise en évidence par l'actualité. En remarque liminaire, je suis obligé de faire le grand écart : J'ai trop vilipendé les corporatismes et autres communautarismes qui « subornent » les politiques afin qu'ils subordonnent l'intérêt public à leurs intérêts particuliers pour ne pas ressentir la contradiction qu'implique mon soutien aux emplumés entrepreneurs. Bien sur, une facile pirouette serait de dire que la loi de finances est tellement mauvaise, ce qui est sans doute vrai, que mon soutien dépasse le cadre d'une simple réaction moutonnière, ou que ma qualité de contribuable-citoyen m'autorise à exprimer mon avis sur l'impôt, même s'il n'est pas original et qu'il aura une résonance moins marginale avec la horde de tous ceux qui le partagent. Je ne sais pas si le phénomène « Pigeons » sera un feu de paille ou de chêne, mais je pense qu'il jette une lumière crue et cruelle sur l'incapacité des instances institutionnelles à anticiper, comprendre et relayer cette fronde et les idées qui la sous-tendent. Ceci pose très clairement le problème de la légitimité de ces instances, mais ce n'est ni à moi, ni ici ni maintenant de résoudre ce problème.

Arrêtons nous un instant sur la genèse de ce mouvement : suite à une tribune de Jean-David Chamboredon (4)dans la Tribune dénonçant une mesure fiscale aussi inepte que confiscatoire pour les entrepreneurs (5), certains dont Fabien Cohen et Ruben Nataf décident de « faire le buzz » : inventer une communication décalée, un brin ludique et collecter autant de soutiens que possible sur internet. L'énergie investie pour les premiers soutiens, puis les effets viraux font que 15 jours après, 70000 personnes ont « approuvé » le mouvement, et que le gouvernement s'est senti contraint de réviser sa copie. Pour pasticher l'ancien séminariste Joseph Staline demandant « Le Vatican, combien de divisions ? », imaginons un François Hollande qui demanderait « les Pigeons, combien de Likes ? »

Il y a des initiateurs, qui sont aussi les administrateurs et présumés « propriétaires » de la page Facebook et du compte Twitter. A ce titre, ils ont créé une « vraie marque » en un temps record. Mais il n'y a pas de structure, ni de board, ni d'AG, ni de statuts, ni de dirigeants au sens social du terme, ni encore de code de gouvernance. Le monde virtuel supplante ici le réel. Sont ils les leaders d'un mouvement ? Objectivement oui, mais cette question n'aura de sens que si ce mouvement devient pérenne. En attendant, une organisation minimale qui ouvre la porte mais filtre l'initiative semble la solution la plus opportune pour ceux qui incarnent ces pigeons.

Je n'ai pas encore lu « la république des réseaux », mais je voudrais rebondir sur deux points plus spécifiques de l'intervention de Jean Rognetta.

Il a appelé cela des « geysers dans la pyramide ». Notre vision de l'entreprise ou de toute organisation du monde est relativement figée, avec des décisions prises au Top qui se déclinent dans des pyramides vers un Down en tentant d'assurer une cohérence et une convergence de l'ensemble. Avec parfois l'idée, la suggestion, la proposition, l'initiative qui part du Bottom et qui monte vers un Up capable ou non de les approprier à l'organisation. La nouvelle, ni bonne ni mauvaise : la fréquence de ces geysers et leur intensité sont en nette croissance. Les modes de management futurs doivent apprendre à intégrer, filtrer, censurer, amplifier ou encore profiter de ces réactions intrinsèquement subversives.

Coté menaces, ne nous voilons pas la face : si des cyberpirates parviennent à distance à détourner un drone ou à détériorer des centrifugeuses, ils parviendront un jour à prendre le contrôle de systèmes plus critiques, et la magnitude des dégâts infligés sera sans commune mesure avec ce que nous avons vu. De même, dans le domaine militaire, il vaut mieux penser que le secret n'existe plus, puisque les données sont confiées à des systèmes faillibles. Wikileaks ne serait en définitive qu'une initiative « inconsciente » d'open-data, ce qui est une perspective à laquelle je n'avais pas pensé.

Alors oui, nous devons apprendre à vivre avec un nouveau monde numérique, avec ses opportunités comme cette initiative des entrepreneurs-citoyens qui ne veulent pas finir en pastilla, et les risques du fait d'une dépendance (insupportable ?) du monde par rapport à la donnée, sa circulation et son traitement.

Merci à la Chambre de Commerce Suédoise, notre hôte pour cette présentation et lors de la discussion animée.


(1) parodie du début des Conquérants, de José Maria de Heredia
(2) chez Fayard
(3) Fabien : @ Whoozer ; Ruben @ 10 days in Paris
(4) en quelque sorte auto-contenue puisque parue dans la Tribune
(5) augmentation très significative des plus-value de cession


Vendredi 19 Octobre 2012




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